Blanchi par
la justice saoudienne, le prince héritier Mohamed Ben Salmane,
surnommé «MBS», est à nouveau suspecté depuis les nouvelles révélations,
vendredi dernier, de Washington Post et de New York Times. A en croire
certaines sources anonymes, l'agence américaine de renseignement, CIA, aurait
identifié le puissant dauphin comme commanditaire de l'assassinat de Jamal Khashoggi, l'éditorialiste critique de Riyad. L'opposant,
«drogué, tué et démembré» au sein du consulat saoudien à Istanbul le mois
d'octobre dernier, aurait également été contacté en amont par le frère du
prince, Khalid Ben Salmane, ambassadeur de l'Arabie
Saoudite aux Etats-Unis, pour lui assurer que rien ne lui arriverait s'il
pénétrait l'enceinte du consulat de son pays en Turquie.
Un coup de
fil qui aurait été demandé par MBS lui-même et dont l'ambassadeur ignore,
paraît-il, la portée dans la mesure où il était fort indigné que cette
accusation très grave soit relayée par des sources anonymes dans un tweet posté
dès l'annonce par les médias de l'assassinat de Khashoggi.
Malgré l'inculpation par la justice saoudienne de 11 personnes d'un lot de 21
suspects et la peine capitale requise pour cinq d'autres, autour du prince,
l'étau se resserre de jour en jour. D'ailleurs, depuis la Californie, Donald Trump a haussé le ton, le samedi 18 novembre, sur cette
affaire-là, après que le Trésor américain eut annoncé la mise en place, dès le
15 novembre, de sanctions ciblant dix-sept responsables saoudiens pour leur
complicité dans le meurtre de l'éditorialiste Khashoggi,
dans une volonté à peine voilée de l'administration américaine d'étouffer le
scandale et d'épargner des poursuites judiciaires à la dynastie régnante. Or, Trump a vite changé de fusil d'épaule, allant jusqu'à
affirmer qu'il disposait de l'enregistrement du meurtre du journaliste mais
qu'il n'a pas écouté parce qu'il est, souffle-t-il sur Fox News, «un
enregistrement de souffrance», sous-entendant à l'occasion l'implication du
prince héritier dans le meurtre. MBS a-t-il menti
alors au président américain ? Et celui-ci, l'a-t-il
enfin lâché à la meute ? Rien ne confirme ni infirme la première ni la seconde
l'hypothèse, vu les contradictions flagrantes du prince Mohamed Ben Salmane et la versatilité avérée du président républicain,
lequel a fait savoir que les USA seraient capables de prouver l'identité du
meurtrier du journaliste saoudien dans les prochains jours. Une pression
supplémentaire pour le prince héritier qui s'ajoute à celle de l'indomptable Recep Tayyip Erdogan.
Ce dernier a déjà, pour rappel, affirmé à plusieurs reprises que l'ordre de
tuer Jamal Khashoggi avait été donné «aux plus hauts
niveaux de l'Etat saoudien». S'il a écarté la responsabilité du roi Salmane, il n'en demeure pas moins que la presse et des
responsables turcs anonymes ont incriminé son fils, le prince Mohamed.