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Ouyahia, Sellal et patrons d'usines de montage de véhicules: Début du procès sans la défense

par Z. Mehdaoui

Les avocats de la défense dans les affaires de corruption impliquant notamment les deux ex-Premiers ministres, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, et des patrons d'usines de montage de véhicules comptent boycotter le procès qui devrait commencer aujourd'hui mercredi. Plusieurs avocats, notamment le bâtonnier d'Alger, Abdelmadjid Sellini, ont annoncé sur leur page Facebook leur intention de déserter la salle d'audience du tribunal de Sidi M'hamed.

Il semblerait que le collectif des avocats (50) en charge de la défense des deux ex-Premiers ministres mais aussi plusieurs autres membres du gouvernement et des patrons de groupes industriels se sont donné le mot pour boycotter le procès qui tient en haleine tout le pays. Abdelmadjid Sellini a déjà donné le ton lundi dernier après la décision du juge de reporter le procès à ce mercredi.

«C'est un jour de deuil pour moi. Nous espérions un procès équitable avec toutes les garanties de sérénité et de transparence. Mais cela n'est pas le cas. La justice est toujours politisée», a-t-il déclaré aux dizaines de journalistes venus couvrir l'évènement. Le bâtonnier d'Alger a affirmé en colère que «les conditions d'une justice juste ne sont pas réunies». Plus loin, Maître Sellini qualifie le procès de «sentence destinée à la consommation publique» en soulignant que «les prévenus ne sont que des boucs émissaires qu'il faut sacrifier. Nous refusons, en tant qu'avocats, de prendre part à cette mascarade».

De son côté, Maître Khaled Bourayou a déclaré que «le gouvernement veut donner un bouc émissaire à l'opinion publique à la veille des élections présidentielles du 12 décembre prochain et cela est inacceptable».

Ouyahia, Sellal et les ministres Youcef Yousfi, Mahdjoub Beda, Abdelghani Zaalane et Abdesselam Bouchouareb (toujours en fuite) sont poursuivis avec les hommes d'affaires Hassan Larbaoui, Mohamed Bairi, Ahmed Mazouz et Ali Haddad ainsi que l'ex-wali de Tipaza, Mounia Zerhouni, pour «octroi d'indus avantages» et «corruption» dans l'affaire du montage de véhicules. De lourdes accusations pèsent sur les deux anciens Premiers ministres notamment l'attribution d'indus avantages à des hommes d'affaires dans des concessions liées notamment à la construction automobile.

Une seconde affaire a trait au «blanchiment d'argent et à l'utilisation de biens issus de revenus illicites à des fins criminelles». Dans cette affaire, la justice devra examiner trois dossiers impliquant une soixantaine de prévenus. Les hommes d'affaires Ali Haddad, patron de l'ETRHB, Ahmed Mazouz, patron du groupe éponyme, Mohamed Baïri et son frère, patrons du groupe Ival, et Hacène Arbaoui, patron de Global Group, qui assemble notamment des voitures de marque KIA et Hyundai utilitaires, y sont accusés.

Le procès est le premier traité par la justice en audience publique depuis le début de l'opération anticorruption qui a commencé après la démission d'Abdelaziz Bouteflika, le 2 avril 2019, après vingt ans de règne sans partage. D'autres dossiers vont suivre durant les prochaines semaines et concernent des ministres, des walis, des directeurs centraux de ministères et des hommes d'affaires.

L'appareil judiciaire compte remonter à des affaires de corruption datant même des années 1990 du temps des DEC (délégation exécutive communale). Des milliers de dossiers ont été «dépoussiérés» et la justice semble vouloir frapper d'une main de fer tous ceux qui se sont servis et ont détourné l'argent public.