
La dernière
polémique en date, comme si on était en mal de controverses byzantines, est ce
chassé-croisé verbal entre le Premier ministre et le Parti des Travailleurs. En
cause la proposition de Hanoune de revenir à une
Assemblée constituante, demi-sœur de celle de 1962. Pour les profanes, une
Assemblée constituante est une institution collégiale avec pour tâche la
rédaction ou l'adoption d'une constitution, c'est-à-dire le texte fondamental
d'organisation des pouvoirs publics d'un pays, comme l'explique si gentiment
hadj Wikipédia. Grosso modo, le parti demande à dissoudre le parlement dans un
verre d'acide et de jeter les restes en n'oubliant pas de tirer la chasse d'eau
derrière. Le but étant de repartir sur de nouvelles bases, en essayant, si
possible et après assentiment de qui de droit, de «sauver le pays du système
périmé du parti unique». Parti unique, pensée unique, le constat est le même,
accablant, affligeant, alors que de l'autre côté des tranchées, Ould Abbès continue à décréter
que le FLN est éternel à la tête du pays. Le PT évoque pêle-mêle corruption,
prédation, dilapidation, des termes définitivement algériens, au même titre que
pauvreté, pouvoir d'achat, émeute et ?hogra'.
De son
côté, le Premier ministre explique que les gens qui veulent le changement ne
veulent pas, forcément, le bien de ce pays. Décryptage : Accepter ce qu'on vous
vend sans demander la notice d'emploi. Pour le gouvernement, le médecin ou
l'enseignant qui fait grève a, forcément, une arrière-pensée, pour 2019. Quoi
au juste ? Pas d'explication de textes, simplement une accusation d'intention.
L'austérité vue d'en haut, supportée par le seul corps malade de l'Algérie
lambda, doit être, officiellement, défendue par des voix patriotiques pour les
expliquer et les défendre. Deuxième décryptage : tout comme la loi sur la
réconciliation nationale, il est antipatriotique de critiquer les réformes
budgétaires menées pour rétablir les équilibres financiers faussés par une
gestion aussi catastrophique qu'ubuesque des deniers de l'Etat. En deux mots
comme en mille, il est demandé à tout Algérie, sous peine d'accusation de haute
trahison, d'aller remplir son réservoir et d'expliquer à son enfant qu'un litre
de carburant à cent dinars est un acte hautement patriotique. Il est exigé à
tout nationaliste de défendre les augmentations des prix et la hausse des taxes
et de désigner au commissariat le plus proche ceux qui osent dénigrer la
démarche, ô combien courageuse, du gouvernement. Il est, strictement interdit,
en public ou en privé, de s'interroger sur la fortune des oligarques ni sur sa
provenance alors de là à demander une constituante !