Le grand déballage du linge sale a commencé, hier, au
tribunal de Sidi M'hamed où s'est ouvert le procès
d'ex-hauts responsables, dont deux ex- Premiers ministres, Ouyahia
et Sellal, ainsi que l'ex-ministre de l'Industrie,
Youcef Yousfi, et plusieurs autres accusés poursuivis dans des affaires de
corruption. Un procès qui fait de l'ombre à une campagne électorale sans grand
attrait public. Un procès qui fait, à lui seul, campagne électorale auprès des
électeurs, du «Hirak » en général, qui revendique des
membres du système de rendre des comptes sur la razzia ou la conspiration
contre les biens du peuple sous l'ère de la présidence d'Abdelaziz Bouteflika.
D'ailleurs, le fait de voir passer à la barre devant le juge, Ouyahia et consorts, a provoqué un immense soulagement chez
les Algériens, qui considèrent qu'il s'agit là d'une humiliation qui n'a pas
d'égale et souhaitent, déjà, que le verdict soit à la mesure des crimes commis
contre les intérêts du pays et son peuple. Mais il ne faut pas s'attendre à ce
que le verdict tombe avant l'élection présidentielle, car le procès sera long,
selon les spécialistes. Le dossier d'enquête préliminaire instruite par la
police judiciaire de la Gendarmerie nationale d'Alger, pour des faits à
caractère pénal, à l'encontre des mis en cause, et ce, dès les premières
manifestations du « Hirak », a duré plusieurs mois
avant qu'il ne soit transmis par le parquet général près la cour d'Alger, fin
mai dernier, au procureur général près la Cour suprême, et il ne faut pas
croire que le procès sera expédié par le juge en quelques jours. Ce sera un
procès de longue haleine, où les rebondissements ne vont pas manquer. Déjà, on
constate dès le premier jour que les mis en cause essuient le couteau contre
les manteaux d'autres accusés, cités dans les mêmes sales affaires mais absents
au procès, dont l'ex-ministre de l'Industrie, Abdesselem
Bouchouareb. Ce dernier, qui se trouve en fuite à
l'étranger, présente à chaque convocation du tribunal, par le biais de ses
avocats, des certificats de maladie qui l'empêcheraient de se présenter devant
les juges. Pourtant, il fait figure d'accusé principal dans ces affaires de
corruption et d'atteinte aux deniers publics liées au montage automobile. Son
nom a été plusieurs fois cité par les prévenus qui comparaissaient, hier,
devant le tribunal de Sidi M'hamed. Et il va
certainement assumer, par contumace, une grande part de responsabilité dans les
crimes commis dans ce contexte. Un autre ex-haut responsable est également
revenu à maintes reprises dans les réponses des accusés, notamment l'ex-Premier
ministre, Abdelmalek Sellal, en l'occurrence celui de
l'ex-président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Au fait, son ombre plane
sur ce procès où il fait figure de grand absent. Peut-on faire le procès de
tous ces responsables de gouvernements successifs qui ont été nommés par les
soins du président de la République, et qui ont tous officié sous ses ordres,
durant plusieurs années sans qu'il ne soit appelé à la barre ? Sur le plan du
droit et de la morale, et pour aller au bout de cette action, l'ex-président de
la République devrait être dans le box des accusés. Même s'il est malade, un
procès purement moral, ou juste pour la forme, devrait être intenté contre sa
personne. On vénérait bien son cadre lorsqu'il était en poste et on peut bien
le juger, pour l'histoire, même s'il est absent.