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ce mardi 02 avril 2019, une page d'histoire de l'Algérie est tournée. Un
sérieux verrou du régime vient de sauter. Il permet de dénouer tous les fils
enchevêtrés de la forte trame d'une très solide et bien ancienne stratégie qui
rendait le pouvoir algérien si puissant. Il met fin aux vieux jours d'un
président grabataire.
Le symbole d'un mythe du système, entretenu depuis déjà de très longues années, venait de tomber en désuétude, de s'écrouler à jamais, mettant à nu le stratagème autour duquel s'articulait vaillamment toute la savante stratégie du pouvoir, depuis Houari Boumediene jusqu'à Abdelaziz Bouteflika. L'homme, fasciné jusqu'à la moelle épinière par un pouvoir absolu, était rusé comme un vieux singe pour tromper, le verbe aidant, son interlocuteur du moment, et pour facilement se défaire de ses nombreux adversaires. Il était (re)venu au pouvoir au printemps de la toute dernière année du siècle écoulé, non pas pour sauver le pays d'une peu reluisante situation qui tirait déjà à sa fin, comme il s'efforçait à chaque fois de le rappeler à son monde, mais surtout pour prendre une retentissante revanche sur l'Histoire et faire revenir le peuple Algériens à ces temps très anciens qui se moquaient royalement de tous les bienfaits de la démocratie. Ce fut, il y a déjà vingt ans, à la faveur de la recommandation susurrée à l'oreille sensible par des acteurs intéressés à cette boite noire du régime commandé par ces « janviéristes » qui voyaient en lui cet oiseau rare, capable à lui seul, micro à la main, de faire tourner le monde à son profit, et avec la tête à l'occident jusqu'à lui « vendre » une tout autre image de l'Algérie de la décennie noire. Après l'échec cuisant de 1994, ils étaient encore revenus à la charge, en 1998, en poussant son prédécesseur de manière osée, forcée et anticipée vers la porte de sortie, afin d'en faire usage de gouvernance de façade du pays ; chose qui leur permettra après de battre en retraite dans l'antichambre du pouvoir de l'ombre. Depuis lors, il ne fut donc habité que par une seule idée, à au plus vite concrétiser sur le terrain de vérité : prendre sa revanche sur un système qui l'a imploré pour venir à son secours en 1999, tout en tenant court la bride à un peuple qui ne s'est guère manifesté en sa faveur afin de succéder à feu Houari Boumediene, son mentor. À la mi-avril de l'année en question, le puzzle du scénario esquissé était déjà composé et mis sur le champ en phase d'expérimentation, en dépit de tous les impondérables surgis comme du néant, qui tenaient à décrédibiliser son élection « savamment orchestrée » par une administration aux ordres et toute si grande meute de sous-traitants et de courtisans du régime depuis longtemps en place. Deux décennies plus tard, il était encore là, à quémander un autre ou énième mandat. Car jamais rassasié d'avoir si longtemps occupé le pupitre, jouant à pérenniser un régime dont il n'a pas manqué au passage de lui greffer son empreinte indélébile, comme symbole du sceau de son passage à la tête de l'Etat Algérien. Et tout était mis en branle pour faire dans cette « continuité du régime », à l'approche de ce « cinquième voyage ». Sauf qu'à cette étape-là, personne ne s'est vraiment soucié de l'état de la locomotive à laquelle incombe cette très lourde charge de tracter ces nombreux wagons de voyageurs éternels, se promenant aux frais du contribuable et peu soucieux de leur monde ou de la morale citoyenne, par inadvertance provoquée. Nul ne fut alors conscient de cette fin « pathétique » d'un poulain qui était loin de pouvoir se battre sur le terrain du combat pour gagner haut la main toutes ces difficiles courses ou nombreux trophées mis en jeu. Un impondérable de taille s'est dressé sur leur chemin, faisant capoter leur projet longtemps concocté, en dépit de son impossible faisabilité ! La rue s'en est interposée ! Elle battait le pavé et criait d'une seule voix, comme un seul homme, son ras-le-bol généralisé de voir ce locataire du grand palais malade et fort diminué, se représenter encore à la magistrature suprême du pays. Avec lui, ce fut ce départ vivement souhaité ou tant attendu du tout dernier rempart d'un système vomi et honni par tout un peuple qui a fini par demander sa tête, après avoir été très patient mais aussi très longtemps résisté à sa folie de gouvernance qui a déjà exposé le pays à tous les possibles ou imaginables dangers. Jamais dans l'histoire de l'Algérie indépendante, le peuple Algérien ne s'est soulevé comme un seul homme pour dénoncer de vive voix ce régime et aussi l'homme qui l'incarnait en solitaire, du reste, depuis déjà deux longues et insupportables décennies. Pareille forte dénonciation sous-tendue par une démonstration en force, synonyme d'un rejet en bloc de toute une population provoquée dans son amour-propre, longtemps marginalisée, exclue ou tenue à l'écart de la chose publique, ne pouvait être imaginée ni même envisagée par les tenants du pouvoir, pour cause d'une totale méconnaissance d'un peuple qui savait attendre son heure sans jamais désespérer. Le peuple Algérien en avait gros sur le cœur. Il ne cherchait finalement qu'après une occasion propice pour passer à l'offensive et engager de suite une rupture définitive avec l'ordre établi dont il aura souffert des décennies durant. La cause ? Il ne pouvait éternellement contenir sa colère qui le rongeait de l'intérieur et grondait comme un tonnerre dans sa cage thoracique à mesure que son humiliation montait crescendo ou s'étirait dans le temps. Adepte des très longs voyages et des discours flatteurs des grands aréopages, il aura après sa maladie été privé et des uns et des autres. La raison ? Il aura perdu à la fois l'usage du verbe séducteur et celui indispensable de ses pieds. Depuis lors, il ne s'est jamais dressé dans sa position debout. Sauf par un grand miracle dans le cas d'un salut au garde-à-vous accordé à une très grande personnalité de l'occident. Comme pour berner avec tout son monde quant à son imminent rétablissement. Déjà à son très jeune âge, il nourrissait ce rêve un peu fou ou trop osé de s'emparer pour de bon du fauteuil Présidentiel. Il le fut davantage à l'ombre de son pourtant très rusé parrain, au lendemain de l'indépendance de l'Algérie. Avec le temps, et les circonstances aidant, cette ambition devint dès lors une obsession maladive. Celle-ci finit par s'imposer en lui telle une certitude que nulle barrière au monde ne pouvait s'y opposer ou s'en interposer. Dans son subconscient, sinon en son for intérieur, il a toujours résidé dans l'antichambre du vrai pouvoir de l'ombre, attendant impatiemment que l'occupant du trône soit « dégagé », à défaut de le faire diplomatiquement « congédier » par ses adversaires ou encore un très favorable hasard de circonstances pour -sur le champ- le suppléer au pied levé, ne doutant guère que son heure allait un jour y arriver. À la mort de son mentor, feu Houari Boumediene, il crut davantage en son étoile. Pour ensuite s'y préparer sans un instant douter de son fantastique projet, discours de son oraison funèbre brillamment réussi à l'oral. En s'appropriant le pouvoir en 1999, tel un oiseau apprivoisé, il était décidé à ne plus le lâcher, à ne jamais le partager, à ne guère un beau jour s'en séparer. Pour faire ensuite dans ces parodies d'élections présidentielles truquées où le potentiel vainqueur de ces semblants de compétitions de pure forme ne devaient plus rien au scrutin pour toujours succéder à lui-même. Et ni son âge, à présent, assez avancé, ni sa longévité au sein de cette haute fonction étatique longtemps occupée, ni encore moins la constitution qui lui interdisait alors cette possible rallonge de temps de présence à la tête de l'Etat Algérien, ni même la culture et morale des grands hommes politiques, ne pouvaient avoir raison de son fantasme, souvent intentionnellement affiché, de mourir sur le fauteuil Présidentiel. Entre ce vieillard et cet usé fauteuil du pouvoir, il s'agit d'une lune de miel qui défie l'évidence pour mettre en défi les règles les plus drastiques de la biologie humaine ajoutées à celles de la morale citoyenne et républicaine. Contrairement à ce fabuleux destin dont fit part à l'époque l'ex Président Français Giscard d'Estain, pour rendre à César ce qui appartient à César, très maladroitement d'ailleurs singé par ce novice d'Ahmed Ouyahia, entre Abdelaziz Bouteflika et le pouvoir, il est plutôt question de cet amour charnel qui ne conduit le vieillard qu'à la tombe du cimetière. Comme pour lui signifier ce départ pour l'au-delà dans l'étoffe et la grande carrure d'un vrai Président. D'un généreux et très côté décidant. D'un Homme hors du commun, de retour à sa galaxie de la voûte céleste pour avoir (transmis son message) et surtout marqué de son empreinte indélébile ce bas monde qui lui doit tout dans son quotidien. Et si l'ex Président français doit beaucoup au hasard des circonstances au sujet de son ascension à cette haute fonction étatique, celui Algérien, déchu depuis ce 02 Avril 2019 de cette fonction présidentielle, restera toujours redevable envers un seul homme du sérail : en l'occurrence feu Larbi Belkheir, ce faiseur de rois, qu'il aura fini par l'épingler et l'éjecter, une fois installé en bonne place, du cercle très rapproché de sa grande cour ou tour d'ivoire. Le règne de Bouteflika aura encore une fois démontré aux Algériens que la ruse politique a ses limites. Totalement différentes de celles admises par l'intelligence humaine, lorsque celles-ci sont mises à contribution au profit de la population et de la communauté citoyenne. Voilà pourquoi ce dénouement pathétique a réussi à effacer d'un seul trait de main la pourtant flamboyante carrière diplomatique d'un homme obsédé par le pouvoir jusqu'à l'entêtement de mourir sur le trône. Ce fut sans compter sur le hasard de la vie et le destin de l'homme. En effet, la maladie l'a réduit au silence et cloué à l'immobilisation depuis déjà plusieurs années pour rendre cette éventualité bien caduque. Vraiment impossible à réaliser ! L'image qu'il véhicule est celle d'un homme de paille. Celle d'un nom qui aura du mal à s'imposer de droit à la Grande Histoire du pays. Les rapports de forces mettant aux prises l'institution présidentielle gérée par des centres occultes aux généraux de l'armée Algérienne par organes de presse interposés, n'auront fait qu'accélérer et formalisé son départ tant souhaité. Devant les tribunaux de l'Histoire, il aura bien du mal à se disculper d'une situation de crise profonde au sein de laquelle sera, pour longtemps encore, plongé le pays, et dont il fut la principale cause. Au motif d'avoir toujours satisfait à un égo démesuré, démantelant au passage institutions de la république et dilapidant les principales richesses humaines et matérielles du pays. Ainsi se termine donc cette terrible ou très triste fin de règne d'un Président qui aura réussi de mettre à genoux le pays et de se mettre sur le dos toute la population de l'Algérie. Dans un réflexe inouï et unanime, le peuple s'est soulevé dans un sursaut d'orgueil pour dire non au chaos. |
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