On le sait: le président Bouteflika, s'il est candidat pour la 5e
fois à sa propre succession, n'aura théoriquement aucun souci à se faire pour
être élu. Ses soutiens au niveau de la majorité l'ont déjà appelé à se
présenter à l'élection d'avril prochain, tout comme les organisations de masse
et le patronat. En face, les candidats, qui passeront le tamis du Conseil
constitutionnel et, surtout, l'écueil des 60.000 signatures de citoyens dans au
moins 25 wilayas, ou 600 signatures d'élus, ne seront pas nombreux. Au mieux,
trois ou quatre, dont le chef du MSP qui serait l'adversaire le plus redoutable
à un candidat de la majorité. Le FLN a annoncé qu'il va entamer l'opération de
collecte des signatures en faveur de son candidat, M. Bouteflika et, dans la
foulée, remis au placard la tenue d'un congrès extraordinaire, qui devait
désigner le SG du parti. En fait, le FLN, qui veut doubler ses alliés de la
majorité en annonçant le début de la collecte des signatures en faveur d'un 5e
mandat du président Bouteflika, est utilisé comme une balise, sinon comme une
sonde pour tâter le pouls de l'opposition, qui attend de son côté de voir si le
pouvoir va vraiment officialiser la candidature du chef de l'Etat. Le climat
politique est tellement vicié, avec des positions crispées du côté de
l'opposition, que la moindre réaction des partis de la majorité est interprétée
comme une confirmation de la candidature du président à cette élection. Et si
le RND et Taj ont déjà annoncé qu'ils sont partants pour soutenir un 5e mandat,
le MPA, quant à lui, veut légitimer auprès de ses militants son soutien au
candidat du pouvoir. Mais, dans cette équation, toute la question est de savoir
si vraiment le pouvoir a un plan ?'B'' dans le cas d'une incapacité du
président à briguer un 5e mandat, sinon à mettre en place toute une logistique
pour faire campagne pour le président, dont l'état de santé ne lui permet pas
de parcourir le pays. C'est un fait, même si, d'un autre côté, les soutiens du
candidat Bouteflika peuvent mener à sa place sa campagne électorale, ce qui est
tout à fait permis par la loi organique sur les élections. Mais, rien n'est
moins sûr, et l'élection présidentielle d'avril prochain pourrait prendre à
contre-pied toutes les analyses et les commentaires sur l'incapacité des
outsiders à récolter le nombre de voix nécessaires pour passer l'écueil du
Conseil constitutionnel sans encombre. Et, cette fois-ci, contrairement aux
précédentes consultations, qui ont vu des personnalités politiques de premier
rang être éjectées par la ?'loi des 60.000 signatures'', il est fort probable
que des présidents de parti passeront l'obstacle des 60.000 signatures et
seront le 18 avril prochain sur la grille de départ. La raison est que cette
élection présidentielle, la dernière pour M. Bouteflika s'il se présente,
voudrait qu'il y ait un nombre crédible de candidats pour lui donner un cachet
démocratique. Ce sera en réalité sur ce point de la représentativité des partis
de l'opposition ou des candidats que la prochaine consultation populaire
devrait se jouer. Un candidat du pouvoir contre un ou deux lièvres dans une
élection présidentielle biaisée n'est pas bon pour la démocratie, ni pour
l'alternance au pouvoir. Encore moins pour le passage à une réforme profonde et
démocratique des relations politiques dans un pays, qui n'arrive pas à se
débarrasser des vieux réflexes du parti unique.