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Conflit du Sahara : un optimisme onusien hors de saison

par Kharroubi Habib

Pour l'ONU la table ronde sur le Sahara occidental, que son émissaire, l'ancien président allemand, Horst Köhler, est parvenu à organiser et dont il présidera les discussions, constitue «un premier pas d'un processus renouvelé de négociations pour une solution juste, durable et mutuellement acceptable qui permettra l'autodétermination du peuple sahraoui».

L'on peut croire que si l'ONU a déclaré que cette rencontre va constituer un premier pas qui en appellera d'autres s'est en raison que son émissaire serait parvenu à réunir les conditions qui feront de la rencontre qu'il préside aujourd'hui à Genève le nouveau point de départ pour des négociations sur le Sahara occidental entre les parties prenantes à son conflit que ne testeront pas les préalables de l'une ou l'autre.

Sauf qu'en creux dans la déclaration onusienne sur cette rencontre l'on discerne que l'organisation internationale siégeant à Manhattan a émis plus un vœu pieux qu'une certitude. Comment peut-on en effet envisager que la table ronde que présidera Horst Köhler puisse donner lieu à une entente entre ses participants et sur un processus «renouvelé» de négociations et sur la finalité qu'elle entrevoit pour lui, à savoir que son résultat soit soumis à référendum du peuple sahraoui. De ce que les parties invitées à la rencontre ont dit et n'ont cessé de répéter concernant leurs attentes il est ressorti clairement qu'elles ont, certes, accepté d'y prendre part mais en restant intraitables sur leurs positions. Il est certain que le processus «renouvelé» des négociations que Horst Köhler ambitionne de faire accepter par les participants n'est pas envisagé de la même manière par le Maroc et le Front Polisario. Par processus «renouvelé» de négociations Rabat n'entend que celui qui disqualifierait le Front Polisario en tant que partie prenante au conflit qui, selon la thèse de son makhzen, n'est qu'une création et un pantin que l'Algérie instrumentaliserait et serait de ce fait la véritable partie à faire asseoir face au Maroc. Cette vision surréaliste à laquelle s'accroche la partie marocaine est absolument irrecevable pour le Front Polisario et tout autant par l'Algérie car elle revient à faire avaliser que la question du Sahara occidental n'est pas un problème de décolonisation que le Front Polisario a fait reconnaître comme tel par les batailles militaires et diplomatiques qu'il a menées, mais un différend géopolitique opposant les pays voisins et rivaux que sont le Maroc et l'Algérie.

C'est cette même vision surréaliste qui fait que le Maroc ne veut pas entendre qu'il soit question d'un référendum d'autodétermination pour le peuple sahraoui sur quoi que puissent déboucher des négociations qu'il accepterait d'ouvrir. Bien que mesuré, l'optimisme de l'ONU et de son émissaire parait comme étant hors de saison au regard que la partie marocaine a par la voix de son monarque décrété que le seul format de discussion acceptable pour le royaume est un face-à-face algéro-marocain qui plus est porterait exclusivement sur la solution préconisée par lui de l'octroi d'un statut d'autonomie sous souveraineté marocaine au territoire sahraoui. L'ONU n'ayant pas fait le geste fort qui aurait dissuadé le Maroc et son roi à persister à vouloir imposer le fait accompli de l'occupation marocaine de Sahara occidental, la table ronde de Genève s'achèvera probablement sur un énième échec de sa part dans ses tentatives de faire bouger les lignes dans le conflit.