Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

16e vendredi de la protestation: «Le Hirak continue... jusqu'au départ des gangs»

par M. Mehdi Et A. Z.

  «Chkoun sbabna ?

Chkoun sbabna ?

Dawla hiya li sbabna, we sbab 3dabna» (Qui est à l'origine de notre malheur ? C'est l'Etat qui est la source de notre souffrance). Après une absence remarquée durant le Ramadan, les supporters des clubs de football, ceux de l'USMA et du MCA en particulier, ont repris les marches du vendredi, apportant leur indéniable animation à ce mouvement. Le Hirak ne faibli pas. Les marcheurs étaient au rendez-vous hier pour le 16e vendredi consécutif depuis celui du 22 février 2019.

A 12h30 seules quelques dizaines de personnes, portant drapeaux, parfois chantant des slogans, étaient présents à la place 1er Mai, à Alger. Une heure et demie plus tard, c'est une marée humaine qui y déferle en provenance de Belouizdad, des Ateliers (Hassiba Ben Bouali) et de l'avenue Ali Mellah, ainsi que des hauteurs de la Cité Mahieddine et El Madania. A 14h30, ils sont déjà plusieurs milliers à place 1er Mai et dans les ruelles et rues voisines. En attendant l'arrivée des marcheurs en provenance de Ruisseau, Hussein Dey, Mohammedia (ex-Cinq Maisons) et El Harrach.

La marche démarre, direction Boulevard Amirouche, sur « Makache intikhabat m3a el 3issabat » (Pas d'élections en présence des gangs). Une réponse claire au discours de Abdelkader Bensalah, chef de l'Etat, prononcé la veille à 20h, dont le départ (Yetnahaw ga3) est aussi réclamé, tout autant que celui du chef du gouvernement, Noureddine Bedoui. Comme les précédents vendredis, Gaïd Salah, le chef d'état-major, n'a pas été épargné par les slogans. Il est accusé de « protéger la 3issaba ».

La composante humaine des marcheurs n'a pas changé. Femmes, enfants, jeunes et des personnes âgées aux pas hésitants mais à l'intacte volonté de ne pas rater ces moments historiques pour revendiquer la souveraineté du peuple.

C'est à la place du Pérou que l'on croise les marcheurs venus d'El Harrach, via Tafourah. À la Grande Poste et ses environs, ils sont également plusieurs milliers à manifester, en attendant les marcheurs en provenance de Bab El Oued et de la Casbah.

En ce 16e vendredi, c'est aussi le retour de l'attraction N°1. Tristement vides pendant le Ramadan, les escaliers menant vers le lycée Pasteur étaient réoccupés par les supporters des clubs algérois. Hier, les chants indiquaient que les supporters du MCA étaient en force dans cet espace devenu un passage obligé pour des centaines de manifestants qui viennent immortaliser des récitals de chants des stades.

Résumé du 16e vendredi : la mobilisation ne faiblit pas. Les Algériens revendiquent de reprendre en main leur destinée. Ils n'entendent pas abandonner ce qui a été entamé le 22 février dernier et qu'il leur sert comme bouffée d'oxygène, après plus de 25 ans d'étouffement, avant d'arriver à leur objectif.

A Constantine, les manifestants ont envahi les rues du centre-ville de pour dire non au système et à ses propositions. Par milliers, donc, les citoyens ont rejeté les dernières propositions du chef de l'Etat, notamment l'organisation d'une élection présidentielle avec les mêmes symboles du système à la tête de l'Etat. « On ne se taira pas, on ne se fatiguera pas, jusqu'au départ du système », « non au dialogue, non aux élections avec el issabat (les bandes) », « notre rêve est de construire un pays sans vous », tels sont les écrits qu'on pouvait lire sur les banderoles portées par les manifestants. Des manifestants qui criaient également des slogans hostiles au pouvoir et à Gaïd Salah. « Révolution populaire jusqu'à la chute des traîtres », ainsi que « Gaïd Salah dégage », un slogan scandé ce 16e vendredi avec force par de nombreux manifestants, contrairement aux vendredis passés où on pouvait l'entendre, certes, mais de façon un peu timide. Egalement, les manifestants ont scandé d'autres slogans réguliers au Hirak, dont « Algérie libre et démocratique », « état civil et non militaire », ainsi que d'autres chants patriotiques qui ont animé la scène recouverte de l'emblème national, porté sur les épaules et soulevé haut sur de longues tiges.

A Oran et dans les autres wilayas du pays aussi, les manifestants étaient nombreux à sillonner les rues du centre-ville avec la même détermination des vendredis passés. Pas d'élection présidentielle avec les gangs, était le slogan phare de ce 16e vendredi de la contestation.