Directeur
général des Archives et conseiller chargé de la mémoire auprès de la présidence
de la République, Abdelmadjid Chikhi a déclaré, dans
un entretien publié, hier, par l'AFP, qu'il ne s'agit pas, dans le cadre de la
démarche du «travail conjoint», entre l'Algérie et la France, sur les questions
de la mémoire coloniale, d'écrire l'Histoire, mais «pour lancer, peut-être, un
dialogue» sur ces questions. Désigné pour être le vis-à-vis de l'historien
français Benjamin Stora, Abdelmadjid Chikhi affirme qu'«en proposant de désigner des deux côtés
une personnalité », «il ne s'agit pas d'écrire l'Histoire », mais « peut-être,
un dialogue sur les problèmes de mémoire». «La mémoire, c'est quelque chose de
beaucoup plus vaste. Il s'agit de voir comment amener les deux pays à gérer
leurs mémoires », ajoute Chikhi, estimant qu'il
s'agit de « confronter et discuter » les visions algérienne et française « en
matière des problèmes de mémoire ». A la question de savoir si les « débats
mémoriels ne risquent-ils pas d'envenimer les relations franco-algériennes », Chikhi estime qu'il faut « réfléchir » pour que les «
problèmes de mémoire (...) ne puissent pas gêner la fondation de rapports
normaux entre deux Etats indépendants ». « C'est la vision que nous nous
faisons en Algérie. Nous voulons avoir des rapports sereins avec nos voisins,
même s'il y a une mer qui nous sépare de l'autre rive ». Sur l'attente de la
partie algérienne de la France, sur le dossier de la mémoire, Abdelmadjid Chikhi répond : « Nous avons subi 132 ans d'une
colonisation qui a été atroce, très destructrice. La Société algérienne a été
désarticulée. Nous sommes en train d'essayer de la remettre sur pied et les
problèmes de mémoire se posent ». Ajoutant qu'en ce qui concerne l'Algérie, «
nous faisons le travail» et «il faut que le même travail soit fait de l'autre
côté» pour «confronter nos idées et peut-être arriver à une vision qui ne soit
pas trop contradictoire, ni une vision à sens unique». « Donc nous voulons des
rapports sereins dans le respect mutuel et également dans l'exploitation des
problèmes de mémoire, selon les circonstances de chaque pays », a-t-il conclu. Pour rappel, s'expliquant en marge d'une
cérémonie en hommage à l'avocate et militante Gisèle Halimi, décédée mardi
dernier, M. Chikhi a indiqué, jeudi, que la partie
algérienne attend de savoir quelles sont les intentions françaises après la
désignation de Benjamin Stora pour travailler sur le
dossier de la mémoire avec l'Algérie et quel volet sera évoqué pour le
lancement de ce travail commun », ajoutant que « l'on parle d'une écriture
commune de l'Histoire, qui est, toutefois, ni souhaitable ni possible».
«Benjamin Stora était à l'origine de l'initiative de
l'écriture commune de l'histoire, mais il y a longtemps, en exprimant le
souhait de voir des historiens, algériens et français, se rencontrer afin
d'écrire l'histoire commune. Je pense qu'il a renoncé dernièrement à cette
idée, lorsqu'il avait reconnu que c'était difficile», a expliqué M. Chikhi, se disant, à cet effet, convaincu que «cela est
vraiment très difficile, compte tenu de motivations qui diffèrent d' «une
partie à une autre». «Nous voulons une Histoire nationale homogène et
chronologique, alors qu'ils veulent une histoire fragmentée », a-t-il ajouté.