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Le projet de révision de la
Constitution repose sur des nouveautés politiques institutionnelles, entre
autres la création d'un poste de vice-président et la possibilité de l'armée
algérienne de sortir de ses frontières pour participer à des opérations de
maintien de la paix.
La présidence de la République a remis jeudi dernier la mouture de révision de la Constitution aux chefs de partis politiques, personnalités nationales, académiciens, responsables d'organisations professionnelles, syndicales et estudiantines, associations de la société civile ainsi qu'aux directeurs d'institutions médiatiques, en vue d'en prendre connaissance et d'apporter d'éventuels correctifs ou de l'enrichir par de nouvelles suggestions. Dans sa lettre d'accompagnement, le président de la République leur rappelle «son engagement à procéder à l'élaboration d'un projet de Constitution consensuelle et sa promesse d'ouvrir un large débat autour de cet avant-projet par des contributions constructives en y apportant les modifications, les suppressions et les ajouts que vous jugez utiles». Promesse qu'il accompagne d'une exigence conjoncturelle de «respect des mesures préventives de lutte contre la propagation du Covid-19». Elaborée par un collège d'experts installé par le chef de l'Etat le 14 janvier dernier sous la présidence de Ahmed Laraba, le document de 7 chapitres en plus de l'exposé des motifs»se veut, écrit Tebboune, une simple mouture pour une révision globale et profonde de la Constitution. Il s'agit donc d'une plateforme de débat (?)». La commission Laraba a formulé en substance des propositions autour»des droits fondamentaux et les libertés publiques», du «renforcement de la séparation entre les pouvoirs et leur équilibre», du «pouvoir judiciaire», «la cour constitutionnelle», «la transparence, la prévention et la lutte contre la corruption», et «l'Autorité nationale indépendante des élections». Création d'un poste de vice-président Dans le premier axe, les propositions n'apportent pas grand chose à l'esprit de la Constitution de 2016. Pour ce qui est de «la consécration constitutionnelle de la liberté de la presse sous toutes ses formes et interdiction du contrôle préalable sur cette liberté» proposé dans l'article 54 (50), on relève néanmoins que dans sa nouvelle formulation, la prescription «le délit de presse ne peut être sanctionné par une peine privative de liberté» est reléguée curieusement à l'alinéa 5 du nouvel article. Au titre du «renforcement de la séparation et de l'équilibre des pouvoirs», la commission propose deux premières nouveautés. En sus de son maintien de «la limitation du mandat présidentiel à deux (2) mandats successifs ou séparés», on note la «possibilité pour le président de la République de nommer un vice-président et de mettre fin à ses fonctions» ainsi que «la consolidation de l'institution du chef de gouvernement». Au cas où il est nommé, le vice-président peut selon l'article 98 (102) alinéa 7 remplacer le président de la République dans le cas où il est dans l'incapacité d'exercer ses fonctions. Le vice-président le fera durant la période qui reste du mandat du président. Alinéa qui fait déjà jaser les juristes qui pensent que le président est élu au suffrage universel, il ne peut en aucun cas remettre une des périodes de son mandat électif à une autre personne (non élue). Proposition est en outre faite pour la «Limitation du mandat parlementaire à deux (02) mandats ; Distinction entre l'immunité parlementaire pour les actes rattachés à l'exercice du mandat parlementaire et l'immunité parlementaire pour les actes non rattachés au mandat parlementaire ; Suppression du droit de légiférer par ordonnances durant les vacances parlementaires ; Maintien de la limitation de la législation par voie d'ordonnance aux seuls cas de vacances de l'APN ou durant l'état d'exception assorti de l'obligation de les soumettre au Parlement dans le délai requis ; Obligation faite au gouvernement de faire accompagner les projets de lois par de textes réglementaires d'application faute de quoi les projets de lois ne seront pas inscrits à l'ordre du jour du Parlement ; Obligation du gouvernement de présenter au Parlement à sa demande tous les documents et informations pour l'exercice de son contrôle ; Possibilité d'engager la responsabilité du gouvernement suite à l'interpellation du Parlement». L'on note par ailleurs la proposition de «suppression du tiers présidentiel constituant le Conseil de la Nation». Le Conseil constitutionnel transformé en une cour A propos de l'indépendance de la justice, on relève comme proposition «la constitutionnalisation du principe de l'inamovibilité du juge et les garanties y afférentes et celle de la composition du Conseil supérieur de la magistrature». Aussi «la vice-présidence du Conseil supérieur de la magistrature est assurée par le Premier président de la Cour suprême qui peut suppléer le président de la République en sa qualité de président du Conseil; Le ministre de la Justice et le Procureur général près la Cour suprême ne font plus partie du Conseil supérieur de la magistrature ; Augmentation du nombre des magistrats élus représentant les magistrats du siège proportionnellement à leur effectif et maintien du nombre des magistrats élus représentant le parquet ; Intégration de deux (02) représentants syndicaux des magistrats et du président du Conseil national des droits de l'Homme au Conseil supérieur de la magistrature». Est proposée par l'article 193 (182) «la consécration de la Cour constitutionnelle au lieu et place du Conseil constitutionnel avec modification de la composition de la Cour ainsi que le mode de désignation de ses membres (art 94 (183) ; Extension de la compétence de la Cour constitutionnelle au contrôle des ordonnances et à la conventionalité des lois ; Consécration du contrôle à postériori de la Cour constitutionnelle sur les ordonnances et les règlements ; Reconnaissance du droit de saisine aux instances compétentes aux fins de demander un avis interprétatif des dispositions constitutionnelles ; Consécration de la compétence de la Cour constitutionnelle pour connaître des différends pouvant surgir entre les différents pouvoirs constitutionnels sur saisine des instances compétentes». Au titre de la «Transparence, prévention et lutte contre la corruption». L'armée dans des opérations de maintien de la paix L'article 215 (202) propose la «Constitutionnalisation de l'autorité de la Transparence, de la prévention et de lutte contre la corruption. L'article 216 (203) stipule «l'Interdiction de cumul entre fonctions publiques et activités privées ou professions libérales; Prohibition de création d'un emploi public ou d'une commande publique si elle ne répond pas à un besoin d'intérêt général ; Tout agent public doit éviter la situation de conflits d'intérêts ; Déclaration de patrimoine au début et à la fin de fonctions pour toute personne nommée à une fonction supérieure ou élue dans une assemblée parlementaire ou locale ; Obligation aux pouvoirs publics de respecter et de faire respecter la bonne gouvernance et la transparence dans la gestion des affaires publiques; Répression par la loi du trafic d'influence». Une proposition inédite dans l'article 31 (29) qui stipule que «l'Algérie peut, dans le cadre des Nations unies, de l'Union africaine, de la Ligue arabe et sous réserve du respect général de ses principes et objectifs, participer à des opérations de maintien de paix et pour le retour de la paix». Cette importante proposition est soutenue par un alinéa de l'article 95 (91) qui note qu'au titre de ses prérogatives constitutionnelles et réglementaires, «le président de la République décide de l'envoi d'unités de l'armée à l'extérieur du pays après vote du Parlement à la majorité des deux tiers de ses membres». Une telle approche de défense pourrait répondre aux impératifs de paix et de stabilité du pays qui sont étroitement liées à la sécurité de toute la région menacée qu'elle est depuis quelques années par les conséquences de la crise libyenne et des conflits dans la bande sahélo-sahélienne. Une fois débattu, ce projet de révision de la Constitution sera déposé auprès du Parlement pour adoption et soumis ensuite à un référendum populaire. |
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