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Avec
un discours tantôt rassurant, tantôt inquiétant, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia a présenté hier, le Plan d'action du gouvernement
devant l'Assemblée populaire nationale (APN), en défendant, bec et ongles, la
solution du financement non conventionnel.
Pour le chef du gouvernement, le recours au financement non conventionnel interne est la solution idoine pour la sauvegarde de l'indépendance financière du pays. Notamment, reconnaît-il, dans cette conjoncture difficile due à une crise des prix du pétrole persistante, ayant comme conséquence directe, l'amincissement des réserves de changes qui se sont réduites à 100 milliards de dollars, et l'épuisement des avoirs du Fonds de régulation des recettes (FRR). Il affirme, en outre, que «nos banques, notamment publiques, ne sont plus en mesure d'octroyer des crédits, même pour les projets les plus efficaces, car elles n'ont plus d'argent comme auparavant». Afin de convaincre les citoyens, les experts et les personnalités politiques et économiques, les plus sceptiques, Ahmed Ouyahia a affirmé que son gouvernement a décidé de recourir au financement non conventionnel interne, comme l'ont fait d'autres pays. «Le financement non conventionnel n'est pas une ?bidâa' algérienne», dira Ahmed Ouyahia, en citant de grandes puissances mondiales qui ont choisi cette option, à la suite de la crise financière mondiale, il y a de cela quelques années. Le Premier ministre a cité entre autres, les USA, la Grande-Bretagne, le Japon et des pays européens. Il a affirmé que la Banque centrale européenne a injecté 2.000 milliards d'euros, en 2 ans, pour redynamiser le marché financier et faire face à la crise. Pour Ahmed Ouyahia, le refus de recourir à l'endettement extérieur n'est pas une position dogmatique mais il s'agit juste de favoriser des solutions internes, pour éviter de retomber dans les mains du FMI. Il a affirmé que l'Algérie a besoin de 20 milliards de dollars, par an, pour combler le déficit budgétaire. Et d'alerter «si on ne trouve pas de solution, sur 4 ou 5 ans, on risque de ne plus pouvoir payer les intérêts de la dette», a-t-il averti. Contrairement, à ce qui a été avancé par des partis politiques de l'opposition ou par certains experts, Ahmed Ouyahia a tenu à rassurer, en affirmant, que «le recours au financement non conventionnel aura un impact positif sur les citoyens, l'Etat et les entreprises locales.» Il affirme que cette solution financière permettra de relancer ou d'achever des projets de développement humain, gelés ou bloqués, ces dernières années, et ce, dans plusieurs domaines dont ceux de la santé et de l'Education. Et d'ajouter en outre, que ces emprunts non conventionnels, auprès de la Banque d'Algérie, permettront à l'Etat de continuer de fonctionner, normalement, sans devoir imposer aux citoyens de nombreux impôts nouveaux. Sur un ton rassurant, Ahmed Ouyahia, précise que la dette publique de l'Algérie ne dépasse pas, actuellement, 20% du PIB. Ce qui laisse au Trésor une marge confortable pour emprunter. Répondant à ceux qui craignent une inflation, hausse des taxes et dévaluation du dinar, suite au recours au financement non conventionnel, Ahmed Ouyahia apporte des arguments contraires. Il dira que le financement non conventionnel ne va pas affaiblir le dinar. Car et selon sa conception des choses, «le dinar baisse quand les réserves de change baissent». Et de poursuivre «sinon comment expliquer une baisse du dinar de 25 à 30%, face à la devise, ces trois dernières années, bien avant le recours au financement non conventionnel ?». Le premier ministre qui cherche un cautionnement pour la démarche de son gouvernement, par le parlement, rassure en affirmant que le financement non conventionnel ne va pas servir à financer la consommation. Il a déclaré que le recours à ce financement ne va pas dépasser cinq ans, avec l'engagement de mener des réformes durant cette période. Il défend les solutions de son gouvernement, en précisant que le recours au financement non conventionnel va permettre d'élaborer une loi de finances 2018, sans hausse de taxes. Confiant, Ahmed Ouyahia, prédit une sortie de la crise après 3 ans, au plus tard, dans 5 ans. Il dira que si les experts sont sommés de donner des conseils, d'élaborer des schémas et stratégies, le gouvernement est dans l'obligation d'assurer les salaires des travailleurs et pérenniser les ressources notamment pour la Caisse des retraites. En mode «conférencier» le ministre a essayé d'expliquer aux parlementaires (représentants du peuple) que le gouvernement a déposé, au Parlement, un projet de loi portant amendement de la loi relative à la Monnaie et au Crédit, pour autoriser la Banque d'Algérie à acquérir, directement, des titres qui seront émis par le Trésor. Autrement dit, c'est le Trésor public qui s'endettera pour financer les déficits du Budget. Ahmed Ouyahia a indiqué, dans ce sens, que le Trésor public financera, aussi, le remboursement d'importantes dettes de la Société nationale des hydrocarbures (Sonatrach), évoquant un montant de 900 milliards de dinars. Et d'indiquer que le Trésor public va rembourser ses dettes à travers des bons bloqués jusqu'à l'horizon 2030. Idem pour l'assainissement des dettes de la Sonelgaz. Le Premier ministre a également affirmé que le gouvernement ne compte pas revoir les subventions des prix des produits de large consommation, pour l'année 2018. Et de préciser que le dossier de révision des subventions de l'Etat est toujours à l'étude. Les partis de l'opposition rejettent en bloc «le plan» d'Ahmed Ouyahia Pour le président du RCD, Mohcen Belabbès, le financement non conventionnel «n'est qu'une arnaque déguisée, c'est carrément de la fausse monnaie» dit-il. Pour le chef du RCD, si on veut relancer l'Economie algérienne, il faut aller vers des réformes structurelles. Il faut aussi rétablir la confiance des citoyens dans les instituons de l'Etat. Pour Belabbés, ce financement non conventionnel va piéger les générations futures. «Nous allons assister, très rapidement, à une augmentation générale des prix, nous allons assister, encore une fois, à une dévaluation plus accrue du dinar». D'autres partis politiques ont considéré que l'exemple donné par le Premier ministre, sur les grandes puissances mondiales, qui ont eu recours au financement non conventionnel et mettre au même pied d'égalité l'Algérie avec ces pays est en fait «une tromperie politique». Le chef du groupe parlementaire du MSP, Nacer Hamdadouche a expliqué que la différence est que «ces pays ont une monnaie et une économie forte» et «une production diversifiée». Et de poursuivre par contre l'Algérie «n'est pas du tout dans cet environnement, ce qui conduira, fatalement, notre pays à la dégringolade totale du pouvoir d'achat et à l'inflation». Autrement dit, «les conditions ne sont pas réunies pour la réussite de cette option». Il précise, encore, que le gouvernement opte pour des solutions qui sont loin de la logique de l'investissement, mais il se limite toujours à des solutions de gestion. Et regrette, en outre, que le gouvernement en place s'intéresse moins à la bancarisation de l'argent de l'informel et à un degré moindre au recouvrement de l'impôt. Il déduit «il y a, malheureusement, un mariage illégal entre le gouvernement et les oligarques». Et de regretter le fait que le gouvernement actuel n'évoque pas d'autres alternatives, comme la finance islamique, qui a fait ses preuves dans des pays non musulmans. Pour les partis de l'opposition le gouvernement n'a ni une vision politique, ni économique, ni même financière capable de faire sortir l'Algérie de la crise. Le RCD, le PT, le FFS, le MSP et d'autres partis de l'opposition ont exprimé leur refus catégorique, quant au plan du gouvernement, présenté par Ouyahia. |
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