Le karaté algérien comptait au début des années quatre-vingt-dix 350.000
licenciés, un chiffre qui était supérieur au nombre du sport le plus populaire
d'Algérie, le football. Durant cette période, le karaté algérien avait réussi
une remarquable percée sur le plan international, grâce à l'un de ses plus
brillants athlètes, Réda Benkaddour, qui s'est adjugé
le titre mondial en kumité lors du championnat du
monde qu'avait abrité Alger en 1993. Le succès retentissant de Benkaddour avait ouvert la voie à ses coéquipiers en équipe
nationale, tels Rachid Teghri (vice- champion du
monde en kata), Amina Sékiou (championne d'Afrique en
kata), Nadira Zerrouki, championne de l'Union des
pays méditerranéens dans la spécialité kata. Presque tous les internationaux de
cette période faste du karaté algérien raflaient la mise aux championnats
arabes et africains. Or, ces performances n'étaient pas en fait le simple fruit
du hasard, mais bien le résultat d'une politique planifiée par la FAKT qui,
sous la direction de son ancien président Chérif Tifaoui,
avait réussi à mettre en place un véritable plan de développement et de
massification de la discipline qui s'étalait sur plusieurs années et qui fut
appliqué avec rigueur par les 48 ligues de la Fédération. Le développement de
la discipline et ses consécrations sur le plan national et international durera
jusqu'à la fin des années 90, avant de connaître une nette régression. Les
différents présidents qui se sont succédé à la tête de la FAKT n'ont pas réussi
à maintenir la même dynamique de la discipline qui faisait la fierté des
Algériens. Les luttes d'influence, les dissensions ainsi que la mauvaise
gestion ont fini par mettre à genoux la Fédération, victime d'une grave crise.
Première fâcheuse conséquence et non des moindres, puisque l'aura de cette
discipline en a pris un coup auprès de ses admirateurs et de la jeunesse. Le
plus mauvais mandat de la discipline a été celui de la période 2013- 2016 qui a
vu la FAKT dirigée successivement par quatre présidents, alors que l'assemblée
générale ordinaire a été reportée à cinq reprises pour non
conformité aux règlements intérieurs de la Fédération. Le secrétaire
général de la Fédération Rachid Méziane a affirmé que
le dernier bilan financier a été rejeté par le commissaire aux comptes après
avoir constaté que les dettes de la FAKT s'élevaient à cinq milliards de
centimes. Le ministère de la Jeunesse et des Sports a dû intervenir pour mettre
le holà à cette dérive en décidant, d'abord, d'ouvrir une enquête sur la
gestion financière de la FAKT, ensuite, installer un directoire à qui est
dévolue la tâche d'organiser la tenue de l'assemblée générale élective dont la
date n'a pas encore été arrêtée. Ce qui est certain, c'est que les milieux de
la discipline attendent cette élection avec impatience, et les regards sont tournés
vers Réda Benkaddour qui nous a fait part de son
intention de se présenter à l'AGE. «J'attends seulement l'installation du
directoire pour présenter officiellement ma candidature. Bien sûr que je suis
désolé et déçu par la situation que vit notre discipline, qui est victime de la
mauvaise gestion des dirigeants qui ne cherchent uniquement que leurs intérêts
personnels. Ils ont détruit tout ce qui a été construit par leurs prédécesseurs
dans les années 90 au cours desquelles le karaté algérien s'est hissé au rang
international», nous a déclaré l'ancien champion du monde. Nous avons aussi
recueilli l'avis de l'ancien athlète international Rachid Teghri: «Le karaté algérien
connaît une inquiétante régression depuis plusieurs années, à cause de
l'absence d'une véritable politique de développement. Je crois qu'une bonne
partie des dirigeants qui se sont succédé à la tête de la FAKT n'ont pas été à
la hauteur de leur tâche. Aussi, il faut le retour des anciens dirigeants qui
sont connus pour leur amour de cette discipline qui doit reprendre sa véritable
place au plan national et international», a-t-il souligné. C'est également
l'avis de tous les amoureux de ce sport qui a valu au pays de fort belles
satisfactions.