Cela n'a
pas été une surprise. Loin s'en faut, même si certains analystes en mal de
sensationnel avaient un moment tenté de faire croire l'idée que l'homme serait
un candidat potentiel, tapi au sein du pouvoir, pour la présidentielle de 2019.
Et, surtout, qu'il veut se porter candidat contre le président Bouteflika.
Avant-hier, Ahmed Ouyahia a fait voler tout cela en
éclats, comme il a confirmé qu'il n'a aucune ambition politique autre que de
servir le pouvoir, même avec sa double casquette de Premier ministre et de
patron de la seconde force politique du pays, le RND. En appelant le président
Bouteflika à briguer un 5ème mandat, le chef du RND confirme d'abord qu'il
reste un fidèle parmi les fidèles du Chef de l'Etat, ensuite qu'il reste, tant
que M. Abdelaziz Bouteflika est le président des Algériens, son fidèle
serviteur. Il a, jeudi dernier lors du conseil national du RND, emprunté
pratiquement la même voie et la même posture que le SG du FLN, Djamel Ould Abbès, qui avait le premier
appelé le Chef de l'Etat à se porter candidat, pour la 5ème fois, à l'élection
présidentielle d'avril 2019.
Au RND
comme au FLN, la partition est déjà composée de cette élection de 2019, ainsi
qu'au sein de la centrale syndicale UGTA, et très probablement avant la fin de
l'été ou dans les prochaines semaines au sein du patronat. En fait, tout se met
progressivement en place, dans une parfaite coordination, pour préparer
l'opinion publique à un 5ème mandat que devrait briguer le président Bouteflika.
La posture d'Ouyahia, après Djamel Ould Abbès et le SG de l'UGTA,
sonne comme un rappel des troupes pour une élection que certaines forces
politiques voudraient être autre que celle à laquelle le pouvoir est en train
de mettre en place les principaux éléments constitutifs. Car en face, côté
opposition, on ne chôme pas également et on ferraille dur pour éviter une
fatalité que veulent imposer aux Algériens les partis au pouvoir. L'appel au
mois de mai dernier de 14 personnalités algériennes au président Bouteflika
pour qu'il ne brigue pas un dernier mandat est symptomatique d'un ras-le-bol
quant à l'immobilisme politique dans le pays. Car avec une opposition souvent
réduite à une ou deux voix, à un ou deux partis politiques, rien de sérieux ni
de durable ne peut être envisagé pour la construction d'une société algérienne
affranchie, débarrassée de cette sempiternelle quête de démocratie, de respect
des droits de l'homme, de la liberté d'expression, d'alternance au pouvoir.
Certes, les 14 personnalités algériennes, dont un ex-Premier ministre, un
écrivain, un journaliste-chroniqueur ou une universitaire, ont fait preuve de
courage intellectuel, politique, mais leur initiative s'arrête là où la
politique commence. Car ils n'ont aucune emprise sur le destin politique du
pays. Tout juste une fragile opinion, facilement battue en brèche, qu'ils
tiennent d'ailleurs maladroitement en bandoulière. D'autres partis ont
également prévenu contre les effets d'un 5ème mandat de Bouteflika. Pour le
moment, les deux parties restent sur leurs positions, même si les partisans
d'un 5ème mandat dominent la vie publique et les institutions étatiques, et
donc le combat semble inégal, entre ceux qui veulent tout imposer au peuple, et
ceux qui estiment que le président Bouteflika doit passer maintenant la main.
Et laisser de nouvelles forces politiques émerger, de nouveaux leaders, y
compris au sein des partis au pouvoir, mener une transition politique
structurelle, entre deux périodes politiques, deux styles de gouvernance, un autre
état d'esprit pour un pays où doit s'enraciner la démocratie, la bonne
gouvernance, une prospérité retrouvée, les droits de l'homme.