Prenant
à contre-pied autant ses détracteurs que ses partisans, notamment au sein des
partis de l'alliance présidentielle, le secrétaire général du RND, Ahmed Ouyahia, a expliqué dimanche dans une lettre à ses
militants qu'il faut «répondre dans les meilleurs délais aux revendications»
des Algériens, qui manifestent depuis le 22 février pour le départ du système
actuel de gouvernance, ainsi que contre une prolongation du 4e mandat que s'est
octroyée le président Bouteflika. Et, dans le même temps, il a prévenu les
militants du RND qu'ils doivent travailler pour convaincre les Algériens de la
«crédibilité» du processus de transition proposé par le président sortant. Dans
cette même lettre, il a reconnu que «les circonstances que traverse
actuellement notre pays sont préoccupantes, que ce soit à l'échelle de notre
famille politique ou en tant que citoyens».
Ahmed
Ouyahia, qui a été limogé la semaine dernière de son
poste de Premier ministre et remplacé par Noureddine Bedoui,
a d'abord salué les «demandes pacifiques» du peuple algérien, avant de
préconiser que ces revendications doivent être entendues «dans les plus brefs
délais, afin d'éviter à l'Algérie tout dérapage». Il s'agit également, selon Ouyahia, de permettre à l'Algérie «de reprendre son souffle
pour poursuivre le processus de développement économique et social». Il affirme
également qu'il n'y a «rien de plus cher que de sauver l'Algérie», estimant
qu'il n'y a «ni pouvoir ni gouvernement plus chers que l'Algérie». «La
situation actuelle nous impose, a-t-il dit, à
resserrer nos rangs pour faire dépasser à l'Algérie la crise actuelle, et avec
l'intime conviction de faire triompher la raison au profit de l'intérêt
commun». Pour autant, il est resté droit dans ses bottes en appelant les
militants du RND à prendre part au processus mis en place par le président
Bouteflika, c'est-à-dire la poursuite du 4e mandat et la mise en place d'un
gouvernement de transition devant organiser une conférence nationale inclusive
qui ouvrira la voie à une élection présidentielle et une nouvelle Constitution.
«Le RND, au cours de sa participation aux consultations pour la formation d'un
gouvernement de transition, va convaincre tout le monde de la nécessité
d'accepter toutes les concessions, notamment convaincre les citoyens de la
crédibilité du processus de transition démocratique proposé par le président
Bouteflika». En plus clair, le processus que défend toujours le SG du RND, en
dépit du refus des Algériens d'y adhérer ou de s'y reconnaître, est la tenue
d'une conférence nationale, qui doit, en toute souveraineté, procéder à la
révision de la Constitution, préparer une nouvelle loi électorale et créer une
instance indépendante pour l'organisation de l'élection présidentielle. Ahmed Ouyahia, à travers son message à ses militants, confirme
qu'il reste toujours fidèle à la stratégie du président Bouteflika, mais veut
en même temps convaincre l'opposition, si ce n'est le peuple algérien, à
accepter ce ravalement de façade proposé par le pouvoir pour participer au
processus prévu pour contourner l'écueil du 5e mandat. D'autre part,
l'intervention de M. Ouyahia tranche avec la position
des trois autres partis de la majorité : si au sein du FLN, c'est pratiquement
l'implosion, avec des défections en série de cadres et militants du parti, qui
ont rejoint la contestation populaire, au sein du MPA de Amara Benyounes et TAJ d'Amar Ghoul,
c'est le «black-out» total.