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Industrie: Fin de l'aventure de Cevital en Italie

par Yazid Alilat

C'est pratiquement la fin de l'aventure industrielle de Cévital, groupe d'Issad Rebrab, en Italie. Après presque une année de procédures et d'attentes, de menaces et de pression de la droite italienne sur le gouvernement, les aciéries Lucchini de Piombino, version Cevital, sont tombées vendredi.

C'est un communiqué du ministère italien des Activités productives, qui a annoncé qu'il a trouvé un repreneur d'Aferpi, la filiale italienne de Cevital, avec le géant indien de la sidérurgie, Jindal. Le même opérateur qui avait été supplanté en 2014 par le groupe privé algérien Cevital pour la reprise des aciéries d'Aferpi. Un terrible coup du sort pour l'industriel algérien, obligé de passer la main sur un projet qu'il n'a pu ni capitaliser, ni renflouer financièrement, encore moins mettre en place un plan d'investissement, promis lors de l'acquisition du projet en 2014. Selon le ministre italien des Activités productives, Carlo Calenda, il ne reste que la signature du groupe indien pour finaliser l'opération, alors qu'il a annoncé que le groupe de Rebrab a, quant à lui, signé le document de cession de l'usine de Piombino. « Le président de la région Toscane me tient au courant, instant après instant, et la signature manquante, ne saurait tarder, les dirigeants de Jindal étant, en ce moment, en Corée du Sud », a-t-il indiqué dans des déclarations à la presse italienne. Il a ajouté que « nous avons le document signé par Alger, ce qui, en soi, représentait l'écueil le plus difficile à obtenir ». A la suite de l'annonce de la reprise par Jindal des aciéries Lucchini de Piombino, et le départ quasi certain de Cevital d'Italie, la presse italienne a commenté l'opération en soulignant que « le gouvernement italien est satisfait, et ses représentants ont souligné que Jindal, par le truchement des aciéries ex-Lucchini, entamera une opération stratégique pour concurrencer son rival de toujours, ArcelorMittal, sur le marché européen de l'acier et s'engagera, à relancer la structure et à préserver les emplois. « D'autant que le président de la région Toscane, Enrico Rossi, a manifesté sa satisfaction », à la suite de cette opération, et de l'accord, « qui conduira Cevital à vendre l'ensemble de la société à Jindal pour la gestion du site de production de Piombino », rapporte encore la presse italienne, selon laquelle le groupe Cevital a bien signé l'accord de rétrocession des aciéries de Piombino au gouvernement italien, qui, de son côté a manifesté sa satisfaction d'avoir trouvé un repreneur. Pourtant, le projet de Cévital de s'implanter, en Italie, aura été battu en brèche par beaucoup d'éléments, outre l'impossibilité d'expatrier des fonds devant servir à la recapitalisation des aciéries de Piombino, ainsi que la mise en place d'un business plan adossé à d'importants investissements pour relancer la production de l'usine. D'autant que la droite italienne, en pleine campagne électorale pour les élections locales, du 4 mars prochain, avait fait une terrible pression sur le gouvernement de Paolo Gentiloni pour, pratiquement, pousser vers la porte de sortie le groupe industriel algérien. Celle-ci a, notamment, reproché au gouvernement sortant de Matteo Renzi d'avoir aidé Cévital à reprendre le groupe Aferpi.

Dans le banc des accusés de la droite italienne, il y a l'ancien vice-ministre Claudio De Vincenti, à qui il est reproché d'avoir décrit l'arrivée de Cevital comme « étant une victoire de l'Italie ». « Or, en trois ans, qu'avons-nous obtenu ? Les usines sont pratiquement à l'arrêt et que dire du fameux plan industriel annoncé en grande pompe ? Les ouvriers l'attendent toujours », lancent les détracteurs  du projet de Cevital. Rebrab avait, notamment, promis un investissement de 400 millions d'euros à injecter dans ces aciéries pour son plan de relance. Au mois de juillet dernier, le patron de Cévital avait entamé la procédure de cession à son successeur, avec l'objectif de récupérer son investissement dans ce projet pratiquement « mort-né ». D'autant que vers le mois de novembre dernier, les autorités italiennes avaient annoncé qu'elles allaient réclamer, au milliardaire algérien, une pénalité dont le montant s'élèverait à 3 millions d'euros, pour le retard dans le lancement de la production, dans les aciéries ex-Lucchini, avait indiqué le quotidien italien « IlSole24Ore ».  Selon ce quotidien, les autorités italiennes devaient appliquer une pénalité de 500.000 euros pour chaque mois d'arrêt de travail à l'usine de Piombino, soit un total d'environ 3 millions d'euros ; les aciéries étant à l'arrêt depuis le début de l'année 2017. Car entre-temps, les annonces faites par Cevital, notamment la signature de deux mémorandums d'accord avec le Chinois Sinosteel, pour la relance de la partie technique des aciéries, notamment l'installation d'un nouveau four électrique, et le deuxième avec un investisseur basé à Dubaï, n'ont pas suffi, à convaincre le commissaire Piero Nardi, qui a décidé, en novembre dernier, d'entamer une bataille juridique pour annuler l'acquisition par Rebrab des aciéries Lucchini. C'est au mois de décembre 2014 que Cevital avait pris le contrôle des aciéries Lucchini à Piombino, et avait annoncé sa décision d'investir environ 400 millions euros et de reprendre 2.500 travailleurs en 2 ans. Depuis, cela n'a été qu'une succession de déboires, jusqu'à la cession de ces aciéries à l'indien Jindal.