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Menace collatérale

par Moncef Wafi

Plus que jamais la guerre contre Daech en Irak et en Syrie inquiète l'Algérie. Les conséquences d'une défaite militaire des troupes d'El Baghdadi seront, à n'en pas douter, désastreuses pour la sécurité intérieure des pays du Maghreb, la Tunisie et le Maroc en tête d'affiche, dont les nationaux ou bi représentent les plus grands contingents de l'armée à la bannière noire. Tous les rapports des services secrets étrangers convergent vers cette vérité et le dernier en date émanant de Moscou confirme cette tendance.

En effet, les prévisions russes sont loin d'être optimistes pour la sécurité de l'Algérie puisqu'il est fait état d'une détérioration du climat sécuritaire dans les quatre derniers mois de cette année qui devra se prolonger jusqu'en 2018. Une menace qui ne pèse pas seulement sur notre pays mais qui s'étend à ses frontières avec la Libye, la Tunisie ou encore le Mali.

Le retour des anciens combattants, plus aguerris, plus déterminés à semer le chaos, représente le plus grand danger pour les pays de la région d'autant plus que défaits militairement en Syrie et en Irak, l'Otan leur ouvre grande la porte de la retraite. Moscou prévient d'une série d'attaques et d'attentats meurtriers durant cette période qui peuvent aussi concerner l'Asie mineure et les Républiques de Russie.

La menace est à prendre au sérieux surtout que le processus a réellement commencé, à en croire les services russes, avec le retour des hommes de Daech dans leurs pays respectifs sous de fausses identités, à bord de vols long-courriers. Cette donne n'est pas nouvelle en soi mais la précision temporelle des informations laisse présager le pire. Alger a intégré ce retour dans ses plans préventifs, elle qui a vécu, plus que quiconque, le drame des Afghans dans sa chair. Ces centaines voire des milliers d'hommes représentent également un renfort qualitatif et quantitatif aux organisations terroristes au Sahel et dans le Caucase. En 2016, le lieutenant-général Vincent Stewart, directeur de la Defense Intelligence Agency (DIA), affirmait que Daech avait déjà opéré en Algérie une année plus tôt. Ses propos, rapportés par les médias américains, mettaient en relief le danger d'un redéploiement des hommes d'El Baghdadi sur d'autres territoires à travers ses «branches émergentes» au Mali, Tunisie, Somalie, Bangladesh et Indonésie.

Pour rappel, quelque 200 Algériens se trouvent actuellement dans les rangs de l'organisation en Syrie mais le grand péril vient des Tunisiens et des Marocains largement représentés dans les nationalités combattantes. Par ailleurs, les différents attentats perpétrés en Europe et revendiqués par Daech avaient reposé en termes d'actualité et d'urgence la présence de combattants aguerris par l'expérience syrienne et irakienne aux têtes de pont dans les capitales européennes. On sait que le mal de l'Europe réside dans ces combattants étrangers qui détiennent des passeports de pays de l'Union européenne qui représentent la plus grande menace actuelle contre les intérêts européens et américains puisqu'ils peuvent se fondre dans le décor froid du Vieux Continent. Et ils sont nombreux ces djihadistes puisqu'ils étaient estimés facilement à 3.000.

Presque tous les pays européens ont leurs djihadistes, aussi bien la France, qui représente le plus grand contingent, que la Grande-Bretagne, l'Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, la Suède et le Danemark, mais aussi l'Espagne, l'Italie, l'Irlande et l'Autriche. Le plus problématique pour les services de renseignement européens c'est que les analystes estiment entre 20% à 30% de ces ressortissants ou résidents européens qui sont rentrés chez eux.