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Macron se démarque de Trump

par Kharroubi Habib

En nommant hier mercredi François Sénémaud, ancien directeur du renseignement à la DGSE et actuel ambassadeur de France en Iran, en tant que son représentant pour la Syrie, le président Emmanuel Macron a fait le geste qui donne à comprendre qu'il entend entreprendre la normalisation progressive des relations de l'Etat français avec celui de la Syrie.

Cette nomination indique à l'évidence que Paris n'est plus dans la disqualification de Bachar El Assad et de son régime en tant qu'autorités légales de la Syrie.

Pour Macron, le temps n'est certes pas venu de procéder à la réouverture de l'ambassade de France à Damas mais que la France et la Syrie rétablissent entre elles un canal de communication. La décision du président français lui a été dictée par le souci de mettre un terme à la politique de son prédécesseur sur le conflit syrien marquée par trop de suivisme derrière celle des Etats-Unis. Elle est pour lui façon d'affirmer que la France a sa propre partition à jouer sur la scène internationale. Ce que sur le conflit syrien il tente de prouver en ayant convenu avec Poutine qu'il y a nécessité de poursuivre le processus d'Astana voué à la recherche d'une solution politique négociée au conflit syrien que François Hollande sous influence américaine a systématiquement décrié et ignoré.

L'ambassadeur François Sénémaud aura probablement comme objectif premier de porter la voix de la France auprès des parties syriennes, régionales et internationales prenantes au processus d'Astana. En faisant un pas de plus sur le conflit syrien dans un sens qui n'est pas celui que Washington a indiqué aux alliés des Etats-Unis, Emmanuel Macron a accentué sa prise de distance avec l'agité du bocal sévissant à la Maison Blanche dont il ne peut plus cautionner les imprévisibles et dangereuses prises de position. Avec ce que fait le président américain sur la question de l'accord iranien, sur celle des relations économiques de son pays avec les partenaires internationaux, des conflits syrien et israélo-palestinien, le président français a progressivement pris conscience que la France se condamne à n'être plus qu'un supplétif de l'Amérique et à ce titre n'ayant plus voix au chapitre sur la scène internationale que celle que Donald Trump lui intimera d'élever.

L'effet positif du trumpisme est que l'homme qui l'incarne a incontestablement mis fin au mythe d'une Amérique dont le monde ne peut qu'admettre le leadership car il ne viendrait d'elle que le bien. Donald Trump a irrévocablement brisé cette vision idyllique dont l'Amérique a bénéficié. La remise en cause de celle-ci n'est pas le fait seulement d'anti-américanistes patentés. Des atlantistes qui en furent des adeptes militants sont maintenant convaincus qu'il faut regarder sous un autre angle cette Amérique. Ce qui dans leur milieu relève de la « révolution copernicienne » à laquelle il n'a jamais été pensé. Jamais et malgré l'étalage arrogant de leur puissance les Etats-Unis n'ont été isolés internationalement que depuis que Donald Trump sévit à la Maison Blanche.