Ils
étaient hier des milliers de médecins résidents à participer à une marche nationale
organisée par le Collectif autonome des médecins résidents algériens (CAMRA) à
Oran pour dénoncer la «répression policière durant la marche avortée de
l'hôpital Mustapha-Pacha» et pour exiger des «engagements écrits du Premier
ministre pour la prise en charge de leurs légitimes revendications».
Des
médecins résidents de toutes les wilayas du pays ont fait le déplacement à
Oran, dès lundi, pour prendre part à cette démonstration de force. Les
organisateurs de cette marche ont fait preuve d'ingéniosité pour héberger tous
les médecins résidents à Oran. L'hôpital d'Oran a été le point de ralliement
des spécialistes en formation qui ont commencé à débarquer par groupes dès les
premières heures de la matinée. La marche a débuté dans le calme, mais très
vite, des cris fusèrent de tous côtés : «le silence? trahison», «résidents SOS,
médecine en détresse», «médecins en colère», etc. La manifestation a été
encadrée par un impressionnant dispositif policier. Il y avait des policiers en
tenue et en civil partout et même les membres de l'unité d'élite de la police
(BRI) étaient présents en nombre. Les policiers ont reçu des instructions
fermes d'encadrer à distance cette marche nationale pour éviter tout
débordement ou accrochage avec les manifestants. La circulation automobile a
été carrément interrompue dans un sens, tout au long du premier boulevard
périphérique (avenue Cheikh Abdelkader). Les manifestants, au nombre de 15.000,
selon les organisateurs, se sont dirigés vers le rond-point du pont Ahmed-Zabana en passant par la direction de la santé et par le
siège de la wilaya. Toutefois, ils n'ont observé aucune halte devant les deux
administrations. Ils ont préféré tenir un rassemblement au rond- point du pont
Ahmed-Zabana durant une vingtaine de minutes. Les
manifestants ont entonné en chœur l'hymne national avant de rendre hommage aux
martyrs de la révolution nationale. Les délégués des
spécialistes en formation ont tenu une conférence de presse au pied de la stèle
du chahid Ahmed Zabana
durant laquelle ils ont déclaré que ce mouvement de contestation se poursuivra
jusqu'à la satisfaction de toutes leurs revendications et en particulier
l'«abrogation de l'obligation du service civil et son remplacement par un autre
système de couverture sanitaire pour l'intérêt du patient et l'épanouissement
socioprofessionnel du médecin spécialiste», le «droit à la dispense du service
militaire comme tout citoyen algérien», «le droit à une formation de qualité
pour le résident en sciences médicales», «la révision du statut général du
résident», «le droit aux œuvres sociales comme tous les salariés et
travailleurs algériens» et «la discussion sur les revendications des
spécialistes en biologie clinique en ce qui concerne l'agrément d'installation
à titre privé». Les délégués ont soutenu que le service civil est une
mesure «anticonstitutionnelle et discriminatoire envers le médecin spécialiste,
seul assujetti à cette obligation». Ils réclament ainsi la révision des lois et
des décrets relatifs au service civil des médecins spécialistes et l'abrogation
de la loi 84-10 du 11 février 1984 relative au service civil et des articles
205 et 206 du chapitre IV de la nouvelle loi de santé 2017 qui astreignent et
obligent le spécialiste à l'exercice dans le cadre du service civil et le prive
de son droit à l'évolution dans une carrière hospitalo-universitaire, en
passant la maîtrise pendant le service. « Tous les experts, les professionnels
de la santé, partenaires ainsi que les syndicats de la santé s'accordent à dire
que le service civil a échoué dans sa forme actuelle. Les rapports du CNES
(Conseil national économique et social) sur le développement humain en Algérie
(2007-2013/2015) confirment l'échec de ce service et son retentissement négatif
sur la santé publique des citoyens et sur l'épanouissement professionnel et
social du médecin assujetti», regrettent les délégués. Et d'enchaîner :
«Conscients cependant que les pouvoirs publics ont, à juste titre, la
préoccupation de permettre à tous les citoyens de recevoir des soins de
qualité, nous proposons l'ouverture de postes budgétaires dans toutes les
wilayas du pays accompagnée de mesures incitatives pour les spécialistes en
formation. Nous réclamons l'ouverture de postes dans toutes les wilayas du pays
y compris celles du Nord dont le déficit en médecins spécialistes persiste
toujours et la mise en place d'avantages motivant l'installation des médecins
spécialistes dans les zones éloignées : prime de zones; prime de déplacement;
prise en charge sociale (embauche du conjoint) et majorations des salaires. Nous
exigeons aussi la révision de la durée maximale du service civil (1 an pour le
Sud et 2 ans pour le Nord) et la révision du système de zoning et rapprochement
du domicile familial. Les établissements sanitaires doivent aussi fournir un
logement individuel, décent et équipé ou accorder une prime couvrant les frais
de location et de travaux si nécessaire». Les manifestants sont revenus dans le
calme à l'hôpital d'Oran et aucun incident n'a été signalé durant cette marche
nationale qualifiée d'«historique» par les délégués des spécialistes en
formation, qui promettent d'autres actions d'envergure dans les jours à venir
si rien n'est fait pas les pouvoirs publics pour prendre en charge leurs
«légitimes» revendications.