Les robes
noires ont battu le pavé, hier à Alger, pour réclamer le départ du système et
le respect de la Constitution, répondant ainsi à l'appel lancé par l'Union
nationale des barreaux algériens. Durant leur marche dans les grandes artères
d'Alger (avenue Pasteur jusqu'à l'avenue Maurice Audin,
de la rue Abane Ramdane
jusqu'à la rue d'Isly) des centaines d'avocats ainsi que des huissiers de
justice ont exigé une rupture avec le système en place et une justice
indépendante. Les robes noires ont voulu se rendre au Palais du gouvernement,
mais ils se sont heurtés à l'impressionnant dispositif sécuritaire mis en
place, ce qui les a poussés à rebrousser chemin vers l'avenue Maurice Audin. Rassemblés à la Grande Poste d'Alger puis à la Place
de l'Emir Abdelkader et près du tribunal de Sidi M'hamed,
les robes noires portaient des pancartes et des banderoles sur lesquelles on
pouvait lire «la Défense est la voix du Peuple», «le pouvoir revient au
peuple», «Respect de la volonté du peuple». Des avocates ont brandi une grande
banderole sur laquelle on pouvait lire : «Le peuple veut un président de la
République et non un parrain d'une organisation secrète de banditisme ». Les
protestataires ont affirmé que les avocats sont issus du peuple et ils
réclament comme l'ensemble des Algériens l'indépendance de l'Algérie et
l'indépendance de la justice. Ils ont exprimé leur détermination à poursuivre
le combat pacifique jusqu'à l'édification d'un Etat de droit garantissant au
peuple le respect des lois de la République et le respect des différences. Un
autre avocat parmi les contestataires a affirmé que le système a eu tout le
temps (20 ans) pour réussir une véritable relance, mais il a échoué, alors
«partez, dégagez, vous avez échoué dans tous les secteurs». Et de poursuivre: «la défense aujourd'hui vous dit barakat, barakat, vous n'aurez
pas le droit à une autre chance car vous avez trahi la confiance du peuple,
vous avez gaspillé les ressources financières du pays, vous avez clochardisé
notre jeunesse». Maître Chaib Sadek,
membre du Conseil de l'ordre, avocat de l'Union internationale des avocats, a
affirmé au « Le Quotidien d'Oran » que la défense a été et sera toujours aux
côtés du peuple qui ne revendique que ses droits «ses propres droits qui ont
été spoliées». Et d'affirmer que tous les barreaux qui sont venus à Alger sont
solidaires avec le peuple algérien. Maitre Chaib a
affirmé que les avocats ont toujours fait de la résistance, mais précise-t-il,
auparavant cette résistance n'avait pas été soutenue. «Heureusement, dit-il,
qu'aujourd'hui, avec ce hirak, nous nous retrouvons
face à un dénominateur commun. On a toujours dit tout haut ce que les autres
pensent tout bas ».
Les avocats se
disent pour une transition pacifique et pour le changement de tout le système
judiciaire. « Nous sommes des avocats, on est là pour accompagner tous ces
citoyens et ce hirak de la société». Mais « ce qui
est important c'est d'avoir une justice forte et une justice qui sera au-dessus
des personnes et des groupes de pression qui ont toujours détourné cette notion
universelle qui est la justice». Il conclut : « si on sauve la justice et si on
arrive à constitutionaliser les principes de la justice, on sera véritablement
un peuple libre et indépendant». Maitres Abdelmadjid Sellini,
Mustapha Bouchachi, Mokrane
Aït-Larbi étaient en première ligne des manifestants pour réclamer le respect
de la Constitution et le respect de la voix du peuple.