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A malin, malin et demi

par Kharroubi Habib

Pour avoir réclamé l'activation de l'article 102 de la Constitution à l'encontre du président Bouteflika au motif qu'il n'est plus en capacité de gouverner, Gaïd Salah aurait dû en raison de cela refuser d'être reconduit dans un gouvernement dont la nomination a été attribuée à ce président déclaré par lui éligible à la destitution. Or le controversé chef de l'état-major de l'ANP semble avoir été satisfait par sa reconduction en s'abstenant d'y voir en elle une décision anticonstitutionnelle du moment qu'il a publiquement attesté que celui qui est censé l'avoir prise est hors d'état de le faire.

En se révélant aussi contradictoire, Gaïd Salah conforte le sentiment qu'il a été piégé par le cercle présidentiel qui l'a placé dans une situation de laquelle il ne pourrait s'en sortir qu'en reniant l'engagement pris par lui de n'engager l'armée dans aucune action extraconstitutionnelle pour faire partir Bouteflika. Légalement maintenant que Bouteflika a acté qu'il démissionnera avant le 28 avril et que le chef de l'état-major a par son silence acquiescé à son maintien par lui au poste de vice-ministre de la Défense dans le gouvernement nommé sans accroc au cadre constitutionnel, ce dernier ne pourrait contester les décisions que le premier s'apprêterait à prendre comme il en a rendu publique l'intention dans le communiqué annonçant sa proche démission. Il ne peut surtout pas récuser celle-ci en faisant prévaloir l'incapacité d'un président de la part de qui il a accepté d'être reconduit en tant que vice-ministre de la Défense.

Même s'il se doute que l'une des ultimes décisions que va prendre le président partant serait son possible limogeage, Gaïd Salah ne peut s'aventurer à s'en prémunir en recourant à l'épreuve de force avec lui.

Légalement, il commettrait ainsi un coup d'Etat qui ruinerait la solution dans le cadre constitutionnel à laquelle il prétend au nom de l'armée s'en tenir en tant que sortie de crise. Ce qui le disqualifierait d'autant plus auprès du mouvement populaire qui tout en revendiquant le départ de Bouteflika et de son clan ne veut nullement d'une intervention de cette sorte de l'armée.

N'ignorant pas cela et n'étant pas en désaccord avec le clan Bouteflika sur l'essentiel qui est pour lui et pour ce dernier la mise en place d'une transition dans le cadre constitutionnel au moindre coût pour leurs intérêts respectifs, le controversé chef de l'état-major maintient certainement la pression sur ce clan pour le dissuader de passer à l'acte contre lui mais en le laissant mettre en place les instruments indispensables à la mise en place de cette transition. L'un comme l'autre risquent de constater ce vendredi qu'ils ne font que brasser de l'air et qu'une dynamique populaire est en mouvement qui déjouera leurs calculs.