Le 5e
mandat divise de plus en plus les Algériens. Et la contestation populaire ne
fait que s'amplifier, à un moment où les partis de la majorité et le
gouvernement confirment l'option du soutien à une 5e mandature du président
Bouteflika. Certes, dans l'absolu, les déclarations de M. Sellal,
selon lequel «personne n'a le droit d'empêcher un citoyen algérien de se porter
candidat», puisque «c'est un droit constitutionnel», sont justes et, surtout,
battent en brèche toutes les tentatives de refuser au président une 5e
mandature. Sauf que plusieurs paramètres entrent en jeu, et pas spécifiquement
l'âge et l'état de santé de M. Bouteflika, car l'ampleur et la profondeur de la
contestation populaire, soutenue par l'opposition, touchent plus au délitement
de l'Etat, au marasme et au désespoir social. Dans le fond, le message que sont
en train de délivrer les marches populaires contre le 5e mandat, et qui ne sont
pas près de s'estomper, à moins d'événements extraordinaires, est simple: les Algériens veulent un changement de direction
politique pour le pays. Le message est clair, l'ambition des Algériens est
également significative de ce besoin soudain et urgent d'un changement de
personnel politique. Les slogans entendus lors des marches de
ces derniers jours sont en outre assez expressifs du sentiment général de la
société algérienne, de la conviction profonde de la rue algérienne que le
moment est venu de changer, d'opérer cette alternance tant souhaitée, tant
revendiquée, autant grâce à un processus pacifique que par un mouvement citoyen
dans lequel toutes les forces du pays seront impliquées, à commencer par les
partis de la majorité, qui, eux aussi, aspirent à ce que le pays ne sorte pas
des rails et reste fermement accroché à la légalité constitutionnelle.
L'occasion
de cette élection présidentielle est réelle pour un changement de cap, pour une
amorce d'un long processus politique, pas forcément immédiat, qui doit arrimer
le pays aux grandes démocraties. Inutile d'évoquer dans ce contexte cette
notion débridée, politiquement néfaste et «fourre-tout» de «printemps
algérien». Le moment est tel que toutes les tendances impliquées, directement
ou non, dans ce formidable processus de changement qui est en train de prendre
forme, doivent maintenir le caractère pacifique des manifestations, d'un
comportement citoyen qui ne fera que donner plus de crédibilité au sentiment
général qu'il est temps que le changement se fasse. L'élection présidentielle
du 18 avril en est la cause et en même temps la raison. Autrement, il est
réconfortant que les marches de protestation contre le 5e mandat aient montré
que les Algériens sont toujours accrochés à leur pays, son avenir et ne veulent
surtout plus être « la dernière roue de la charrette ». Le mur du silence étant
brisé, il s'agit maintenant de ne pas détourner cette dynamique et ne pas la
dévoyer au profit de quelques intérêts occultes, politiquement dangereux. Les
Algériens ont montré qu'ils savent ce qu'ils veulent, et veulent l'obtenir pacifiquement.