|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Beaucoup
d'appréhensions politiques et sécuritaires après la prise de fonction mardi du
chef de l'Etat par intérim, M. Abdelkader Bensalah.
Au moment où les deux chambres réunies du Parlement constataient officiellement
la vacance du poste de président de la République, et appliquaient dans la
foulée l'article 102 de la Constitution, en son alinéa 4, faisant de Bensalah nouveau chef de l'Etat pour une période de 90
jours, la police réprimait une manifestation d'étudiants à Alger. Gaz
lacrymogène, interpellations ont notamment émaillé ces manifestations
estudiantines qui avaient dénoncé le coup de force constitutionnel contre la
volonté populaire d'un changement global du système de gouvernance dans le
pays. Ainsi que le départ de tous les responsables liés directement ou
indirectement à l'ère Bouteflika, dont Bensalah, Tayeb Belaïz et Nouredine Bedoui.
Or, dans les faits, seul Abdelaziz Bouteflika est parti, le système et les hommes qu'il a mis en place sont restés, ce qui est un véritable camouflet autant à ceux qui ont mené le mouvement populaire du 22 février depuis le début, qu'à la classe politique et la société civile, qui ont tant espéré un changement radical dans le pays. D'autant que le tour de vis sécuritaire est, semble-t-il, de retour avec cette volonté du Premier ministre de durcir le dispositif policier encadrant les manifestations, notamment la levée progressive de la neutralité des policiers dans la gestion des manifestations. Déprimant retour à la réalité pour des millions d'Algériens qui espéraient un changement de méthode et des hommes pour la gestion de la période transitoire devant mener à des élections présidentielles propres et honnêtes. Pour le grand drame des millions de manifestants, ce seront au contraire les hommes du système politique et économique au centre de toutes les critiques citoyennes, depuis le début du mouvement populaire, qui vont gérer la période transitoire de 90 jours. Un état de fait que va confirmer le chef d'état-major Gaïd Salah, qui appelle dans un nouveau message les Algériens à la patience, «à faire preuve de conscience et de lucidité» face à la tentation de pérenniser les manifestations populaires au risque de paralyser l'économie du pays. Les appels à la raison du chef d'état-major, qui rappelle que l'ANP sera aux côtés du peuple dans cette phase transitoire, jusqu'à la tenue des élections présidentielles à la fin de la période d'intérim de Bensalah, seront-ils écoutés ? Une chose est sûre pour le moment : toutes les victoires psychologiques et les concessions politiques arrachées de haute lutte par le peuple ont été gommées d'un seul coup dès lors que les parlementaires ont désigné Bensalah nouveau chef de l'Etat. En dépit des assurances et du message «bienveillant» de Gaïd Salah, qui conseille à tous les acteurs politiques et aux Algériens de respecter la Constitution et d'être patients, il y a quand même comme une provocation des parties proches du système de saluer la désignation de Bensalah. D'autant que le message du chef d'état-major est limpide : il n'y a aucun scénario ou plan «B» pour contourner la légalité constitutionnelle, et le chef de l'Etat désigné par les parlementaires, après la vacance du poste laissée après la démission de Bouteflika, va assurer sa mission et ses charges jusqu'au bout des 90 jours de son intérim. Gaïd Salah en soutien à Bensalah ou plutôt soucieux de mener à bon port une période transitoire qui s'annonce difficile ? Les deux, peut-être à la fois. |
|