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Sur le plan
spirituel, c'est un voyage initiatique qui matérialise une quête de la vérité
ou d'un accomplissement de soi. Depuis plus de mille ans, compostelle
est l'ultime étape de millions de pélerins se rendant
vénérer le tombeau de Saint Jacques. Ces marcheurs de la foi hériteront du
surnom de «Jacquet».
Peut-on encore imaginer une naïve incur-sion au pays d'Elizabeth la catholique, en Galice, par un musulman où en Europe, les jeunes sont plus attirés par l'orient des salafistes ? J'ai choisi la route de la sérénité et de la paix en prêtant mon âme à la solitude et à la confrontation avec moi-même. Seul, je vais vivre en solitaire un laps de temps qui brisera la gangue de la routine. Par l'entremise de ce voyage, je voudrais hisser la pensée vers des latitudes en goguettes et écrire pour que la pensée en mouvement devienne action. Elle tentera d'attirer du neuf et créer du sens. Le voyage constitue un terreau nourricier pour la pensée. Je voudrais échapper à un système frelaté qui par son changement d'une paix sociale a accouché une génération formatée, en proie à une inclinaison matérialiste. Faire Saint Jacques de Compostelle c'est aller en contresens du fanatisme aveuglant. C'est aussi une ouverture de pensée pour la tolérance de pouvoir vivre ensemble, infinie, une échappée à une ambiance bâtarde d'un échec non programmé que vit la nation. Sur une seule terre, le souci d'épurer notre environnement naturel et moral est primordial. L'être humain est condamné à côtoyer ses semblables et à s'y frotter. Les escarmouches et les guerres n'ont pas eu raison. Le monde avec sa démocratie se cherche encore. La religion demeure un socle intangible. A chaque échec on la visite, d'où tout un faisceau de dérapage de par le monde. L'environnement subit de son côté la plus grande brèche de destruction (trou d'ozone, effet du Nino, réchauffement, etc.) le développement économique avec sa croissance nourricière est devenu la hantise de tous les gouvernements émergents et autres. La faillite de la Grèce est la pointe de l'iceberg de vouloir vivre au-delà de ses moyens. La consommation domine le mode de vie. Quel est le rôle des jeunes devant cette situation ? Certes la tendance à la révolte couve, elle s'est manifestée par le printemps arabe du fait que les diktats exerçaient sans pitié, la réaction des jeunes aidés par les réseaux de Facebook, de Twiter, etc., ont facilité la jonction qui fut plus efficace pour mettre à bas leur régime. La fuite vers la nature est aussi apaisante que cathartique. La marche colorée d'une touche de religion devient à la mode. Le pèlerinage longue distance s'amplifie. Il n'y a pas mieux que de suspendre les gants, de décrocher de tout et fixer son idéal vers un tour du monde ou, à défaut de grand moyen, cheminer vers Saint Jean de Compostelle. Une démission à la carte : un à six mois de déconnection. Abattre au moins huit cents kilomètres n'est pas à la portée de tous mais jouable aussi bien pour les filles que les garçons. Selon la forme et les capacités physiques, c'est 20 à 30 kilomètres par jour qui seront imposés aux souliers et aux pieds. Une infime partie du lot des marcheurs sont dotés d'une foi inébranlable, le reste c'est une tentative de renouer avec soi-même. Pour mon cas, c'est un autre motif, purement personnel. Ma tendance à toujours été tournée vers l'aventure et les voyages buissonniers (marche aux pays des Dogons, Falaise de Bandiagara, Marche sur les crêtes de chaîne himalayenne, escalade au Mont Kenya et Kilimandjaro, et localement : Tlemcen-Sebdou et retour en taxi, Tlemcen-Sidna Youchaa et plongeon à la mer, Tlemcen-barrage du Mefrouch et source de Tichtiwine via Belaadour, et les marches de la Kiddaria (lieu de rendez-vous des maquisards aux temps des gloires). Pour la marche j'étais rodé, mon contact avec la nature éprouvé. La curiosité naturelle était de mise. La tendance vers le voyage partageait la vocation aventurière. Après le Japon, l'Alaska, le Népal, la Tanzanie, Tombouctou, la Mecque à plusieurs reprises, Bénarès, le Vatican, etc., la liste est longue, bref : le résultat de plus de 60 ans de bourlingage où à chaque année, je sourds hors du nid natal pour la découverte d'une contrée insolite. Après un voyage éclair au pays de Chin-guitti, tout récemment, un pèlerinage sur les traces du célèbre Théodore Monod et d'Odette du Puigaudeau, la soif d'un nouvel élan vers l'inconnu se manifestait. Effectivement, à Guelb er Richat, ce cratère de 40 km de diamètre, près d'Ouadane, découvert en 1964 par Théodore Monod, qui essaya de résoudre toute sa vie l'énigme de son origine, fut pour moi un autre attrait envoûtant par le paysage lunaire et l'aspect scientifique de ce cratère avorté. La piste de 120 km ne dessert que quelques puits de forage pétrolier récent. L'approche des lieux est suspecte par je ne sais quelle méfiance. Pour y pénétrer, il faut jouer de mille astuces. Jour de départ, jour de fébrilité. Marseille, première étape de mise en train du voyage. Auberge de jeunesse avec vue surprenante sur la mer et ambiance joyeuse et amicale. Le soir autour d'un petit feu, la guitare entonnait des airs de jouvence. Matin à l'aube, je frétillais d'impatience pour reprendre la route. Je passe d'abord par le rail de la gare Saint-Charles, l'un des points vitaux de la ville. Tout est bien orchestré, le service des informations vous fournit à la demande votre feuille de route. Je voulais dans la foulée visiter Lourdes pour mon miraculeux voyage, et continuer dans la sainteté pour compostelle (Changement de train à Toulouse à 14h12 minutes pour reprendre la direction de Lourdes. Arrêt d'une journée, juste le temps de se purifier et continuation par bus de la même compagnie SNCF jusqu'à destination de Saint Pied de Port), une journée de train qui va osciller de 10h du matin jusqu'à 14h dans un train confortable, avec un environnement idyllique. La nature à travers la vitre se compose comme dans un film de Walt Disney. Tout me parait parfait, d'un autre monde : des petits pots de fleurs sur les balcons, des terres cultivées reflétant toute une palette de couleurs, des villages aux alignements étudiés, routes et autoroutes qui se chargent, s'entrecroisent, se jouxtent et se surmontent pour rivaliser en parallèle et disparaître laissant place à des forêts fournies, des bocages qui bougent, se suivent, s'entrecoupent et qui laissent place à une gare, un quai parfait qui se tire jusqu'au hall où la foule disciplinée, bien nippée tirant élégamment des valises à roulettes silencieuses. Le chariot mini buffet, bien achalandé vous tente du moins par une bouteille d'eau fraîche, et pour se dégourdir les jambes, le wagon buvette est à quelques encablures de mon wagon. En passant, une halte dans les toilettes vous surprend par son agencement et sa propreté. Une «affaire» de culture d'un peuple, me dis-je. Les toilettes des cafés, des restaurants, des hôtels, des gares, sont un peu le reflet du degré d'avancement de la civilité d'un peuple, de même que l'évacuation de ses déchets. Je vais chercher où lier conversation, le mieux me dis-je, c'est de trouver soit un compatriote ou un candidat «jacquet» (un pèlerin). Il est reconnaissable à son bâton et à son sac au dos pas trop plein. Deviser, est une drogue cultivée avec soin dans de nombreux cafés en Algérie. A Tlemcen, «capitale des cafés et des bains» : entre deux cafés et deux cafés, nichent deux cafés qui fabriquent du verbe» un championnat va être organisé sous peu par la future «association des amis des tourneurs en ronds» sous le haut patronage de son excellence le chef patrouilleur. Les subventions sont activement recherchées à une époque où le pétrole est tombé de son trône. Le colloque s'annonce passionnant où le verbe va dominer en imposant sa marque régionale du «Akhay». Mon café à la main, je vacille, subissant l'effet de la vitesse du TGV pour côtoyer une dame seule. J'entame avec politesse un bonjour pour annoncer : «voyager, c'est tutoyer l'ailleurs» n'est ce pas ? - Exact, pour ne pas dire que les voyages forment la jeunesse et aiguisent la vieillesse. - C'est aussi un état d'ataraxie, un moment magique où l'on oublie sa trajectoire. Une fois sur les lieux, la photo devient interdite, pas à cause du cratère mais des derricks en position d'alerte, dressés vers le ciel. Des panneaux d'interdiction encadrés par des guérites de surveillance veillent au grain du secret industriel. Le chauffeur de mon taxi me montre comment prendre des photos sans attirer le moindre soupçon. Accrocher l'appareil au cou avec comme ouverture une fenêtre de la djellaba à condition d'avoir un autre appareil de secours, car le premier est déposé au poste de contrôle. Multiplier les prises et sélectionner après. La marche autour du cratère n'a rien d'exaltante d'autant plus que le soleil chauffait au chalumeau. Ce fut une marche chaude sans intérêt mais pleine de mystère et de suspense. Elle rappelle celle du Mont Arafat avec vue sur une plaine désertique plein d'enthousiasme et de foi Mohammadienne. Celle de Compostelle est tout à fait autre. Elle commence par une curiosité à assouvir. L'idée prend corps au fur et à mesure, se développe, se nourrit, pour que la pulsion décide de l'action. Le projet prend forme, son évaluation (temps, budget, condition physique, etc.) est approchée. Il couvre, macère, attend l'opportunité et saute dans les rails. Première embûche, on se heurte à la préparation du sac au dos. L'ennemi prévu est le poids. Donc sélectionner au plus possible l'essentiel. Eliminer les petits détails qui paraissent insignifiants. Peser et repeser pour fixer la limite à dix kilos. L'essentiel va tourner autour des médicaments, du linge en contact direct avec la transpiration, des chaussures légères et confortables, l'appareil photo, un livre et des effets pour écrire, deux serviettes pour la douche, effets de toilettes aux plus simples. crème de rasage en petit volume, brosse à dent pliable, miroir miniature, lampe de poche, savonnette, shampoing en sachet pris lors des passages en grand hôtel, casquette,etc., une fois le sac bouclé, c'est la mise au point de l'euro et la possibilité du trajet. Rejoindre le point de départ de Compostelle dépend de ta zone d'origine car il y a plusieurs chemins (camino). Toute l'Europe converge en un grand faisceau vers les Pyrénées notamment à Saint Pied de Port près d'Hendaye. Le chemin du Sud passe par le Portugal et l'Espagne. J'ai opté pour celui de la France. Donc Marseille et puis relais par le train jusqu'au grand point de rassemblement aux Pyrénées. Normalement pour celui qui décide, le pèlerinage commence de son lieu d'origine. C'est ce que font les Allemands, les Belges ou les suisses. Mais pas les Australiens ou les Canadiens qui sont d'ailleurs nombreux. Profitant d'un spécial avec aigle Azur, en ce début de printemps, je me lance dans l'aventure. Tout y est, le sac bien amarré sur mon dos, avec en secours un sac en bandoulière pour le viatique. Le désir tend vers l'espoir de bien accomplir cette épreuve. Epreuve volontaire que je me suis fixée hors cadre religieux. Un pèlerinage du «Gosto», un pèlerinage qui assouvit ma curiosité en prime abord, une épreuve en communion avec la nature, une quête supplémentaire sur soi-même et sur les autres, une tentative de rapprochement des religions, une ouverture de tolérance pacifique, un voyage, une aventure assez économique (gîte à 6 euros petit déjeuner compris, bouffe à petit prix, etc. Attendre quoi alors ! Allez ! Allons-y Alonzo ! Zdam ya zeddam ! |
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