Josette
Audin, veuve de Maurice, qui a consacré 61 ans de sa
vie pour la vérité sur l'assassinat de son époux, est décédée samedi à Paris à
l'âge de 87 ans, a annoncé dimanche L'Humanité. Cette dame courage et patience,
militante anticolonialiste, aura vécu tout ce temps pour que le président
Emmanuel Macron se déplace chez elle, en septembre dernier, afin de lui
déclarer la reconnaissance officielle de l'assassinat de Maurice par l'armée
française, soulignant qu'il importait que cette histoire «soit connue, qu'elle
soit regardée avec courage et lucidité». Il a également reconnu officiellement
que la France avait instauré, pendant la Guerre de libération nationale
(1954-1962), un «système» recourant à la «torture» contre les Algériens et
toutes les personnes qui soutenaient l'indépendance de l'Algérie. Pour elle, la
déclaration d'un président français était une victoire politique même si elle
est venue 61 ans après. La vie de Josette a basculé le 11 juin 1957,
lorsqu'elle avait 25 ans, le jour où son époux a été arrêté par l'armée
coloniale puis disparu. Pour leur militantisme en faveur de la cause
algérienne, Josette Audin expliquait que le couple
était conscient des risques qu'il prenait, soulignant que Maurice et elle-même
étaient révoltés par le colonialisme.
«On
ne supportait pas de voir des gosses algériens cirer les chaussures dans les
rues, au lieu d'aller à l'école. Au marché, si le vendeur était arabe, tout le
monde le tutoyait. Nous ne l'acceptions pas», disait-elle.?
L'affaire de l'assassinat de Maurice Audin a rebondi,
rappelle-t-on, lorsque le député Cédric Villani, proche du président Macron et
de la famille Audin, avait révélé une confidence
d'Emmanuel Macron dans laquelle il lui a déclaré que c'était l'armée française
qui avait assassiné, en juin 1957, le mathématicien militant pour
l'indépendance de l'Algérie. En février 2018, un témoignage d'un appelé de
contingent, qui pense avoir enterré le corps de Maurice Audin,
a relancé l'exigence de vérité sur ce crime vieux de 61 ans. «Je crois que
c'est moi qui ai enterré le corps de Maurice Audin»,
avait confié au journaliste de L'Humanité ce témoin des atrocités qu'avait fait
subir l'armée française aux Algériens durant la guerre de libération et qui a
voulu garder l'anonymat en se tenant à la disposition de la famille Audin. Il a raconté que les événements se sont déroulés
dans une ferme à Fondouk (actuellement Khemis el-Khechna) où, dans une cabane fermée à clé, se trouvaient
«deux cadavres enroulés dans des draps et cachés sous la paille».