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La
présidence de la République a rendu publique, jeudi, la liste du panel chargé de
diriger «le dialogue national inclusif» voulu par le pouvoir. Avant même
d'entamer leur travail, les six personnalités nationales ont posé de nombreux
préalables.
«Le chef de l'Etat, M. Abdelkader Bensalah a reçu ce jour, Karim Younès accompagné de Fatiha Benabbou, Samaïl Lalmas, Bouzid Lazhari, Abdelwahab Bendjelloul et de Benaïssa Azzedine », a rapporté jeudi dernier un communiqué de la présidence de la République. Ce sont les noms des personnalités nationales constituant le panel appelé à mener «un dialogue national inclusif » auquel Abdelakader Bensalah appelle depuis quelques mois conformément à une demande clé du chef de l'état-major de l'ANP et vice-ministre de la Défense, le général de corps d'armée Ahmed Gaïd Salah. « Personnalités nationales » que le chef de l'Etat présente comme étant «crédibles, compétentes, sans attache partisane et sans ambition électorale. » Pour rappel, c'est le forum de la société civile qui a proposé le mercredi 17 juillet à la présidence de la République, une liste de 13 personnes qui à son sens, ont les qualités requises pour conduire un dialogue national. L'on s'interroge de prime abord quels ont été les critères qui ont permis à la présidence de la République de choisir six personnes des 13 proposées par un forum constitué essentiellement de plus de 70 associations connues depuis toujours pour être des « satellites du FLN, du RND ou du pouvoir en général ». Autre rappel important, ce groupement d'associations était présent le 6 juillet dernier au CIC au « forum national du dialogue » que compose les représentants de plusieurs partis politiques issus du courant «nationaliste, conservateurs et islamiste », d'autres de diverses catégories socioprofessionnelles et que coordonne l'ancien ministre et ambassadeur Abdelaziz Rahabi. Il est clair que cette rencontre n'a pas servi à grand-chose puisque le Forum de la société civile a signé seul la proposition de la liste des 13 personnes. Bensalah doit aller vite Un des communiqués de la présidence de jeudi dernier souligne sans grande précision sur les critères qui ont prévalu au choix des «6» parmi d'autres, par les acteurs de la société civile, les personnalités reçues par le chef de l'Etat, perçues comme disposant des qualités de crédibilité et d'acceptabilité, les rendant éligibles à faire partie du panel, ont accepté de s'impliquer dans l'accomplissement de cette noble mission de facilitation du dialogue ». Tout porte à croire que le chef de l'Etat ?certainement sur instruction du général de corps d'armée- doit aller vite pour avancer et organiser des élections présidentielles « dans les plus brefs délais ». L'objectif principal étant d'ériger des remparts tout autour de l'institution militaire pour l'élever au dessus de tout le reste (le monde politique) et la préserver des traquenards et des machinations de clans voulant la pousser à la faute en la précipitant dans le «hors cadre constitutionnel.» Si le statuquo politique persiste, divers milieux pensent au pire, «celui qui obligerait l'armée à décréter l'état d'exception» comme craint par de hauts responsables. «Le chef de l'Etat invite toutes les parties concernées à participer au dialogue, à taire les divergences secondaires et à contribuer activement à dépasser la situation actuelle. Il considère que le temps est précieux et que de grands défis attendent notre pays. Des dangers le guettent aussi (?)», écrit la présidence de la République. Pour éviter ce qui est craint, elle rappelle alors que «l'objectif central du dialogue est de contribuer à réunir les conditions nécessaires à l'organisation du prochain scrutin présidentiel dans une transparence totale et une régularité sans failles. Le dialogue portera sur tous les aspects liés à l'organisation de ce scrutin, ses étapes préparatoires, les conditions qui lui sont nécessaires, le déroulement du calendrier électoral et la date de l'élection présidentielle. » Elle insiste pour que « le dialogue (soit) inclusif, qu'il réunisse l'ensemble de la classe politique, les acteurs les plus représentatifs de la société civile, des personnalités nationales ainsi que des représentants du mouvement populaire, s'ils le souhaitent. » Sa précision de taille qu'elle réitère à maintes reprises : «afin d'éviter toute fausse interprétation et de dissiper tout malentendu, que l'Etat dans toute sa composante, y compris militaire, ne sera pas partie prenante à ce dialogue et observera la stricte neutralité tout au long du déroulement de ce processus». Les «6 des 13», un pas «positif» Clarifiant davantage les propos que son secrétaire général, Nouredine Ayadi, a signé mercredi dernier dans plusieurs médias, l'institution a encore souligné que «le panel aura toute la liberté pour organiser les modalités du dialogue, son déroulement, sa durée et le contenu de son ordre du jour, il pourra arrêter, en concertation avec les participants au dialogue, les mesures d'ordre législatif, réglementaire et organisationnel nécessaires à l'élection présidentielle, aura toute la latitude pour l'élaboration des résultats et recommandations finales sur les questions ayant fait l'objet d'un consensus, à condition qu'elles s'inscrivent dans le cadre de l'objet du dialogue.» Les institutions de l'Etat s'engagent à les traduire en textes législatifs et réglementaires, est-il noté. Autre garantie, «le panel pourra proposer toutes mesures qu'il considère de nature à favoriser l'apaisement et le rétablissement de la confiance». Tout de suite après qu'elles aient été choisies, les 6 membres du panel ont vite fait de poser des préalables au chef de l'Etat, du moins ceux par lesquels plusieurs partis politiques conditionnent leur adhésion à l'idée d'un dialogue national. «. Dans sa toute première déclaration lue par son porte-parole Karim Younes à l'issue de l'audience que Bensalah lui a accordée jeudi dernier, le panel a souligné « l'impératif pour l'Etat de prendre des mesures d'apaisement à même de créer un climat devant conduire nécessairement à un dialogue sincère qui exprime les vœux et les revendications populaires et qui mènerai à l'organisation d'une élection présidentielle transparente, régulière et libre dans les plus brefs délais », entre autres, «la libération de tous les détenus du hirak», la levée de toutes les formes de pression sur les médias, et la garantie de toutes les conditions et les facilitations à même de permettre aux citoyens d'exercer leurs droits constitutionnels dans les manifestations et les rassemblements pacifiques». Karim Younes a aussi fait savoir que plusieurs questions relatives aux revendications populaires dont celles liées au gouvernement ont été évoquées lors de cette audience. L'exigence d'un «départ immédiat du gouvernement Bedoui » n'est pas vue en tant que telle en haut lieu parce qu' «au regard des garanties promises par l'institution militaire et présidentielle, ni le 1er ministre, ni le gouvernement dans son ensemble ou même certains de ses ministres, ne pourront s'immiscer dans le processus du dialogue ou de la tenue des élections présidentielles, exceptée de fournir les moyens logistiques et techniques au panel et à tous ceux qui seront choisis d'une manière consensuelle pour réussir les deux rendez-vous, alors en quoi dérangerait Bedoui ou ses ministres ?!? », interrogent de hauts responsables. La présidence a bien souligné dans son communiqué du jeudi dernier que «le panel entamera immédiatement sa mission, avec le soutien technique et logistique de l'Etat qui mettra à sa dispositions tous les moyens qui lui sont nécessaires pour mener à bien le processus de dialogue. » Du côté de cette institution, on avait aussi appris que le panel, une fois qu'il ait entamé le dialogue, pourra demander à voir les dossiers de ceux qui sont qualifiés « de détenus d'opinion. » Ces tergiversations qui n'ont rien de fortuit Bensalah a d'ailleurs tout de suite fait état de « sa disponibilité à œuvrer pour inviter la justice à examiner la possibilité d'élargissement des personnes dont l'interpellation s'est faite en lien avec le déroulement des marches populaires ». Il s'agit bien sûr, des manifestants qui brandissaient le drapeau kabyle que Gaïd Salah a interdit par discours répétitifs au nom de «la préservation de l'unité du peuple et de la nation toute entière et du respect des symboles de l'identité nationale (dont l'emblème national) dûment consacrés par la Constitution. » Le chef de l'Etat a en outre promis d'«envisager l'allègement du dispositif mis en place par les services de sécurité, pour garantir la liberté de circulation dès lors que cet allègement ne porte pas préjudice à l'impératif de préserver l'ordre public, et la protection des personnes et des biens lors des marches populaires. » Et aussi «à faire prendre les mesures de nature à faciliter l'accès aux médias publics à toutes les opinions, à travers l'organisation de débats contradictoires et ouverts à toutes les expressions politiques, sans exclusive ». Karim Younes a ajouté que «les membres du panel ont également évoqué d'autres préoccupations soulevées au niveau de la scène politique, lesquelles ont recueilli l'intérêt du chef de l'Etat qui s'est engagé à les prendre en charge conformément aux dispositions de la Constitution et aux lois de la République». Après avoir évoqué toutes les revendications brandies par le mouvement populaire, les personnalités reçues par Bensalah ont noté « qu'elles n'étaient pas représentantes du Hirak populaire, ni ses porte-parole, affirmant avoir accepté cette mission «en toute liberté ». Au-delà de ces tergiversations qui n'ont rien de fortuit, le panel est quand même un pas compté «positif» par des observateurs qui soutiennent fortement l'idée de la tenue d'élections présidentielles « dans les plus brefs délais » et ce pour ne pas que « le pays s'enlise davantage dans la crise ». Ces derniers ne s'empêchent pas cependant de souligner «l'impérieuse nécessité de rester vigilant » parce que « le risque de voir une oligarchie remplacée une autre et d'ancien clans ressurgir pour accaparer le(s) pouvoir(s) n'a absolument rien d'une simple vue de l'esprit ». |
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