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Après le déficit dramatique des exportations de gaz vers l'Italie relevé
une première fois par le rapport de l'entreprise italienne ENI au premier
semestre 2019, puis les deux premiers mois de l'année 2020 par la revue MEES,
voilà que le journal électronique El Confidential
citant les chiffres de Cores, la société qui gère les
réserves d'hydrocarbures nous apprend que l'Espagne se rue vers les navires
américains pour acheter au marché spot le Gaz naturel liquéfié(GNL) en
acceptant délibérément de payer des pénalités en se détournant du Gaz naturel
algérien qui lui arrive par le gazoduc Medgaz à
travers le Maroc.
D'abord, de nombreux analystes ont pris cette information qui circulait déjà il y a quelques semaines de « Fake News » de part le prix de revient d'arrivée au Hub européen du gaz américain. Il se trouve qu'après renseignement pris, les producteurs du gaz de schiste américains acculés par les banques pour rembourser leurs dettes favorisent les liquidés au prix et donc tant que la crise sanitaire persiste, ils ne fermeront pas leurs puits même s'ils bradent leur gaz. Cette perte des parts de marché ne date pas d'aujourd'hui mais du début de l'année 2019 mais aucune mesure n'étant prise par les responsables concernés pour y remédier notamment du côté de la Sonatrach. Quelle est justement la chronologie de cette suite d'évènement regrettable qui semble ne pas préoccuper les commerciaux de Sonatrach ? 1-L'entreprise italienne ENI en parle de son rapport Dans son bilan du premier semestre 2019, le géant italien ENI, principal client gazier de l'Algérie révèle la baisse « dramatique » des exportations Algérienne vers l'Italie durant ces premiers mois de l'année en cours. (01) Ces volumes y compris le gaz naturel liquéfié (GNL) qui étaient de 6,48 milliards de m3 durant la même période en 2018 sont redescendus à 3,73 milliards de m3 de janvier à juin 2019 soit une baisse de 42,4%. Le rapport relève que cette baisse drastique non attendue, devait le contraindre pour faire de la gymnastique afin de combler ce déficit qui a certainement causé une perturbation dans la programmation de la compagnie italienne qui a réussi à trouver son salut là où on ne s'attendait le moins. En effet, la Libye en plein guerre civile et dans une instabilité depuis plusieurs années a fait un effort pour une disponibilité de plus de 1,1 milliards de m3. Les six premiers mois de l'année 2018, elle a fourni aux italiens 1,80 milliards de m3, elle en a approvisionné durant la même période en 2019, 2,90 milliards de m3. Les autres clients y compris la compagnie elle-même par ses propres moyens sont restés stables voire presque au même niveau avec la Russie qui a fourni durant les six premiers mois 2018 et 2019, 13,29 milliards de m3 successivement. Cette situation était attendue depuis ces deux dernières années où des déviations des gaz d'injection pour compléter les exportations, souvent sans l'aval de l'Etat (Alnaft, ministère, conseil d'administration), ont porté atteinte aux gisements sur le court terme. Pour rappel, au premier trimestre 2017 les volumes avaient augmentés de 6,6%. La baisse est amorcée à partir du deuxième trimestre de la même année et depuis n'a cessé de suivre cette tendance négative. En volume les exportations ont baissé de 8,4% en 2018 après avoir enregistré une baisse de 3,5% en 2017. 2- La situation en 2020 pour l'Italie s'est aggravée Dans la revue « MEES » qui publie hebdomadairement des analyses de pointe sur le pétrole et le gaz depuis septembre 1957 (02), on apprend que les importations italiennes de gaz algérien sont en voie d'atteindre leur plus bas niveau mensuel depuis plus de cinq ans en ce mars 2020, les 12 premiers jours du mois n'atteignant que 324 millions de pied cube par jour (9,2 millions de m3 /jour). A la même période en 2016 par exemple, la quantité exportée était sur le point d'atteindre prés du double soit 602 millions de Cubic Feet Day (17 millions de m3 /jour) .La baisse de la production de gaz de l'Algérie poursuit l'article, conjuguée à une demande intérieure record, a vu l'approvisionnement en canalisations de 2019 atteindre son plus bas niveau en quatre ans à 987 millions de Cubic Feet Day (28,03 millions de m3 /jour). Il faut signaler par ailleurs lit ?on que l'Italie n'a rien d'extraordinaire à prendre du moins en ce mois de mars alors que la saison d'hiver tire à sa fin. L'ampleur de l'automne suggère que d'autres facteurs rentreront en jeu. En plus, avec des prix spot mondiaux du GNL à des niveaux record, les acheteurs européens ont cherché à maximiser les achats de GNL au détriment du gazoduc pétrolier plus cher pendant que les organes de commercialisation et de marketing de Sonatrach se cantonnent confortablement dans leur bureau en attendant la prime de fin d'année. 3- Les chiffres de CORES sont incontestables Cette agence contribue à garantir la sécurité d'approvisionnement des produits pétroliers, du GPL et du gaz naturel en Espagne. De plus, il a été la principale source d'information pour le secteur des hydrocarbures en Espagne depuis sa création en 1995. En décembre 2013, CORES a été nommé entité centrale de stockage au sens de la directive 2009/119 de la Communauté Européenne. Son constat semble implacable. En février dernier 2020, les Etats Unis ont couvert 27% des importations espagnoles de gaz naturel soit 7 924 GWh sachant qu'en fonction de la qualité du gaz, on environ 9 à 12,5 KWh/m3 pour être «le principal fournisseur «pour la première fois depuis prés de 30 ans maintenant. L'Algérie pour le même mois de Février 2020, avait couvert 22,6% du total des importations espagnoles en gaz naturel. Ce revirement brusque est arrivé l'année dernière en 2019 avec une baisse des achats espagnols en hydrocarbures en provenance de l'Algérie de 38,4%. Les USA depuis le boom du gaz de schiste et depuis l'arrivée de Donald Trump, ont voulu diversifier leurs clients et marchés étrangers surtout en Europe qui était depuis toujours le marché numéro un de l'Algérie, qui en 2018, avait couvert 48,5 % du gaz naturel consommé en Espagne. Cette situation qui paraissait au départ exceptionnelle voire conjoncturelle semble arranger les clients espagnols. Pourquoi ? De nombreux opérateurs préfèrent rompre leurs engagements et acheter du gaz sur le marché «spot», où les prix sont à un niveau minime, au point où il est moins cher d'acheter du gaz naturel, même en payant des pénalités pour les contrats signés. Il se trouve qu'il n'y a pas que le gaz de schiste américain mais la fédération Russie concurrence aussi le gaz naturel algérien en offrant le GNL à bas coût. Résultat : les Etats-Unis ont augmenté leurs ventes vers l'Espagne de 467% au cours des deux derniers mois, celles de l'Algérie ont baissé de 30% entre janvier et mars, l'Espagne a reçu 20 251 GWh de GNL américain contre 19 748 GWh d'Algérie. 4- le prix du gaz à zéro dollar est évoqué ces derniers temps avec insistance Le président d'un grand holding d'énergie l'ENN Energy Holding, considéré comme l'un des plus grands distributeurs du gaz naturel en Chine depuis longtemps n'exclut pas que le prix du gaz naturel subira sous peu le même sort que le prix du pétrole Newyorkais (WTI) le 20 avril dernier c'est-à-dire bradé à 0 dollar On constate désormais poursuit ce magnat de distribution du gaz que la capacité de stockage de ce combustible se fait de plus en plus rare car la consommation s'est drastiquement contractée Ce syndrome qui hante les traders suite aux événements du 20 avril dernier où le baril du WTI s'échangeait à -37, 63 dollars le baril même si cela de courte durée sa remontée se fera progressivement en fonction de la reprise des activités économiques dont aucun Etat en a l'assurance et la certitude. Les prix de référence du gaz en Asie, en Europe et aux États-Unis ont tous atteint des niveaux historiquement bas cette année, dans un contexte d'offre excédentaire et de demande atone. 5- Pour Sonatrach, cette situation ne date pas d'aujourd'hui, fallait il s'y attendre Le marché gazier représente une part importante des exportations de l'Algérie, la`situation semble s'empirer de plus en plus. En effet, la section parisienne de l'association Cedigaz n'a pas mis les gants pour présenter dans son rapport une analyse pessimiste du marché du gaz il y a de cela prés d'une décennie. Il est indolent à cause de la crise de l'euro. Ceci n'a pas épargné le commerce global du gaz aussi bien celui naturel liquéfié (GNL) que le traditionnel par gazoduc. Ainsi, le gaz russe qui arrive en Europe a perdu près de 4% en 2012 pour se stabiliser autour de 701,5 milliards de m3, à cause du ralentissement des activités dans les principales zones de consommation européennes et dans la Communauté des Etats indépendants (CEI) qui concentrent ensemble la plus grande partie des flux gaziers internationaux. En dépit d'une très forte demande du marché asiatique du GNL, dans sa globalité cette ressource n'échappe pas à la crise. En effet, l'offre mondiale de GNL a chuté de 2,2%. En général, les transactions internationales du marché gazier sont ralenties de 0,8% pour un volume d'échanges de 1015 milliards de mètres cubes. L'association situe les causes de ce ralentissement qui selon toute vraisemblance va durer dans le temps, aux incertitudes du climat économique, aux tensions géopolitiques et surtout aux problèmes de sécurité dans les pays arabes. La consommation globale de gaz naturel s'est établie à 3348,7 milliards de m3, soit une faible hausse de 2,2% par rapport à 2011 et cela a effectivement continué, ce qui est pour le moins qu'on l'on puise dire un taux de croissance inférieur à la moyenne des dix dernières années à 2,7%. En 2001, la consommation avait crû de 2,8%. Le développement rapide des gaz de schiste a été la cause des nombreuses difficultés rencontrées par les producteurs traditionnels qui ont dû faire face à une concurrence accrue. Il faut ajouter à cela l'abandon progressif des contrats de longue durée, au-delà de 20 ans dans les transactions commerciales du gaz qu'il soit naturel ou liquéfié qui n'est plus un choix délibéré comme on le laisse entendre mais une contrainte imposée par le nouveau contexte juridico - économique dans les principales zones de consommation. L'avancée considérable vers une politique énergétique commune des principaux pays européens, la révolution du gaz de schiste aux Etats-Unis et ses suiveurs vont à court terme ramener les prix du gaz à la baisse et c'est le cas aujourd'hui. Cette situation offrira la possibilité aux consommateurs d'avoir un choix au moment où leurs économies ont en vivement besoins. Donc, Sonatrach et à travers elle l'Algérie aurait pu tenir compte de ces nouvelles donnes pour ajuster sa stratégie. Cette démarche l'obligera de voir ses clients avec œil nouveau, en tout cas très loin de celui des années 60. 6-Une nouvelle approche commerciale est impérative Dans ce nouveau contexte commercial, ce type de contrat long terme fondé sur le principe du partage de risque, ne serait pas favorable pour le consommateur et encore plus pour le producteur du gaz, pourquoi et comment ? L'Algérie a toujours rencontré des difficultés dans les pays de la rive sud de la méditerranée pour trouver un débouché pour son gaz. Même si l'on s'aligne sur l'idée que le contrat historique entre Sonatrach et la société El Paso Natural Gas portant sur une capacité de 20 milliards de m 3 sur 25 ans comme une mauvaise affaire pour l'Algérie, on ne doit pas non plus oublier tout de même que ce contrat a été proposé au géant américain après le refus des compagnies Françaises sans compter la préoccupation pressante pour commencer à recevoir un retour sur les investissements consentis pour le développement du champs de Hassi R'mel , le transport et la liquéfaction du gaz à commercialiser. Aujourd'hui avec Medgaz vers l'Espagne et celui du Galsi vers l'Italie, on peut se demander si cette entreprise n'a pas tiré de leçons des différents problèmes qu'elle a eu avec les pays européens dés ses premières années d'exportation. Intègre t- elle ces nouvelles donnes dans sa stratégie gazière à long terme ? La dérégulation du marché du gaz est très avancée aux Etats-Unis et en Grande Bretagne. L'Europe qui vient de se lancer dans ce processus a commencé à ressentir ses effets sur les prix du gaz. Le principal objectif que vise la libéralisation de l'énergie est le développement des marchés « spot » qui permet à leur tour des échanges directs sur le court terme avec une multiplicité des acteurs. Cette nouvelle configuration du marché aura une influence directe sur l'équilibre offre/demande et par voie de conséquence sur les prix. Le but visé est que ces prix serviront de référence aux contrats moyens - long termes. Il est clair que d'un tel contexte de relation entre les différents acteurs naîtra une forte concurrence et une fluidité des prix qui rendront difficile la visibilité sur le long terme d'où l'hésitation d'engagement sur de longues périodes. En effet, une forte fluctuation des prix augmente le risque des investissements du type capitalistique à consentir dans ce genre d'activité. *Consultant, économiste pétrolier Renvoi : 01- https://www.eni.com/docs/en_IT/enicom/publications-archive/publications/reports/reports-2019/Interim-consolidated-report-June-30-2019.pdf 02- https://www.mees.com/2020/3/13/news-in-brief/algeria-to-italy-gas-slump/40b8c910-653e-11ea-8d33-05d77048930a |
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