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Spectacle à guichets fermés

par Moncef Wafi

Le séisme diplomatique qui frappe depuis lundi le Golfe, et plus précisément le Qatar, est suivi avec attention par l'Algérie. Et c'est le moins qu'elle puisse faire. Dans un communiqué des Affaires étrangères, rendu public hier, Alger se dit préoccupé de la dégradation des relations entre les pays voisins de la région, s'interrogeant sur ses conséquences sur l'unité du monde arabe, si d'aventure elle existe encore ou a-t-elle existé un jour.

La diplomatie algérienne, fidèle à ses traditions, a fait dans la retenue, évitant de porter un jugement de valeur à ce qui vient de se passer, se contentant simplement du strict minimum syndical en pareilles circonstances. Tout en appelant au traditionnel dialogue, prôné pour ce genre de situation, Alger rappelle la nécessité d'observer «les principes de bon voisinage, de non-ingérence dans les affaires internes des Etats et du respect de leur souveraineté nationale», histoire d'expliquer sa position d'observateur neutre. Le positionnement de l'Algérie, tout en retrait, prenant le temps de bien mijoter sa réaction, le communiqué n'étant publié qu'au lendemain de la rupture des relations diplomatiques entre le Qatar et cinq pays arabes plus les Maldives, renseigne de la complexité des événements.

En effet, il serait crédule de croire que les seules raisons qui ont poussé Ryad et Abou Dhabi d'étrangler le petit émirat se trouvent dans le soutien au terrorisme ou encore avec ses accointances iraniennes ou son protectorat pour le Hamas. Des griefs connus depuis longtemps et les raisons sont ailleurs, à n'en pas douter. Alger en refusant de s'immiscer dans cette querelle de voisinage sait fort bien que son attitude lui sera un jour reprochée. En effet, il est fort à parier que le Qatar devra faire, tôt ou tard, allégeance à l'encombrant royaume wahhabite quitte à risquer une révolution de palais comme c'est de coutume dans ces monarchies.

Le chef de la diplomatie des Emirats arabes unis a clairement réclamé des garanties pour pouvoir reprendre langue avec Doha, sans toutefois préciser leur nature, mais il est plus que probable qu'elles s'orientent vers le versement d'une forte dîme de protection pour l'Oncle Sam comme exigé par Trump et une totale vassalité à la politique étrangère de Ryad. Alger garde, pour le moment, le beau rôle en regardant de loin toutes ces monarchies du Golfe se battre pour une place privilégiée de Washington et d'Israël dans la région.