Rabat
a-t-il fini par céder aux pressions françaises sur le dossier des réfugiés
syriens bloqués à sa frontière ? Il est permis de le croire puisque le roi du
Maroc vient de donner ses instructions afin de régler la situation des 13
familles syriennes coincées depuis la mi-avril, «en vertu de considérations
humanitaires et à titre exceptionnel», a annoncé le Makhzen. Rappelons qu'à la
veille de la première visite d'Emmanuel Macron au
Maroc, 25 associations de France et du Maghreb avaient appelé le président
français à trouver une solution au sort «dramatique» de ces réfugiés. Pourtant,
le Maroc a montré toute sa mauvaise foi dans le traitement de cette histoire à
rebondissements, refusant de remettre les migrants aux autorités algériennes.
En effet, alors qu'Alger a décidé, début juin, d'accueillir «à titre humanitaire»
ce groupe de réfugiés syriens bloqués depuis le 17 avril dernier à Figuieg au Maroc, cette opération avait tourné court après
que Rabat a refusé de remettre les migrants. Un communiqué du ministère des
Affaires étrangères (MAE) indiquait qu'Alger a levé «provisoirement» le
dispositif mis en place pour l'accueil et la prise en charge du groupe de
ressortissants syriens en question. Selon Abdelaziz Benali Cherif, le
porte-parole du MAE «le gouvernement algérien a dépêché sur place, à Béni-Ounif, une délégation
officielle chargée de l'accueil, à laquelle s'est joint le représentant du HCR
en Algérie, Hamdi Boukhari».
Alger a regretté qu'en dépit de toutes les dispositions, le HCR n'ait pas été
en mesure d'aboutir à une solution. Le communiqué rappelle qu'«un dispositif
spécial a été mis en place et les moyens humains et matériels adéquats ont été
mobilisés pour assurer l'hébergement dans des conditions décentes et prodiguer
les soins nécessaires conformément aux traditions d'hospitalité du peuple algérien
au groupe en question». Saïda Benhabyles, présidente
du Croissant-Rouge algérien avait déclaré qu'«à Bechar, nous avons préparé
toutes les conditions d'accueil favorables. Nous avons mobilisé les médecins et
les bénévoles». Elle avait tenu à exprimer sa «révolte» et sa «tristesse» de
voir le «Maroc exploiter la misère humaine pour régler des comptes avec
l'Algérie». Elle a tenu aussi à rappeler le caractère récidiviste des Marocains
dans ce genre de question. «Ce n'est pas la première fois, c'est la quatrième.
Auparavant, il y avait des Subsahariens et même des Syriens», avait-elle
assuré. L'ancien chef de la diplomatie algérienne, Ramtane
Lamamra, avait également souligné cette volonté
marocaine d'instrumentaliser le dossier migratoire, mettant en garde contre la
tentation de faire de la tragédie des réfugiés syriens «un fonds de commerce».
Un dossier qui a pris de telles proportions qu'il a été au centre d'une
brouille diplomatique entre les deux pays et l'intervention d'ONG
internationales dont Human Rights
Watch (HRW). Cette dernière s'était interrogée sur le destin de deux groupes de
demandeurs d'asile syriens bloqués aux frontières algéro-marocaines,
près de la ville marocaine de Figuig. L'ONG américaine avait évoqué des enfants
«piégés là-bas depuis le 18 avril 2017», dans des conditions difficiles. Se
basant sur les informations du HCR au Maroc, HRW a précisé que les deux groupes
totalisent 55 personnes, dont 20 femmes et 22 enfants.