Le
président de l'Association nationale des exportateurs algériens Ali Bey Nasri a appelé, hier mardi, les pouvoirs publics à
accompagner et encourager les exportateurs, et, surtout, à revoir les termes du
prochain démantèlement tarifaire dans le cadre de l'accord d'association avec
l'UE. Il a expliqué à la radio nationale que les déclarations du Premier
ministre sur l'encouragement et le soutien de l'Etat aux exportateurs était «ce que nous attendions depuis longtemps». «Le Premier
ministre parle dorénavant le langage de l'exportation, et cette volonté est la bienvenue.
Nous l'attendions, maintenant on attend des actes sur le terrain», a souligné
M. Nasri selon lequel «il y a actuellement un
ensemble de signaux au niveau de tous les ministères sur l'exportation»,
ajoutant qu'»il y a une volonté dans tous les ministères pour aller vers
l'export».
Il a
ensuite relevé qu'il y a une «stratégie qui est mise en place pour reprendre la
feuille de route pour aller vers l'exportation.» A la fin de la semaine
dernière, et en marge de la cérémonie du «Trophy
expert award 2017», le ministre du Commerce Said Djellab avait annoncé que
«nous espérons recevoir au cours de cette année le rapport définitif relatif à
la stratégie nationale des exportations», ajoutant que «cela nous permettra de
remettre au gouvernement une vision concertée sur cette question.» Au cours de
la même cérémonie, le Premier ministre Ahmed Ouyahia
avait affirmé que la bataille de l'économie nationale est de conquérir des
marchés à l'extérieur, et a assuré les opérateurs économiques du soutien du
gouvernement dans leur conquête, soulignant que les exportations hors
hydrocarbures sont «un impératif ». Pour autant, selon le président de
l'Association nationale des exportateurs algériens, «le principal frein à
l'exportation est la banque d'Algérie.» Or, argumente t-il,
«ce qui est exportations hors hydrocarbures est passé de 300 millions en 2014 à
600 millions de dollars en 2016. Nous avons 281 produits exportés.» Ali Bey Nasri affirme par ailleurs que «nous avons besoin de plus
d'efforts de la part du gouvernement, des encouragements, car nous faisons face
à une guerre commerciale au niveau mondial, on va vers des marchés où il n'y a
plus de places». D'autre part, il estime que le vrai défi est l'accord
d'association avec l'UE: «Faut-il rester dans la ZLE,
geler son adhésion, sortir ? Nous avons renégocié en 2009 et reporté de trois
ans l'échéance du démantèlement tarifaire, prévu maintenant pour 2020. Mais, entre temps, on n'a rien fait pour mettre en œuvre un plan
de bataille de nos entreprises, nous sommes dans la même situation qu'en 2010.»
En fait, les exonérations douanières des produits importés de l'UE coûtent au
Trésor public deux milliards de dollars annuellement. Une situation qui
pénalise l'économie algérienne, selon M. Ali Bey Nasri,
qui a expliqué que sur 20 milliards de dollars d'importations, nous avions une
moyenne pondérée de 18% d'exonérations fiscales, c'est un chiffre minima, et,
en 2020, nous serons dans une zone de libre échange
et la facture va aller vers les trois Mds de dollars. Ce sera excessif pour le
trésor. Il n'y a que des aspects négatifs, mais c'est un accord qu'il faut
honorer, car il y a la signature du président de la République, et donc il faut
y aller en connaissance de cause» vers ce démantèlement tarifaire, dont la date
d'effet commencera en 2020. Pis, selon M. Nasri, le
danger de cet accord d'association, c'est que «quand on l'a signé, il y avait
15 membres. Quand on l'a mis en œuvre, il y avait 25 membres. En 2007, il y a
ensuite 27 membres, la Croatie est entrée en 2013, cela fait 28 membres, et il
y a cinq pays dont la Serbie actuellement candidats à l'adhésion. Quelle sera
donc la position de l'Algérie? Que faut il faire quand il y aura 33 pays ?» Pour lui, il
fallait aller «vers d'autres moyens pour protéger notre économie. Faire comme
le fait l'UE en augmentant les taxes à l'entrée des produits importés»,
affirmant que «nous sommes en droit d'appliquer des taxes en interne, car il ne
s'agit pas de dire on protège, on va aller vers des situations très
difficiles.» Les solutions existent, selon M. Nasri,
qui estime qu'»on n'a plus le droit de ne pas réévaluer l'accord et de se
dispenser de ses impacts, et on doit faire une simulation sur 2020, c'est à
notre porte.» La raison est, explique-t-il, que l'»UE a enregistré durant les
quatre premiers mois de l'année une hausse moyenne de 16% de ses exportations
vers l'Algérie, en dépit de tout ce qui a été dit, et les exportations de la
Chine vers l'Algérie ont connu une baisse drastique». La France, selon lui, a
enregistré une hausse de ses exportations vers l'Algérie de 10%, l'Allemagne de
6%, l'Italie de 9%, l'Espagne de 8%, et ce en dépit de la limitation des
importations avec le gel de 831 produits. Donc «que faut-il dire à l'UE ?
Rester dans la ZLE, la quitter ?». L'autre solution pour les exportations
algériennes reste le continent africain, mais auparavant, estime-t-il, il faut
qu'il y ait une levée des obstacles bureaucratiques et les mesures draconiennes
de la Banque d'Algérie. «Les entreprises exportatrices ont besoin de visibilité,
et d'être sur place, car on ne peut plus vendre par correspondance», a-t-il affirmé, avant de relever que «ce qui est valable
pour Sonatrach (qui a acheté une raffinerie en
Italie, NDLR) n'est pas valable pour les autres.» «Il y a des blocages bancaires
inadmissibles», a-t-il dit.