|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Le Maroc,
après avoir créé une crise diplomatique avec l'Iran et accusé l'Algérie de
faciliter le transfert d'armes au Front Polisario via le parti chiite libanais
Hezbollah, tente de replonger la région dans une inutile tension, aussi bien
politique que militaire. Dans un communiqué rendu public samedi, le ministère
marocain des Affaires étrangères a accusé cette fois-ci le Front Polisario d'
«actions de provocations», tout en accusant, là encore, l'Algérie. «Le Royaume
du Maroc condamne, vigoureusement, les actions de provocation récentes menées
par le Polisario, dans la localité de Tifariti, à
l'est du dispositif de défense» au Sahara Occidental, déclare le ministère des
Affaires étrangères marocain dans le même communiqué, ajoutant que «le Royaume
du Maroc considère qu'il s'agit là d'une nouvelle violation caractérisée du
cessez-le-feu et d'un défi flagrant à l'autorité du Conseil de sécurité de
l'ONU».
La zone de Tifariti, rappelons-le, fait partie des territoires sahraouis libérés par l'Armée de libération du Sahara Occidental (ALPS), dans les années 1990, avant la mise en place d'un cessez-le-feu, en 1991, sous l'égide de l'ONU, alors dirigée par l'Egyptien Boutros Boutros Ghali. D'autre part, le même communiqué du ministère marocain des Affaires étrangères indique que «le Maroc a saisi, officiellement, à ce sujet, le président du Conseil de sécurité et ses membres, le Secrétaire général des Nations unies et la Minurso», et «leur demande d'assumer leurs responsabilités et de prendre les mesures nécessaires contre ces agissements inacceptables». Mais, dans la foulée, le ministère des Affaires étrangères du Maroc, «regrette que cette escalade se déploie avec la bénédiction et la complicité d'un pays voisin, membre de l'UMA, mais dont il viole, doublement, la charte, en fermant les frontières et en abritant sur son sol un mouvement armé qui menace l'intégrité territoriale d'un autre membre.» L'Algérie, qui est visée mais n'est pas citée, nommément, est également accusée de ne pas «respecter les valeurs du bon voisinage et les impératifs de stabilité régionale», et «s'entête à encourager ses mercenaires du Polisario, dans leur action déstabilisatrice, en violation de la légalité internationale». De son côté, et à la suite de ces gesticulations marocaines, le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a appelé samedi, dans un communiqué «à la plus grande retenue» au Sahara Occidental, mettant en garde contre une modification du «statu quo». «Le secrétaire général suit de près l'évolution de la situation au Sahara Occidental», relève le communiqué diffusé par son porte-parole Stéphane Dujarric. «Conformément à la résolution 2414 (2018) du Conseil de sécurité, adoptée le 27 avril 2018, et afin de maintenir un environnement propice à la reprise du dialogue, sous les auspices de son envoyé personnel, Horst Köhler, le Secrétaire général appelle à la plus grande retenue. Aucune action susceptible de modifier le statu quo ne doit être entreprise.» En réalité, la panique actuelle du Maroc et ses accusations contre l'Algérie et la République sahraouie, en prenant à témoin l'ONU dont les résolutions ont toujours été ignorées et non appliquées par Rabat, s'explique par l'organisation, ce lundi, à Tifariti, dans les territoires sahraouis libérés, à quelques centaines de mètres du mur de défense marocain dont les systèmes de sécurité et de surveillance radars ont été fournis par Israël, de manœuvres militaires de l'ALPS à l'occasion du 45ème anniversaire du début de la lutte de Libération sahraouie contre l'ancienne puissance coloniale, l'Espagne. Le Parlement sahraoui a été, également, convoqué pour une session extraordinaire, à l'occasion de ces festivités. Dans une déclaration, hier, dimanche, le ministre sahraoui de la Défense Abdallah Lahbib, a indiqué que la célébration des fêtes nationales, dans les territoires libérés, à l'image du 45ème anniversaire de la Journée nationale de l'Armée de Libération populaire sahraouie (ALPS), coïncidant avec le 20 mai, se veut être «une consécration de l'exercice de la souveraineté de l'Etat du Sahara Occidental sur ses territoires». «L'ALPS est présente dans ces territoires depuis 1975 et non pas d'aujourd'hui, d'autant qu'une grande partie de ces territoires a été libérée dans les années 70 du siècle dernier», a déclaré M. Abdallah Lahbib. La date du 20 mai est celle de la Journée nationale de l'ALPS et l'anniversaire du déclenchement de la lutte armée contre l'occupation, dont «nous célébrons le 45ème anniversaire, dans la ville de Tifariti libérée, un anniversaire qui coïncide avec le 13ème anniversaire de l'Intifada de l'Indépendance», a-t-il dit. Ce sont là, en fait, les raisons qui ont poussé la seconde puissance coloniale de ce territoire, non autonome à saisir le SG de l'ONU et son Conseil de sécurité, mais, comme toujours, sans en préciser les raisons réelles. La semaine dernière, l'ambassadeur sahraoui à Alger Abdelkader Taleb Omar avait réfuté les accusations marocaines selon lesquelles il y a «des Marocains séquestrés à Tindouf», comme cela a été affirmé dans le communiqué de samedi du ministère des Affaires étrangères marocain. «Les camps des réfugiés et les territoires sahraouis libérés sont des régions ouvertes et transparentes, contrairement à la situation dans les territoires sahraouis occupés et assiégés par le Maroc. Nous lançons un défi au régime marocain d'ouvrir aux visiteurs et observateurs étrangers, l'accès aux territoires sahraouis assiégés comme cela est assuré au niveau des camps des réfugiés et les territoires libérés», a-t-il affirmé. Selon le diplomate sahraoui, les «camps des réfugiés abritent, outre un nombre d'ONG italienne, espagnole, française et suédoise, une dizaine d'organisations ; celle relevant, notamment, des Nations unies, du Haut commissariat aux réfugiés (HCR), du Programme alimentaire mondial (PAM), du Fonds de l'ONU pour l'enfance (UNICEF) et de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).» Fin avril dernier, le Conseil de sécurité de l'ONU avait appelé le Maroc et le Front Polisario à reprendre le processus de négociations pour l'organisation d'un référendum d'autodétermination au Sahara Occidental. Le conseil de sécurité a précisé que ces négociations doivent se tenir sans «pré-conditions». Le dernier round de discussions, dit processus de Manhasset, du nom d'une des banlieues de New York, remonte à 2008. La même résolution du Conseil de sécurité, qui chargeait Antonio Guterres de faire retomber les récentes tensions, n'a prorogé le mandat de la Minurso que de 3 mois au lieu d'une année, sur proposition des Etats-Unis, qui veulent mettre, sous l'impulsion du nouveau conseiller présidentiel à la sécurité nationale John Bolton, une pression maximale pour obtenir des résultats au Sahara Occidental, jugeant que ce conflit n'a que trop duré. |
|