La question relative à la situation des Syriens bloqués à la frontière
marocaine ne se pose pas entre l'Algérie et la Maroc mais concerne plutôt le Haut commissariat aux réfugiés (HCR) de l'Organisation des
Nations unies (ONU) et le Maroc, a relevé la présidente du Croissant rouge
algérien (CRA), Saida Benhabyles, qui a réitéré la
disposition de l'Algérie à poursuivre son action humanitaire et solidaire
envers les réfugiés syriens après avoir partagé, avant-hier, «Maidatou el Iftar» (repas de
rupture du jeûne) aux côtés de familles syriennes au camp de Sidi Fredj à
l'occasion du mois sacré de Ramadhan. C'est que les échanges
d'accusation entre le Maroc et l'Algérie ont brouillé les cartes au départ,
c'est-à-dire après le 18 avril, date depuis laquelle une soixantaine de
réfugiés syriens, dont une vingtaine d'enfants, qui voulaient rejoindre leurs
familles établies au Maroc, se sont retrouvés prisonniers du désert. Le Maroc
accusait l'Algérie de manipuler la détresse de ces réfugiés pour créer des
troubles à la frontière, alors qu'en parallèle certaines ONG mettaient le tort
sur les deux pays, qui n'ont pas pu gérer ce dossier sur le plan humanitaire et
apporter aide et assistance à un aussi petit groupe de Syriens. Le Maroc, dans
un show médiatico-diplomatique, a même convoqué
l'ambassadeur d'Algérie, lui exprimant sa « profonde préoccupation » et jugeant
« immoral et contraire à l'éthique de manipuler la détresse morale et physique
de ces personnes », des accusations qui ont été rejetées d'une manière
catégorique par Alger, qui a convoqué à son tour l'ambassadeur du royaume pour
lui signifier que les accusations du Maroc sont « mensongères » et « ne visent
qu'à nuire à l'Algérie ». Rappelons dans ce contexte que le Maroc a fait un
pressing sur l'Algérie concernant la question des réfugiés, accusant l'Algérie
de réserver un accueil des plus humiliants aux réfugiés subsahariens et de les
regrouper dans des camps et de les expulser manu militari. C'était, l'on se
rappelle, une véritable campagne de dénigrement engagée contre l'Algérie, d'un
côté on dénonce l'aspect inhumain du traitement réservé aux migrants
subsahariens par l'Algérie, et d'un autre on passe à l'offensive avec une
campagne de charme du roi Med VI, en direction des Africains subsahariens,
mettant en relief l'image d'un Maroc plus accueillant que l'Algérie. C'était
également le temps où le Maroc se cherchait des appuis pour réintégrer l'UA et
prendre le contrôle de ses commissions les plus sensibles. Mais la vérité finit
toujours par prendre le dessus, et les choses se sont éclaircies à la lumière
du geste humanitaire initié ces derniers jours par l'Algérie, proposant
d'accueillir les réfugiés syriens sur son sol durant ce mois sacré, puis les
concernés auront à choisir leur destination. L'action de l'Algérie « répond à
un devoir humanitaire qui émane des préceptes de l'Islam et des principes du
droit international humanitaire et, qui s'est concrétisée par l'ouverture de
ses frontières pour accueillir ces réfugiés », dira à ce propos la présidente
du CRA. Mais, le Maroc refusera de les laisser quitter leur camp, empêchant
leur passage vers l'Algérie par le poste-frontière de Figuig. L'Algérie, qui
avait mis en place tout un dispositif d'accueil, a fini par tout lever après le
refus des Marocains de les laisser passer en Algérie. Vraiment, d'une absurdité
choquante. En tout cas, maintenant, les choses sont claires, la question ne se
pose plus entre les deux pays voisins mais entre le Maroc et HCR de l'ONU, car
les Syriens bloqués à la frontière ont émis le vœu d'introduire des demandes
d'asile auprès du Maroc, parce que leurs familles vivent dans ce pays en tout
légalité et ils veulent les rejoindre, selon des sources en contact avec les
concernés. Et c'est la raison pour laquelle ils ont essayé de traverser la
frontière. L'Algérie n'a jamais expulsé aucun Syrien, preuve en est, «on
dénombre près de quarante mille (40 000) réfugiés syriens sur le sol algérien,
bénéficiant de toutes les conditions sociales et sanitaires indispensables et
la scolarisation de leurs enfants», selon une déclaration de la présidente du
CRA. Pour sa part, le représentant de la communauté syrienne en Algérie, Salah Yezbek, a tenu à exprimer, lors de ce repas de rupture du
jeûne organisé par le CRA en l'honneur de familles syriennes estimées à 70
familles environ, soit 300 personnes dont certaines d'origine palestinienne, sa
«gratitude et ses vifs remerciements aux autorités algériennes qui redoublent
d'initiatives afin d'assurer une prise en charge sociale, éducative, sanitaire
et humanitaire des familles syriennes sur le sol algérien».