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Les six sous le soupçon d'avoir péché par naïveté

par Kharroubi Habib

Karim Younes et les cinq autres personnalités sur lesquels Abdelkader Bensalah a jeté son dévolu pour constituer le panel devant mener le dialogue « inclusif » auquel il a appelé ont rendu public un communiqué dans lequel ils ont précisé qu'ils ne prétendent pas représenter le mouvement populaire et parler en son nom et énoncé les mesures d'apaisement que le pouvoir doit prendre avant d'entamer leur mission. Ces deux mises au point faites, les six n'ont pas pour autant été épargnés par la vindicte populaire qui s'est exprimée à leur encontre dans certaines marches de vendredi à travers des slogans scandés fustigeant leur acceptation d'être dans le panel. Ce qui ne semble pas leur être une motivation pour revenir sur leur décision d'entreprendre les contacts préliminaires en vue de tenter d'enclencher la dynamique propice à la tenue d'un dialogue national. Pour espérer parvenir à convaincre les parties qu'ils vont contacter, les six n'ont de gage à leur offrir que la « disponibilité » du pouvoir que leur a fait miroiter Bensalah, lors de l'audience qu'il leur a accordée, à prendre les mesures d'apaisement dont toutes en font un préalable conditionnant leur éventuelle participation au dialogue. Le pouvoir aurait pu donner du crédit à sa « disponibilité » en faisant suivre sans attendre l'intronisation des six personnalités en tant que panel conducteur de dialogue de gestes faisant foi de la sincérité de ses intentions.

A la veille du 23ème vendredi de mobilisation populaire dont le déroulement allait indubitablement lui servir d'indicateur de la perception de sa démarche et du choix des personnalités qu'il a investies pour sa concrétisation, le pouvoir a procédé au limogeage du commandant en chef de la Gendarmerie nationale décrié à tort ou à raison comme ayant été l'inspirateur de la méthode répressive employée à l'encontre du mouvement populaire. Ce qui aurait pu signifier que le changement opéré était prélude à la prise de mesures remédiant aux conséquences que cette méthode a générées. Il n'en a rien été puisque les détenus pour délits d'opinion croupissent encore en prison et que les marcheurs à Alger ont eu à constater que le service d'ordre a reproduit ce vendredi les mêmes pratiques visant à réduire l'ampleur de leur manifestation.

Dans ces conditions, la tâche dévolue au panel déjà contestée dans le principe par certains ne démarre pas sous des auspices encourageants. Les personnalités ayant accepté de s'en charger partent en effet avec le soupçon d'avoir péché pour le moins par naïveté en prenant pour argent comptant ce que Bensalah leur a « vendu » sur la disponibilité du pouvoir à satisfaire les revendications populaires. Même les plus disposés à l'égard de leur démarche leur exigeront avant tout acquiescement franc des gages du pouvoir ne se réduisant pas à la vague promesse de mesures d'apaisement à venir.