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Dix
neuf
années après les inondations de Bab El Oued (10
novembre 2001), la stratégie nationale de prévention des risques majeurs se
limite à une réponse d'ordre procédural sous forme d'une loi adoptée en 2004.
Une loi restée « figée » sans réelle incidence opérationnelle. Une loi qui ne
cesse de « buter sur une série de problèmes ».
C'est le constat dressé, hier à Alger, par le professeur Abdelkrim Chelghoum, expert en gestion des risques majeurs. Un constat qui sonne, en cette douloureuse date anniversaire, comme un aveu d'échec des politiques en la matière, mais aussi comme une sérieuse mise en garde qui intervient en plein pandémie de Covid-19 et au lendemain d'une inédite vague de feux de forêt qui a causé deux morts et ravagé plus de 1.200 hectares de couvert végétal. Deux sérieuses menaces qui font, pourtant, partie des 10 risques majeurs qui concernent l'Algérie sur les 14 identifiés par l'ONU. «Ce dont nous avons besoin aujourd'hui, c'est d'une véritable stratégie de prévention, de gestion et de protection contre les risques majeurs, » a ainsi plaidé le professeur Abdelkrim Chelghoum à l'occasion de son passage à l'émission « l'Invité de la rédaction » de la chaîne 3 de la Radio algérienne. Evoquant la terrible catastrophe des inondations de Bab El Oued, l'intervenant rappelle qu'elle a entraîné la mort de 800 personnes, engendré 15.000 sans-abri et provoqué pour quelque 30 milliards de dinars de dégâts matériels. L'Algérie est confrontée, a-t-il affirmé, à 4 types de risque majeurs. Il y a d'abord les risques naturels, à savoir les séismes, les inondations et les feux de forêt. Mais il y a aussi les risques pétrochimiques et industriels, a-t-il noté, rappelant au passage que 5 incidents ont été enregistrés au cours des six derniers mois au niveau des installations pétrochimiques à travers le territoire. L'Algérie, a-t-il ajouté, est aussi concernée par les risques pandémiques et épidémiques comme c'est le cas aujourd'hui avec la Covid-19, et enfin avec les risques environnementaux (marées noires) avec les 1.200 km de côtes que nous possédons. De la stratégie de prévention des risques majeurs, il observe que depuis la promulgation, le 25 décembre 2004, d'une loi destinée à l'organiser, celle-ci continue de « buter sur une série de problèmes ». Certes, il y a eu beaucoup d'efforts de faits en matière d'élaboration de procédures de prévention contre les risques majeurs à travers la loi 04-20, mais, relève-t-il, cette loi est restée « figée ». Une loi adoptée en décembre 2004, juste après le tremblement de terre de Boumerdès en 2003, qui « prévoyait la création d'un observatoire, un organe important, avec des prérogatives et des missions très claires », a-t-il rappelé. Malheureusement, a-t-il déploré, « cet organe qui n'a été mis en place qu'en 2012, a finalement été remplacé par la suite par une simple direction relevant du ministère de l'Intérieur ». Ce qui est « totalement aberrant », s'est-il insurgé. Expliquant ce qu'est un risque majeur, le professeur Chelghoum indique que celui-ci est de fréquence « simple », du fait qu'il ne survient pas fréquemment. Il y ajoute son « caractère collectif », parce que pouvant survenir en divers endroits, de même que la gravité de ses effets, pertes humaines et matérielles très importantes, « dépassant les capacités d'un Etat». A tous ces aspects, l'intervenant ajoute le concept de « vulnérabilité », c'est-à-dire la capacité de résilience, c'est-à-dire de pouvoir répondre, immédiatement, aux effets d'une catastrophe de forte ampleur. Commentant la lutte entreprise actuellement pour tenter de freiner la pandémie du coronavirus, l'invité déclare qu'il aurait « souhaité voir s'installer au lieu et place d'un Conseil scientifique chargé de gérer cette crise sanitaire, un organe appuyé par des épidémiologistes, des médecins, des psychiatres, des psychologues, des ingénieurs et autres statisticiens », mieux à même, selon lui, de la gérer. Le professeur Abdelkrim Chelghoum observe enfin qu'il faut en finir avec les discours sans suite. Il rappelle que depuis 2001, l'Algérie a été endeuillée par 120 catastrophes de grande ampleur, estimant qu'il reste toujours à instituer les règles d'une stratégie de prévention et de gestion et de protection contre les risques majeurs, dont il considère qu'elle devrait être confiée à un observatoire agissant sous la direction du Premier ministre ou du chef de l'Etat. |
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