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L'ex-SG
du FLN Amar Saadani, forcé à démissionner en octobre
2016 du parti a dressé un violent réquisitoire contre le chef du RND Ahmed Oyahia, parlé d'un mystérieux «état profond», et expliqué
que le président Bouteflika n'avait jamais voulu briguer un 5ème mandat. Amar Saadani a dit regretter, dans un entretien dimanche au site
«TSA», que «les soutiens et l'entourage du président de la République fassent
preuve d'ingratitude alors qu'ils ont été à l'origine de la situation
actuelle». Estimant que ces soutiens «s'éloignent aujourd'hui du Président
alors qu'ils portent son burnous depuis vingt ans», il a pointé du doigt «les
ministres, les directeurs, les ambassadeurs et tous ceux qui étaient couverts
par le burnous du Président», avant de s'interroger : «où sont donc passées les
zaouias qui priaient pour le Président pour qu'il
guérisse et qu'il réussisse dans ses missions ? Ces zaouias
ont eu des acquis, des locaux, de l'argent, des passeports... où sont-elles
aujourd'hui»? «Où sont les hauts responsables qui
étaient chefs de gouvernement qui géraient les affaires du pays et qui
dépensaient le budget de l'État ? », s'interroge l'ex-SG du FLN. Parlant du
mouvement populaire demandant le départ du Président et le rejet d'un 5ème
mandat, il a expliqué que «le peuple a le droit de réclamer ce qu'il veut, mais
on doit expliquer cela». Sur la construction d'un état civil qu'il avait
préconisé au plus fort de son bras de fer avec des généraux du DRS alors qu'il
était à la tête du FLN, Saadani explique : «j'ai
insisté, c'est vrai, pour la construction de cet État civil. Parce que l'État
actuel ne l'est pas. Un État où la justice obéit à des ordres ne peut pas être
reconnu comme tel». Avant d'accuser ouvertement Ahmed Ouyahia
d'être à l'origine de beaucoup de décisions de la présidence de la République.
«Le Premier ministre a été également directeur de cabinet à la Présidence de la
République. Tout passait par lui», dit-il, avant de souligner qu'«aujourd'hui
qu'il n'est plus là (Ahmed Ouyahia), avez-vous vu des
décisions émaner de la présidence de la République depuis ? Posez-vous la
question. Toutes les décisions, qui ont suscité les doutes des citoyens,
sortaient sur ordre de l'État profond et de son représentant à la présidence de
la République». Sur les lettres adressées à la nation, notamment depuis le
début des manifestations contre le 5eme mandat, et attribuées au président
Bouteflika, l'ex-chef du FLN répond : «la seule lettre dont je ne doute pas est
celle du 11 mars 2019 où il a annoncé qu'il ne s'est pas présenté pour un
cinquième mandat et qu'il n'avait pas l'intention de se porter candidat»,
précisant que «sa candidature est venue de l'État profond».
«L'Etat profond» veut gérer le pays Les raisons ? «Pour que cet État profond continue de gérer le pays». «En 2014, j'étais parmi ceux qui avaient proposé la candidature du Président parce qu'à l'époque un complot se préparait contre l'Algérie au lendemain du Printemps arabe. Des terroristes étaient massés au niveau des frontières pour entrer en Algérie», souligne d'autre part Amar Saadani, qui précise que «je connaissais les bons rapports que le Président avait avec certains pays arabes et islamiques, qui avaient contribué au Printemps arabe. Je voulais qu'il reste au pouvoir pour que le pays ne subisse pas le sort de la Libye ou de la Syrie». Sur la réforme de la Constitution de 2016, il a indiqué qu'à l'époque, «nous avons soumis des propositions lors des consultations sur la Constitution menées par Abdelkader Bensalah, reprises ensuite par l'État profond avec la nomination d'Ahmed Ouyahia. Le FLN était le dernier parti à participer aux consultations. Nous avons proposé l'indépendance de la justice (...)», a-t-il indiqué, avant d'accuser Ahmed Ouyahia d'avoir «jeté ces propositions dans les tiroirs pour qu'il continue de gérer les affaires de l'État comme il l'entend. C'est Ouyahia qui a écrit les lettres (du Président) avec son secrétaire. C'est lui qui se charge de l'envoi du parapheur et de son retour. Il décide comme il l'entend, nomme, met fin aux fonctions, fait la promotion. Ce n'est donc pas le Président qui est responsable». Pour Amar Saadani, «quand le Président a déclaré qu'il ne s'est pas porté candidat à l'élection, cela veut dire qu'il termine son mandat actuel pour partir après». «Le rêve du Président est d'inaugurer la grande mosquée (d'Alger), y rester ne serait-ce qu'un instant». Sur le mouvement de contestation actuel, il a relevé qu'il «est formé de trois groupes. Il y a d'abord, le plus grand groupe qui est formé de la population refusant la vacuité actuelle à la présidence de la République et le fait que l'Algérie soit sans direction, mis à part le commandement militaire. Ce vide a poussé les citoyens à exiger le changement pour mettre fin notamment aux crimes qui sont commis. C'est leur droit. Le deuxième groupe est composé de partis qui veulent avoir des acquis. Vous avez vu comment les manifestants ont traité certains représentants de ces partis. Les partis s'accrochent au Hirak (...). Il y a un troisième groupe. Il s'agit des infiltrés». «Il s'agit de personnes agitées par l'État profond qui cherchent à cibler des institutions de la République dans le but de se recycler». «C'est là où réside le danger», estime Saadani, selon lequel ces personnes «ciblent la présidence de la République, le ministère de la Défense et le FLN. Dès que le chef d'état-major de l'ANP, le général de corps d'armée Ahmed Gaid Salah a pris la parole, ils ont commencé à crier en disant qu'il est contre les manifestants. Gaid Salah a pourtant dit que l'armée reste aux côtés de la population mais contre les infiltrés, les chargés de mission. Ils ont alors réagi en prétendant que Gaid Salah était contre le peuple». Sur la position observée par l'armée par rapport à la situation actuelle, et notamment de n'être pas intervenue, il a relevé que si «le chef de l'état-major de l'armée destitue le président de la République, alors qu'il n'a pas le droit sur le plan constitutionnel puisqu'il s'agit d'une prérogative du Conseil constitutionnel, cela sera la clef d'entrée de l'ingérence étrangère. L'institution militaire a su éviter ce piège. Si l'armée avait fait un coup d'État, j'aurai été le premier à le dénoncer». Amar Saidani ajoute par ailleurs, que «l'une des raisons de mon retrait du secrétariat général du FLN est mon refus d'un cinquième mandat pour Bouteflika. Je me suis retiré avant l'heure. Je savais que le cinquième mandat était contre les intérêts du Président. Le Président n'en voulait pas. Une de mes conditions pour le soutien du quatrième mandat était que le président de la République ait deux vice-présidents. C'est le groupe de l'Etat profond qui a fait sortir la carte du cinquième mandat». Et, ajoute-t-il, «l'État profond s'est infiltré à la Présidence à travers Ahmed Ouyahia. C'est leur représentant». Pour lui, «certains veulent se recycler pour revenir» en soutenant les manifestants, alors que «les gens sont sortis pour dénoncer la disparition du Président», car pour lui «le Président est kidnappé, on ne le voit pas. On fait faire au Président des choses qu'il n'accepte pas lui-même. Ils disent que le Président a envoyé une lettre alors qu'il ne peut pas écrire, a désigné des responsables alors qu'il ne peut pas le faire. Les lettres sortaient de chez Ahmed Ouyahia signées par lui. Il les faisait entrer à la Présidence pour les faire sortir ensuite». Il affirme en outre que «tout ce qui est sorti de la Présidence est de la responsabilité du directeur du cabinet et tout ce qui a été dépensé est de la responsabilité des gouvernements (...)». Affaire de la cocaïne, l'autre face de «l'Etat profond» Comme à son habitude, Amar Saadani n'hésite jamais à tout «déballer», puisqu'il affirme que l'affaire de la cocaïne qui a défrayé la chronique nationale à l'été dernier, a été «fabriquée». «L'État profond ne veut pas de l'État civil». Il préconise «le départ de l'État profond», car «c'est lui qui a commis des boucheries, était à l'origine d'actes arbitraires à l'égard des citoyens, mis en prison des personnes... C'est l'État profond qui a lancé le « haya à la salat » (l'appel à la prière). Cela a commencé avec l'affaire de la saisie de la cocaïne (en mai dernier)». Selon Saadani, «c'est une affaire montée de toutes pièces contre l'institution militaire. Elle a été préparée à l'étranger avec des complicités internes. L'affaire de Kamel El Bouchi est préfabriquée. Ils ont impliqué certains chefs de régions militaires qui sont les piliers du ministère de la Défense nationale. Des cadres de l'armée ont été mis à l'index. Des cadres qui dépendaient du chef d'état-major de l'armée, c'est donc une accusation directe pour l'armée». «Cette opération était menée par un centre au nom de la Présidence. L'enquête a prouvé que les officiers incriminés étaient tous innocents. Leur mise à l'écart n'était pas une accusation contre eux, mais une manière d'innocenter l'armée et d'éloigner le doute», affirme t-il, avant de souligner que «l'opération a été en fait menée à l'extérieur par des services secrets étrangers dans le but de dominer l'armée. L'état-major de l'armée a traité ce problème avec sagesse même s'il y a eu des victimes», explique-t-il, précisant que «plusieurs pays ont participé au montage de l'affaire El Bouchi. L'armée a su déjouer le complot». «Le Président partira», a-t-il dit, avant de préconiser qu'il faut «demander la disparition de l'État profond, qui agite les ficelles dans le noir, qui a des relations avec l'étranger, qui a fait mal au peuple algérien, qui a enterré des gens vivants et qui a évincé des présidents». Pour lui, «l'ex-DRS doit disparaître et laisser les citoyens tranquilles. Qu'il cesse de faire mal aux Algériens». |
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