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Quand les
enseignants font grand bruit et prennent à témoin l'opinion publique pour
demander des droits, qu'ils estiment spoliés, c'est le ministère qui en rajoute
une couche. Et, depuis 2014, c'est la grande débandade syndicale. Les syndicats
indépendants du secteur n'ont pas encore trouvé la voie d'un dialogue serein
avec un ministère qui, lui-même, semble perdu dans le maelström des
revendications socioprofessionnelles des enseignants.
La dernière sortie de la ministre de l'Education nationale appelant les grévistes à rejoindre leurs postes, pour calmer un tant soit peu une partie du front social, excédé par une grève d'un syndicat d'enseignants qui dure depuis novembre dernier, est un cri de détresse qui résume en lui-même l'extrême désarroi de la ministre face à un blocus qu'elle n'est pas parvenue à débloquer par le dialogue. Et qu'elle veut forcer par le recours à la force et la menace d'un licenciement pur et simple. Le ministère pense naïvement, en s'appuyant sur une décision de justice, qu'il est en droit de faire des ponctions sur le salaire des enseignants grévistes. Et, dans la foulée, fait appel à plusieurs centaines de vacataires pour remplacer les enseignants grévistes. Une démarche contreproductive avec des enseignants n'ayant subi aucune formation, appelés dans le tas, pour casser une grève. Des arguments qui ne vont pas régler le problème, d'autant que le ton au ministère de l'Education nationale a pris les sentiers dangereux de «la carotte et le bâton», ce qui va fatalement durcir le bras de fer. «Nous comptons sur la sagesse des enseignants pour qu'ils reprennent, sinon il y a le glaive de la radiation et vous savez que la loi sera appliquée dans toute sa rigueur». C'est ainsi que s'est exprimé l'inspecteur général du ministère de l'Education nationale. Le «glaive» qu'il évoque ici est tout autant un moyen de persuasion qui rappelle une période de triste mémoire qu'une arme de destruction massive pour un système éducatif décrié. Les déclarations du représentant du ministère, loin de calmer la situation, montrent que les portes du dialogue social, en dépit des déclarations surmédiatisées de la ministre, sont restées depuis longtemps fermées et qu'une seule partie du conflit veut s'imposer par la force de sa légitimité institutionnelle pour résoudre les nombreux problèmes qui bloquent le fonctionnement du secteur. Or, la crise multiforme qui secoue l'Education nationale ne date pas du mois de novembre dernier, ni avant, mais depuis plus d'une décennie et que les ministres qui se sont succédé à la tête de ce département n'ont pu ni gérer, ni résoudre, encore moins trouver les ressorts nécessaires pour maintenir une sorte de «téléphone rouge» pour éviter toute solution conflictuelle, de blocage des positions. Car, dans l'autre camp, celui des syndicats, le constat est le même, avec ce manque de souplesse, l'absence d'une volonté manifeste de ne pas compliquer les choses, et de prendre son temps, en ne prenant pas les élèves en otages, pour discuter démocratiquement des problèmes de pédagogie et des questions sociales, y compris la retraite anticipée, la médecine du travail ou même des avancements rapides et une grille salariale satisfaisante pour tous. Et les deux camps renvoient cette piètre image d'un secteur à l'agonie. Dès lors, pour éviter que la situation ne dérape davantage, le chef de gouvernement doit penser en urgence à une «ingérence positive» pour faire au pays l'économie d'un pourrissement dans le secteur et des situations qui feraient gronder la rue. Devant l'entêtement du ministère et de certains syndicats à ne pas faire «la paix des braves», l'opinion publique est quant à elle tentée de dire «barakat». |
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