Devant
la persistance des interpellations faites par les malades chroniques et aussi
les pharmaciens d'officine à propos de la pénurie de certains médicaments
essentiels, nous avons interrogé, hier, M. Bouherid
Abdelkrim, pharmacien et porte-parole du bureau de Constantine du Syndicat
national des pharmaciens d'officine (SNAPO) sur la réalité des pénuries
signalées. Ce dernier a répondu que les pénuries sont bien réelles et elles ne
datent pas d'aujourd'hui, dit-il. «Les pénuries existent depuis le mois de
janvier 2018 et se sont accentuées.
Le
phénomène ne résulte pas uniquement de la décision gouvernementale mettant fin
à l'importation de médicaments dont l'équivalent est fabriqué localement et ce,
dans le but d'encourager et soutenir la production locale et, surtout, la
promotion du médicament générique. On peut expliquer autrement le phénomène de
la pénurie», a expliqué notre interlocuteur. D'abord, a-t-il affirmé, au niveau
de l'administration concernée du ministère de la Santé où l'on a constaté une
lourdeur bureaucratique dans la signature des cahiers des charges pour les
médicaments encore admis à l'importation. Ensuite, au niveau des importateurs
qui ne respectent pas certaines modalités des cahiers des charges quand ils
établissent leurs programmes annuels de besoins, surtout pour la constitution
de stocks de sécurité. «C'est à cause de cela que la pénurie reste latente et
que des médicaments sont souvent en rupture de stock. Il y a
aussi, ajoute M. Bouherid, cette absence d'étude
réelle qui doit être faite par le ministère de la Santé en collaboration avec
le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale pour déterminer
les besoins en médicaments en tous genres car le second ministère que nous
venons de citer peut fournir les chiffres fiables recueillis au niveau des
11.000 pharmacies conventionnées à travers le territoire national et sur
lesquels ont peut se baser pour établir les besoins.
Sachant que 98% des officines du pays sont conventionnées avec les caisses de
sécurité sociale (CNAS et CASNOS)». Pour sa part, indique notre interlocuteur,
le SNAPO n'a jamais cessé d'attirer l'attention des autorités concernées sur
cette question. Le second facteur qui se trouve à la base des pénuries se
situe, à notre sens, au niveau de la production nationale. On prétend que la
production nationale de médicament générique couvre 70% des besoins locaux.
Cette affirmation n'est pas exacte et elle ne peut l'être que si les
médicaments recherchés sont disponibles dans les pharmacies à longueur d'année.
Or, cela n'est nullement le cas car les pharmaciens qui passent commandes
auprès des distributeurs ne trouvent que 50 ou 20% des médicaments. Donc, si la
production nationale ne peut approvisionner le marché d'une manière continue,
on ne peut parler que de 30 ou 40% de couverture des besoins à la rigueur. Et
de conclure en disant que «si les conditions d'approvisionnement que nous
venons d'indiquer au niveau national et au niveau international manquent
toujours, les pénuries seront toujours là». Et M. Bouherid
de terminer en disant que les pharmaciens ne s'attendaient pas à ce que des
médicaments essentiels, comme la Ventoline et flixotide pour les asthmatiques, les hormones Ovitroll try et progestogel, la vitamine D3 pour les nourrissons, Levothyrox 100 et 75 pour la thyroïde, etc. (la liste peut
aller jusqu'à 150 médicaments), soient en rupture de stock chez les
distributeurs.