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Il y
a ceux qui achètent de l'or. Il y a, surtout, ceux qui vendent leur or pour
satisfaire, dans l'urgence, des besoins, souvent, incompressibles.
Leur destination est la même : ruelles de la Basse-Casbah, ou encore la ville de Douéra, pour les endroits les plus connus d'Alger où on s'adonne, frénétiquement, au commerce informel de l'or. Il y a également cette artère de la rue Ben M'hidi Larbi, où des fiers-à-bras, comme à la criée, lancent, à la cantonade, leur fameux « cassé, cassé, cassé », pour appâter les chalands. Il y a aussi M'dina jdida, Trig Syagha, et tant d'autres espaces consacrés, à 100%, à ce commerce, aussi juteux que florissant. Une fois, me sentant presque interpellé par un de ces gus, qui me lança son fameux cassé ; cassé ; cassé, je me suis entendu lui rétorquer« la voix ??? » Bien évidement, il ne comprit pas le sens de ma vanne et partant, m'a conforté quant à son niveau musical qui s'est arrêté, certainement, au dernier tube de Cheb Redouane . En revanche, il m'épata par sa parfaite connaissance du marché de l'or cassé en m'apprenant, déjà, que la tendance est à la hausse des tarifs, notamment à l'achat. L'or est une valeur sûre et devant cette situation les gens achètent, à profusion, pour ceux, bien évidement, qui ont en les moyens ou ceux, qui sont tentés par le blanchiment de leur argent. Et, parmi ceux qui achètent l'or cassé, il y a les « collecteurs » qui revendent l'or, ainsi amassé aux bijoutiers-artisans. Ils prennent, généralement, une commission qui se situe entre 500 voire 1000 dinars par transaction, sauf s'ils ont à faire à un client naïf, au dépend duquel ils peuvent ramasser plus. Le tarif de l'or, à travers le territoire national, leur permet d'en prendre connaissance, en temps réel, ceci pour dire leur niveau de maîtrise du marché et des variations boursières qui en découlent. L'or cassé est actuellement côté à 6000 dinars le gramme. Il y a donc, disais-je, ceux qui achètent de l'or et ceux, qui, par besoin, vendent le leur. Avec un marché de l'or, dans tous ses états, les clients gagneraient à le connaître avant de s'y investir, d'une manière ou d'une autre. Et l'Agence Nationale de l'Or (AGENOR) vient, semble-t-il, se replacer dans ce circuit de récupération de l'or, en offrant à ses clients plus de sécurité dans leurs transactions, eux qui se faisaient arnaquer pas les prédateurs, voire même par certains bijoutiers indélicats. Elle propose également sa «discrétion » aux ménages tentés de s'adresser à elle, pour monnayer leurs bijoux ou leur or cassé, ce qui n'est pas sans intérêt pour les personnes tenant à leur discrétion, ce que n'offrent pas les collecteurs des artères de la rue Ben M'hidi à Alger, à Oran ou ailleurs. AGENOR, tente, bien sûr, de se mettre au niveau des prix pratiqués par ceux, qui racolent les passants, juste devant ses devantures à Alger. Par défi peut-être ! Pour ce faire, l'agence a revu ses prix d'achat et de vente de l'or à la hausse. Le gramme pour les ouvrages en or de 18 carats, poinçonné, est cédé à 6500 dinars alors qu'il était à 4500 dinars. Elle rachète également le gramme à 6000 dinars alors qu'à ses débuts, elle en offrait 1700 dinars. C'est dire le niveau des efforts consentis par cette agence, pour lutter contre ce type de marché informel, pratiqué au vu et au su de tout le monde d'Alger à Tamanrasset, en passant pat Tlemcen et Tébessa ! Oui, l'or gagnerait à être contrôlé tant dans ses filières de transaction, que dans sa traçabilité, car tout ce qui brille n'est pas or ! Beaucoup d'allégations circulent, d'ailleurs, concernant l'or contrefait ou encore l'or et les bijoux, produits de vols et de rapines, et qui atterrissent via les collecteurs et qui sont recyclés dans les échoppes des artisans, situés dans les Casbahs d'Alger et d'ailleurs. Les artisans-bijoutiers retravaillent cet or qui sera, certainement, transformé en boucles d'oreilles, chaînes et autres pendentifs vendus à des jeunes mariés peu regardant sur la qualité ou le carat réel du produit. Ces bijoux seront cédés nonobstant l'absence de poinçonnement obligatoire et là, il y a matière à se questionner sur les services de l'Etat qui sont, normalement, chargés de veiller au bon ordre de cette activité qui baigne dans l'informel et le flou total. C'est la seule façon que nous avons trouvée pour essayer de gagner notre pain, disent les bijoutiers-artisans, sinon, avec toutes les taxes que nous devons payer, conjuguées aux prix de l'or, nous ne pourrions jamais nous en sortir. Nous sommes obligés de recourir à l'or cassé pour faire tourner les ateliers. Et des pertes causées au trésor public, ils s'en tamponnent, j'ajouterais même, si cela pouvait faire rire, ils s'en « poinçonnent »! Concernant l'envolée des prix, ces bijoutiers l'expliquent par la rareté des produits essentiels au raffinage et au traitement du métal aurifère, ainsi que la cherté des équipements (un laminoir, par exemple, coûte plus d'un million de dinars). Le manque d'acide nitrique encourage la triche, puisque certains bijoutiers, sans scrupules, vendent des bijoux de 14 carats, au prix de ceux côtés 18 carats. L'autre élément qui concoure à augmenter le cours de l'or est contenu dans la T.V.A fixée à 12% pour les bijoutiers alors qu'elle n'est que de 6% pour les autres commerçants. Avec AGENOR, il y a aussi la BDL qui, quelque part, se situe sur l'itinéraire de l'or et essaie, un tant soit peu, d'en réguler le commerce. Spécialisée dans l'hypothèque, elle offre à ses clients, le moyen de gager leur or et leurs bijoux, pour pouvoir, éventuellement, surmonter une passe difficile : Aïd, ramadhan, rentrée des classes etc, ou une période financière de remboursement de dettes ou autre crédits, avec la possibilité de le récupérer, peut-être, un jour. Il faut rappeler que les bijoux gagés, pour qu'ils puissent être récupérés un jour, par leurs propriétaires ou leurs ayants droit, doivent faire l'objet, d'un paiement d'intérêt. Le prix offert par la BDL a aussi augmenté, puisque un gramme d'or, poinçonné celui là, a été relevé de 500 à 1000 dinars. Les plafonds de prêt ont été fixés à 1500 dinars comme minima et 250 000 dinars maxima, avec un taux d'intérêt de 8% par semestre. De ce qui précède, il apparait nettement que le marché de l'or est déstructuré. Tous les circuits sont gangrenés par une maffia, qui décide du cours. Les réseaux de contrebande se renforcent, de plus en plus, les bijoux, en toc, ou en plaqué or, vendus comme or algérien, inondent le marché ; leur provenance, l'Italie, Dubaï et la Chine entres autres. Méfions-nous, tout ce qui brille n'est pas or ! La contrefaçon fait des ravages à telle enseigne qu'on ne distingue plus l'authenticité du bijou ou du Louis Napoléon, d'autant plus que certains ateliers, notamment clandestins, utilisent des faux poinçons pour donner à leurs productions, un aspect légal et garanti. Les maîtres de l'informel de l'or ont, parait-il, réussi à détourner à leur profit une partie de la production aurifère, la « Gold Mining Algeria » . Cette dernière qui a réalisé une production record estimé à 3,447 onces a battu tous les records. Si l'on ajoute les gisements de Tirek et ceux d'Amesmessa, nous obtenons un niveau de 16,131 onces d'or, soit plus de 0,461 tonnes ce qui aurait en pour effet, pour le moins, de vendre ce produit disponible et le bijou, peu ou prou, adorable. Ce n'est pas le cas. Nous avons dit maffia locale, il y a aussi, une maffia internationale qui a prit les traits d'une intervention internationale, sous l'égide de l'ONU s'il vous plait, comme celle qui intervient au Sahel, sous prétexte de lutter contre le terrorisme, alors qu'en réalité ce qui est visé, c'est les gisements et les richesses aurifères notamment. C'est peut-être là l'explication à cette mobilisation internationale ! Beaucoup de pays comme le Libéria, le Congo, le Burundi, le Rwanda et tant d'autres ont connus des guerres « préfabriquées » et ont vécu des troubles à cause de leurs pierres précieuses convoitées par ces « puissances régionales « qui s'inventent des « droits d'ingérences » aux motifs inavoués. En Algérie, on parle d'aventuriers chercheurs d'or, quelques fois de découvertes réelles ou espérées de gisements prometteurs : il y a matière à s'inquiéter compte tenu de ce qui a été affirmé supra et des situations tendues à nos frontières. Quant au commerce informel, qui est aux mains des maffieux locaux, dont la partie visible de l'iceberg est représentée par les collecteurs, il y a à mon sens trois possibilités pour prendre en charge le problème : 1. laisser faire, et dire que les intervenants sur le marché de l'or sont identifiés, connus, comme ceux de la devise qui opèrent tranquillement. 2. réglementer, soumettre les collecteurs à un registre de police. 3. interdire ce commerce informel. Des trois hypothèses, celle qui comporterait le plus de risque, au plan social et nous en sommes à la rentrée du même nom, c'est sans conteste, la troisième. Et il me vient à l'esprit, cet extrait du livre « La martingale » écrit par Abderrahmane Hadj-Nacer et préfacé par Kamel Daoud, que je livre aux lecteurs, tel quel : « Un algérien qui a longuement fréquenté l'école ne parvient pas à remplir ses fonctions économiques, à acquérir de la valeur sociale et représenter un modèle au sein de sa famille. Avant lui son père, qui a fait la guerre de libération sans participer à la prédation qui a suivi l'indépendance, a aussi été disqualifié. Du coup, la troisième génération a tiré les leçons de ces expériences et n'accorde que peu d'intérêt aux questions de citoyenneté, de scolarité ou à l'économie formelle. C'est une génération dure, capable de brutalité et de violence, qui n'entend pas être bernée comme l'ont été celles qui l'ont précédé. Sa morale se résume aux célèbres formules de Tag à la men tag ou encore de sans pitié ». Et en l'occurrence, c'est de cette génération là, que sont issus les fier-à-bras, les collecteurs, que j'ai évoqués en début d'article, qui s'adonnent à ce métier. Ils vendent du « cassé », eux-mêmes ont été « cassés » par la vie qui ne les a pas ménagés : études interrompues, chômage au long cours, pas de ressources, et des casiers judiciaires pour un certain nombre d'entre eux. Beaucoup ne comprendraient pas qu'on veuille « leur enlever le pain de leur bouche ». Quel dilemme pour les pouvoirs publics : Intervenir, laisser faire, quels soucis pour le ministère de l'intérieur et le ministère du commerce qui ont engagé leur « joker » dans le dossier d'éradication du commerce informel , que je comparais au mythe de Sisyphe(**) ? Or sans autorité, nous basculons dans la déraison et comme l'a si bien dit Abderrahmane Hadj-Nacer, ce que les Algériens réclament, ce n'est pas l'anarchie ou la démission de l'Etat, c'est justement le contraire, que ce dernier joue son rôle et qu'il fixe des règles qui soient respectées par tous ! Notes de lecture : *Par Yves Montand à Louis de Funès in La folie des grandeurs **Voir mon article intitulé : « l'éradication du marché de informel ou le mythe de Sisyphe « El Watan du mardi 29 janvier 2013 ». |
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