L'assentiment
donné par la Commission ministérielle de la Fatwa concernant le sacrifice du
mouton de l'Aïd El Adha fait craindre le pire aux professionnels de la santé.
Selon ces derniers, un véritable désastre nous attend après cette fête
religieuse qui, même sans l'autorisation du sacrifice du mouton de l'Aïd, offre
déjà un terrain fertile pour la propagation du Covid-19 avec les déplacements
de la population, les contacts serrés et le manque flagrant de respect des
règles sanitaires. Pour être mieux avisé, nous avons un échantillon pour
mesurer les conséquences alarmantes de tels relâchements, vécus lors du ramadhan,
de l'Aïd El Fitr et du déconfinement, à savoir des records de contaminations au
Covid-19 et un afflux massif des malades, de plus en plus important, vers les
établissements hospitaliers, à l'origine de l'épuisement des personnels
soignants. Que vaut un Aïd qui présage d'une catastrophe au premier tournant ?
Et sur quelles bases la commission ministérielle a-t-elle décidé d'autoriser la
population à sacrifier un mouton à l'occasion de l'Aïd El Adha ? D'habitude, la
commission se réfère toujours et avec insistance à l'avis du Comité ministériel
de suivi de la pandémie Covid-19 avant de rendre ses fatwas, comme on l'entend
pour le maintien de la fermeture des mosquées notamment, ce procédé a-t-il été
suivi dans ce cas de la prise de décision concernant le sacrifice du mouton de
l'Aïd ? D'après les réactions des spécialistes, dont certains ont lancé un
appel aux autorités pour décréter l'«abstention pour tous» du sacrifice du
mouton de l'Aïd El Adha, en raison de la pandémie du coronavirus, il est
difficile d'imaginer une concordance des points de vue entre la Commission
ministérielle de la fatwa et le Comité scientifique de suivi de l'évolution de
la pandémie du coronavirus. Le seul point qui pourrait trouver une même
longueur d'onde entre les deux parties est lié aux conditions ou mesures
draconiennes accompagnant cette autorisation, soit la stérilisation des outils
d'abattage, la réduction du nombre de participants à l'opération d'abattage,
l'utilisation d'un masque de protection à toutes les étapes liées au sacrifice
(de l'achat jusqu'à la fin du sacrifice) et l'interdiction du sacrifice sur les
routes et les espaces publics. Et on devrait prévoir l'impossibilité de faire
respecter ces mesures par la population. En temps normal, on n'arrive pas à
convaincre les gens de suivre les mesures barrières, de porter la bavette,
comment le pourrait-on par temps de célébration de la plus importante fête
religieuse pour les musulmans ? L'opération de sacrifice du mouton de l'Aïd
impose, du début à la fin (achat, transport et abattage), les contacts et les
rassemblements propices à la propagation du Covid-19. D'ailleurs, toutes ces
activités, limitées ou carrément interdites, marchés de bétail fermés et
déplacements interdits entre wilayas, devaient plaider pour une renonciation
collective au sacrifice du mouton de l'Aïd El Adha qui clôture le pèlerinage.
Quel sacrifice alors quand le pèlerinage, lui-même, est suspendu à cause de la
pandémie ? De nombreux citoyens ont décidé d'y renoncer, de leur propre chef,
mais cela ne suffit pas à réduire la menace de la propagation du Covid-19,
puisque le voisin ou le proche qui a décidé de s'engouffrer dans la voie du
sacrifice sacrifie tous les efforts de protection contre le Covid-19 initiés
par ceux qui s'abstiennent de tout sacrifice.