|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
«Certes,
l'Algérie des années 90 était plus démocratique que celle de 2017. Mais cette
dernière est plus sûre que celle des années 90. Tout en reculant sur un plan,
on avance sur l'autre. C'est comme ça ! On n'y peut rien ! Il ne faut surtout
pas trop exiger de ce jeune pays. La peur du lendemain fait de demain effrayant
!»
Tout comme l'économie, la politique souffre, elle aussi, de maux. La profusion des partis politiques créés suite à l'ouverture «démocratique» de 1990 a été néfaste pour le pays. Ce sont 58 formations politiques qui ont pu voir le jour. Des laïco-berbéristes, des islamistes, des nationalistes, des rouges, des verts et des couleurs enchevêtrés. Le gavage partisan ne peut les qualifier de partis politiques, proprement dit ; puisque aussi bien la Constitution de 89 que la loi n°89-11, parlent d'associations à caractère politique et non pas de partis politiques. Depuis 1992, trois formations politiques ont été dissoutes, dont le FIS, et la création de 29 autres, rien qu'en 2012. Présentement, et bien que modestement, plus d'une quarantaine de formations politiques affichent encore présent sur le terrain, surtout lors des législatives locales ou nationales. Le citoyen lambda, en quête d'un vrai discours politique, dans lequel il peut s'identifier, souffre d'indigestion politique, face à ce gavage de promesses et de ce «Haraj Boulitique». Trop de partis vendent des promesses dans ce souk électoral de «endirlek ou nef3alek», mais leur efficacité à changer le quotidien des gens ou avoir les moyens de leurs politiques, n'est même pas à démontrer. Vraiment, il y a inflation politique, reflétée par le nombre d'intervenants, la qualité de leurs discours et leur efficacité effective sur terrain, indicatives d'une faillite politique multidirectionnelle. Un problème de définition se pose d'ores et déjà. Aussi bien la Constitution de 89 que la loi 89-11, délimitent le cadre légal de leurs activités, tout en reconnaissant leur finalité : arriver au pouvoir par le biais des élections. Subterfuge politico-juridique inventé par le régime pour se doter d'une façade «démocratique»? Paradoxalement, l'opposition le dit clairement, tout en jouant le jeu. En règle générale, la fonction principale des partis politiques est d'assurer la participation des citoyens au champ politique sous des formes légales. Dans les pays occidentaux, cette participation est une construction historique. Chez nous, une typologie bien curieuse s'est développée, sur base de logiques paternalistes du système. En effet, et au lieu d'assurer la participation de la population dans la sphère de l'État, la mission des partis politiques se limite à représenter l'État auprès de la population. Malgré les quelque 200 km, en moyenne, qui nous séparent des côtes européennes. Les modèles occidentaux, issus de leurs propres expériences partisanes, fortes d'outils d'analyse méthodologiques assez sophistiqués, empiriques et historiquement différents des nôtres. Toute transposition vulgaire de ces modèles serait tout bonnement une approche inappropriée, voire irréaliste. Le débat entre partis politiques occidentaux n'a rien à avoir avec celui de nos partis ou même de celui de pouvoir/opposition qui ne reproduit malencontreusement que des inepties et des stéréotypes des stigmatisations stériles, marque d'un manque d'imaginaire et de vision politique. Déjà, entre eux-mêmes, les différences sont énormes. La France et l'Allemagne par exemple affichent deux schémas différents, aussi bien de la laïcité que de la démocratie elle-même, et elles seraient encore plus grandes entre l'Algérie, le Maroc et la Grande-Bretagne, au point où toute comparaison serait absurde. En fait, les discordances entre leurs expériences et la nôtre ne résident pas dans la définition mais plutôt dans l'absence de forces politiques réelles et assez puissantes pour imposer au pouvoir exécutif le respect de la loi qui reconnaît les partis en tant que tels. En fait, des partis, il y en a trois catégories, chacun selon son approche : ceux qui se voient comme entreprise nationale de conquête du pouvoir, ils doivent entretenir des relations aussi étroites que possibles, avec l'État et ses institutions. Ils évoluent dans le pouvoir ou autour de lui, mais toujours dans sa banlieue la plus proche. Ces partis ne peuvent pas se voir, (ni dans l'imaginaire), basculer dans l'opposition. Tels le RND, par exemple. Ils se voient donc, comme des entités politiques endogènes au système de gouvernance, nés pour gouverner ou aider à gouverner et que les autres, exogènes au système de gouvernance, ne sont là que pour compléter le décor. Les seconds, ceux qui marquent leur profondeur sociologique et historique comme le FLN qui partage, lui aussi, la première approche avec le RND et bien sûr, le HAMAS, de mouvance islamiste. Et enfin, ceux dont l'étude ne dépasse point leurs structures hiérarchiques, leur fonctionnement, leurs implantations géographiques ou le renouvellement de leurs dirigeants, etc. Malheureusement, aucun sondage ou enquête n'ont été entrepris dans le cadre de la sociologie électorale, pourtant si indispensable. Toutes les études qui ont été faites ont analysé les partis politiques dans leurs tentatives de conquérir le pouvoir pour le servir et s'en servir, moyennant, bien sûr, leur capacité de mobilisation au sein de la société. Ressources qui leur donnent un sobriquet de visibilité sur la scène politique. La composition tribale de l'Algérie impose aux partis politiques une approche tribale dans leurs actions politiques, souvent incompatible d'avec l'esprit de l'État-nation et de la citoyenneté. Laquelle, de plus, devrait outrepasser les remparts idéologiques et les enclaves ethniques et géographiques au sein du pays. Qu'on le veuille ou non, la tribu est le réceptacle matriciel de tout acte politique. Elle est un élément essentiel dans l'exercice de l'acte politique en Algérie. Malheureusement, le choix tribal n'a guère progressé, il se repose toujours sur des critères subjectifs, d'ordres sociaux, «classiste», dignitaire et de notoriété maraboutique, plutôt que sur des considérations objectives de compétences et de probité morale et intellectuelle. Il ne faut pas perdre de vue, non plus, que la compétition partisane pour le pouvoir en Algérie n'a commencé qu'il y a à peine une vingtaine d'années. Que cette forme d'exercice de la «démocratie» qui nous catapulte toujours les plus mauvais au-devant de la scène politique, est la cause principale du refus en bloc d'un pan important de la population à toute participation électorale. Ce refus, qui dépasse bien souvent celui du système lui-même, celui-ci qui pourtant, parraine ces événements. Finalement, le pouvoir n'est qu'un ensemble d'intérêts défendus, protégés et partagés par un ensemble d'individus qui, pour le faire, se dotent de moyens politiques et régaliens d'État. Dans un contexte où la vision d'un futur en commun est absente ou altérée. L'acte politique partisan est réduit à un vulgaire exercice de figuration politique en vue de refléter l'image d'une chose qui n'existe pas dans la réalité. Mais gardons espoir tout de même! |
|