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Mesures et contre-mesures

par Moncef Wafi

Pour le neuvième vendredi d'affilée les Algériens sont descendus dans la rue pour faire entendre leurs voix. Une réponse unifiée, comme sortie d'une seule gorge pour dire non aux manœuvres du centre décisionnel qui multiplie les propositions pour gagner du temps et imposer le fait accompli.

La dernière carte en date, abattue par les sponsors de Bensalah, est cette réunion consultative devant se tenir le 22 avril prochain, rejetée unanimement. Une invitation adressée à une centaine de profils dits «personnalités nationales», mais qui ne représentent au fond qu'eux-mêmes. Il est attendu que la majorité des figures populaires refusent de se rendre à ce rendez-vous mais il est fort à parier que des seconds couteaux, des opportunistes de la politique et des personnages parasitaires du hirak seront bien là pour donner du crédit à un président qu'on ne nomme même plus intérimaire dans les médias publics et assimilés.

Si le constat est établi, quelle lecture peut-on faire de ce nouveau pas en avant dans la confrontation ? Il ne faut pas perdre de vue que l'Algérie est rythmée, hebdomadairement, par trois pôles décisionnels, chacun à un niveau d'influence. Les vendredis et mardis sont incontestablement la propriété du mouvement populaire qui s'est réapproprié l'espace public, redoublant d'ingéniosité pour faire avancer démocratiquement le hirak. Les mardis aussi ont été la tribune favorite de l'état-major pour faire le point sur la situation et adresser des messages tantôt codés, d'autres fois plus explicites à qui de droit.

Entre les deux et le reste de la semaine, on assiste à une contre-offensive révolutionnaire qui se matérialise dans la répression des manifestations, dans les arrestations des militants et syndicalistes, une guerre électronique sans commune mesure et dans la volonté de casser le hirak à travers les intimidations et les exactions dont on ne connaît forcément ni l'origine ni les commanditaires. Cette aile est manifestement prêtée, si on se réfère à la dernière intervention de Gaïd Salah, à la coalition du clan présidentiel avec les anciens des services de renseignements et c'est cette faction, probablement encore au pouvoir, qui tire les ficelles et cherche à brouiller les cartes.

Alors que la logique s'attendait à une autre démission des B après celle de Belaïz du Conseil constitutionnel, on a assisté, quelques heures plus tard, à des fake news annonçant tour à tour les démissions de Bouchareb du FLN et de Sidi Saïd de l'UGTA. Et cet appel de Bensalah, à la réunion du 22 avril, fait indubitablement partie de cette stratégie du pourrissement et du fait accompli dénoncée par le vice-ministre de la Défense et catégoriquement refusée par la rue.