Si le
discours de Gaïd Salah à partir de Ouargla avait
donné quelques garanties sur le rôle de l'armée, celui de Blida mardi dernier a
refroidi les ardeurs, si d'aventure elles existaient encore. Pour nombre
d'observateurs, citoyens et partis de l'opposition, l'intervention du chef de
l'état-major de l'ANP, depuis la 1ère Région militaire, a définitivement levé
le voile sur l'intention de l'armée de s'aligner inexorablement derrière
l'option constitutionnaliste allant à l'encontre des exigences de la rue. Le
vice-ministre est même soupçonné, voire accusé, de vouloir faire passer en
force des présidentielles sous la coupe de Bensalah,
préparées par le gouvernement Bedoui. Auquel cas, il
se met dans une position inconfortable vis-à-vis du mouvement populaire qui
refuse une quelconque sortie de crise constitutionnelle en présence des 3 B
restants. Si cette position de Gaïd se confirme avec
le temps, il est fort à parier que les prochains vendredis on assiste à des
slogans hostiles au général de corps d'armée. Une défiance qui s'est déjà
exprimée le jour même de son intervention où il a critiqué ceux qui entravent
le travail des ministres sur le terrain, s'en prenant ouvertement à
l'opposition qui a boycotté la conférence nationale de dialogue et de concertation
organisée par le chef de l'Etat par intérim. Cette attaque frontale contre les anti-système et ceux qui ne
cautionnent pas l'application exclusive de l'article 102, est perçue par les
détracteurs de Gaïd comme un retour des pratiques qui
n'acceptent pas les avis divergents. Le ton même du message ne laisse aucun
doute sur la nature de la feuille de route proposée par l'armée et son
intention de l'appliquer à tout prix. Aussi, les poursuites judiciaires
engagées contre certains hommes d'affaires sont fortement remises en question,
les apparentant à des règlements de compte claniques. Pourtant, l'identité de
ces justiciables, et la liste est en train de s'allonger, suggère à priori que
la justice, même si elle est loin d'être indépendante, ratisse large avec les
prochaines convocations de l'ancien ministre de l'Energie Chakib Khelil et de Tahkout Mahieddine, l'un des symboles de l'oligarchie à quatre
roues, en attendant les noms demandés par les Algériens. Ce chassé-croisé entre
une justice qui s'accélère et les messages à caractère politique de Gaïd Salah laisse le peuple au milieu du gué, le plongeant
dans une perplexité qui n'est certainement pas la bienvenue et qui laisse la
porte ouverte à toutes les tentatives de récupération et de déstabilisation du hirak.