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Rappel à l'ordre

par Mahdi Boukhalfa

L'armée algérienne restera dans les casernes, elle est légaliste et respectera toujours la volonté du peuple.

Pour autant, elle est prête à intervenir si les circonstances l'exigent pour assurer stabilité et sécurité du pays, y compris le respect de la volonté du peuple. Le vice-ministre de la Défense Ahmed Gaïd Salah a recadré jeudi tous les acteurs politiques, dont le MSP, à moins de huit mois de la prochaine élection présidentielle. Gaïd Salah aura été en outre franchement critique contre une partie de la classe politique qui voudrait impliquer l'armée dans un ténébreux et scabreux jeu de chaises à l'approche de l'élection présidentielle d'avril prochain.

Une mise au point qui intervient à un moment de grand flottement politique après le silence qui a marqué les appels de plusieurs partis au président Bouteflika pour briguer un 5ème mandat. Le FLN, le RND, Taj et les présidents des deux chambres du Parlement sont partants pour soutenir une candidature du président Bouteflika à un 5ème et dernier mandat, la Constitution révisée n'autorisant dorénavant que deux mandats. Dans le camp de l'opposition, cette initiative des partis proches du pouvoir ne passe pas et certains, comme le MSP, qui s'est retiré de la coalition gouvernementale, tentent de lui faire barrage en proposant une alternative à ce qui apparaît pour beaucoup de partis de cette mouvance comme une évidence, si le président Bouteflika se présente pour une cinquième fois à cette prochaine élection présidentielle.

L'initiative de lancer une transition démocratique pour une alternance au pouvoir, qui serait en quelque sorte parrainée et garantie par l'armée, que propose le MSP, est mal passée et a vite montré autant ses limites organisationnelles que ses adversaires politiques. Certains soupçonnant même le leader du MSP de vouloir tirer les marrons du feu une fois le processus lancé. Mais, parce qu'elle est encore perçue comme décisive dans les choix politiques du pays, l'armée a vite réagi pour remettre les pendules à l'heure, par la voix du vice-ministre de la Défense qui a rappelé à tous, une fois encore, qu'elle reste attachée à ses missions constitutionnelles. Ni plus ni moins. Mieux, le n°2 de l'armée algérienne a prévenu les acteurs politiques que l'Algérie «n'est pas une arène de combat ou une piste de course» et que l'armée interviendra «avec détermination» contre «tous ceux qui s'aventureraient à exposer le pays des chouhada au désordre et aux desseins hostiles». Un message clair mais ferme et, surtout, qui apporte son soutien au chef de l'Etat dans une sorte de rappel à l'ordre à tous pour qu'ils respectent les fondamentaux politiques du pays.

L'intervention de Gaïd Salah met surtout en garde contre les velléités partisanes d'embrigader l'ANP dans des «culs-de-sac» politiques, comme elle a pris la forme d'une véritable gifle et une cinglante leçon politique. Mieux, Gaïd Salah a prévenu que l'armée algérienne n'a d'autre tuteur que le président de la République et confirme ainsi son caractère profondément républicain. Gaïd Salah aura prévenu que personne ne peut s'improviser porte-parole de l'ANP et que celle-ci reste et restera loin des jeux de coulisses politiques. La dernière estocade de Gaïd Salah est que l'ANP ne «peut être le souffre-douleur de certains incapables, ni l'arbre qui couvre la forêt de leur impuissance». Et là, difficile de faire la différence entre la leçon et les critiques politiques de l'ANP à certains partis.