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28ème vendredi de manifestations: La mobilisation en hausse

par Yazid Alilat

Les milliers de manifestants sortis, hier, à travers les grandes villes du pays, maintiennent les revendications populaires de base: le pouvoir au peuple, libération des détenus du ?Hirak', pas d'élections présidentielles, pas de dialogue sans mesures d'apaisement et changement radical de régime. A Alger, les milliers de manifestants qui se sont rassemblés, bien avant la demi-journée, aux abords de la Grande Poste, ont entamé la longue marche à partir de la rue Didouche Mourd pour converger, avec d'autres manifestants venus des autres quartiers de la capitale, vers la Place Audin puis la Grande Poste. Les forces de police, déployées massivement, en grand nombre, ont empêché les manifestants d'atteindre la Grande Poste à partir de la Place Audin, et des interpellations de manifestants ont même été opérées.

Pour ce 28ème vendredi de manifestations populaires contre le régime en place, il y avait une forte présence de policiers, un signe que le régime tolère de moins en moins le ?Hirak' populaire et ses revendications, en particulier le refus des élections et le rejet du dialogue politique, version Panel, de Karim Younes. Hier, c'était en fait, le dernier vendredi de l'été, qui annonce le retour en force de la protestation populaire pour le changement radical du système.

A Alger, les manifestants scandaient notamment «Intikhabate à la poubelle» au milieu d'un important cordon de sécurité. A Béjaia, Tizi Ouzou, Constantine, Annaba, Chlef, Bordj Bou Arreridj ou Bouira et El Tarf, les manifestants étaient en grand nombre et au rendez vous de ce 28ème vendredi de protestation populaire. Selon des témoignages, la participation aux manifestations, hier, était plus forte que les vendredis précédents, notamment à Alger où des manifestants scandaient «Libérez les détenus, ils n'ont pas vendu de cocaïne», alors que dans presque toutes les villes du pays, les manifestants réclamaient la libération des détenus d'opinion, notamment le Moudjahid Lakhdar Bouregaa et les militants du ?Hirak'. A Chlef et Ténes, des manifestants ont dit «non au dialogue» que veut mettre en place le régime, alors qu'à Tizi Ouzou, des milliers de manifestants ont marché dans le centre-ville et réclamé la libération de Lakhdar Bouregaa et revendiqué «un Etat civil». «Durant la moitié d'une année, nous avons réalisé ce que nous n'avons pas fait en 57 ans», lance cette pancarte brandie par un manifestant à Constantine, tandis qu'à Oran des milliers de manifestants ont sillonné le centre-ville, en réitérant les mêmes slogans que les autres cités du pays: «yetnahaw gaâ», «Pas de dialogue», «Pas d'élection présidentielle».

Il y a lieu de relever qu'à Oran, Bejaia, Tizi Ouzou, Constantine, Bouira, Annaba et Alger, les manifestations étaient impressionnantes, un signe que le «Hirak» va revenir en force pour les prochains vendredis. Contrairement aux autres vendredis d'un été particulièrement chaud, ils étaient des milliers à manifester, hier, à Oran.

«Pour une Algérie libre et démocratique», «Non au dialogue et aux élections sans transition démocratique», «Pour un État civil et démocratique», sont les slogans les plus scandés, en ce 28ème vendredi consécutif. La procession humaine s'est ébranlée de la place du 1er Novembre 1954 (ex-Place d'Armes), en empruntant le boulevard Émir Abdelkader puis l'avenue Larbi Ben M'hidi, pour se diriger vers le siège de la wilaya. Des banderoles, des pancartes et drapeaux amazigh et palestinien ont été brandis à côté de l'emblème national. Même ambiance à Mostaganem où des milliers de manifestants ont défilé, dans la rue pour scander des slogans hostiles au dialogue avec «les résidus du système» et «l'organisation d'élections dans les conditions politiques actuelles». Par ailleurs, ce 28ème vendredi de manifestations populaires intervient à un moment particulier de la vie politique du pays: le pouvoir et l'armée insistent pour la tenue d'élections présidentielles comme sortie de crise. Mais, l'opposition et la société civile veulent d'abord une période transitoire au cours de laquelle seront préparées sereinement ces élections, accusant le pouvoir de vouloir se maintenir en place en voulant contrôler ces élections à travers «son» candidat. D'autant que les mesures d'apaisement, dont la libération des détenus du ?Hirak' et le départ du gouvernement Bedoui, comme préalables demandés pour l'amorce du dialogue dévolue au panel de Karim Younes, ont été rejetées par l'armée.