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Les acheteurs,
qui espèrent depuis deux ans un scénario à l'espagnole et un éclatement de la
bulle immobilière, commencent à perdre leurs illusions.
Les prix ont certes baissé pour l'ancien comme pour le neuf (parfois jusqu'à 30%), cependant, ils restent surévalués et loin de leurs valeurs réelles. Le marché immobilier algérien semble échapper à toute logique économique. Presque tous les ingrédients du crash immobilier sont là, à commencer par une offre disponible élevée, une demande en recul, un blocage des transactions, des prix en berne... Malheureusement pour les acheteurs, ce n'est pas assez pour provoquer un crash à l'espagnole. Au mieux, la bulle immobilière va légèrement se dégonfler en attendant des jours meilleurs. Comment le marché immobilier a évité l'effondrement des prix? Qui fixe les prix des biens immobiliers? Comment les propriétaires peuvent-ils résister à une conjoncture économique aussi défavorable? Le président de la Fédération nationale des agences immobilière (FNAI), Aouidat Abdelhakim, répond à toutes ces questions et apporte des éclairages forts utiles pour comprendre le marché immobilier en Algérie. «Le marché de l'immobilier stagne en Algérie en raison des prix surévalués. Il y a de moins en moins de transactions et beaucoup d'intermédiaires. L'Algérien moyen n'arrive plus à acheter ou louer un bien immobilier. 80% des transactions immobilières sont réalisées sur le marché parallèle par des intermédiaires qui fixent les prix à leur guise. Il faut avouer que les prix des biens immobiliers en Algérie sont fixés au pif, c'est-à-dire qu'ils n'obéissent à aucune logique économique», explique le patron de la Fédération des agences immobilières. Il ajoute que le marché immobilier connaît un blocage en raison d'une offre en constante hausse et une demande en baisse, toutefois, les prix restent trop élevés pour les salaires. «Il vous faut aujourd'hui un budget de 15 millions de dinars pour acheter un F3 ou un F2 bien aménagé dans un quartier moyen à Alger», précise notre source. Dans les autres grandes villes du pays, il y a une baisse négociée dans l'ancien, cependant, les prix demeurent trop élevés par rapport au pouvoir d'achat des couches moyennes. A Oran, à Constantine ou à Annaba, il faut au minimum entre 700 et 900 millions de centimes pour acheter un F3 d'une superficie entre 70 et 90 mètres carrés dans certains quartiers. Avec près de 2 millions de logements inoccupés (les statistiques officielles parlent de 1,2 millions) depuis plusieurs années et des centaines de milliers de logements neufs construits chaque année, pourquoi les prix restent-ils si élevés? Le patron de la Fédération des agences immobilières explique cette situation par la résistance des propriétaires qui refusent de «brader» leurs biens. «Il y a des propriétaires qui ne veulent rien savoir. Ils refusent catégoriquement de réviser les prix à la baisse. Il y a une villa dans la périphérie de la capitale qui est mise en location depuis deux ans sans trouver preneur, mais le propriétaire refuse toujours de baisser le prix. La moyenne actuellement pour vendre un appartement varie entre une et deux années. Aujourd'hui, seuls les studios et les petits appartements proposés à des prix raisonnables peuvent être vendus, alors que pour les autres biens immobiliers, c'est le blocage», confie notre interlocuteur joint par téléphone. Selon le patron de la FNAI, le marché de l'immobilier commence, ces derniers temps, à se débarrasser des spéculateurs qui ont abandonné le créneau en raison des mesures prévues par les dernières lois de finances et qui imposent l'utilisation des chèques dans les transactions immobilières. «Les spéculateurs ne peuvent plus investir dans l'immobilier parce qu'ils ont peur de la traçabilité. La plupart ont abandonné l'immobilier pour réinvestir leur argent dans le marché des devises qui échappe à tout contrôle», signale Aouidat Abdelhakim. Le patron de la FNAI reste optimiste quant à l'avenir. Il assure que les prix vont certainement fléchir dans les prochains mois, mais ils resteront toujours trop élevés par rapport au pouvoir d'achat des couches moyennes et en particulier dans le neuf. «Le prix du neuf ne va pas s'effondrer car les promoteurs ont acheté les terrains au prix fort. Il y a aussi d'autres paramètres économiques qui justifient les prix du neuf à commencer par les prix des matériaux de construction utilisés et qui sont généralement importés de l'étranger (céramique, ciment, robinetterie...). Ces matériaux importés ont vu leurs prix grimper sous l'effet des nouvelles taxes décidées par la dernière loi de finances. Il ne faut pas oublier aussi le coût de la main-d'œuvre étrangère ou locale qui influence le coût de revient du neuf», souligne notre source. Le patron de la FNAI estime enfin que l'intervention de l'Etat est nécessaire pour maîtriser les prix de l'immobilier en Algérie. Il appelle ainsi à la taxation des logements inoccupés, la canalisation des transactions immobilières et l'instauration de normes concrètes pour l'évaluation des biens immobiliers. Il plaide aussi pour la déclaration totale pour faire profiter le Trésor public des taxes. L'argent sale empoisonne le marché immobilier Le président de la Fédération algérienne des consommateurs, Zaki Hariz, soutient, de son côté, que la bulle immobilière est alimentée par l'argent sale qui provient des activités illégales (drogue, fraude fiscale, escroquerie, corruption). «Le marché de l'immobilier est inondé par l'argent sale et facile. Il y a beaucoup de spéculation et nous sommes aujourd'hui loin des prix réels des biens immobiliers. Une parcelle de terrain à Canastel (banlieue d'Oran) est proposée aujourd'hui à un prix exorbitant de trois milliards de centimes. Le problème est qu'il y a des gens qui achètent ces lots de terrains à trois milliards de centimes. L'Etat doit intervenir pour lutter contre ces pratiques répréhensibles». |
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