|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Les
spécialistes, notamment de la psychiatrie, tirent la sonnette d'alarme sur
l'abus d'opiacés qui est en nette augmentation dans notre pays. Ils alertent en
affirmant que les toxicomanes souffrant de dépendance aux opiacées (différentes
drogues) détournent consciemment des antalgiques pour diminuer les effets d'un
manque de drogue et pour gérer le syndrome de sevrage. Ils se procurent ces
substances soit sur le marché informel ou bien ils détournent divers
médicaments licites qui se trouvent dans les pharmacies pour l'addiction d'une
manière illicite.
Le professeur Nadir Bourbon a affirmé, jeudi dernier lors de la tenue des 20èmes journées nationales de psychiatrie, à l'hôtel Aurassi, que l'indisponibilité d'un traitement de substitution complique la prise en charge de la population. Et d'affirmer qu'en désespoir de cause, les spécialistes des centres de désintoxication ont essayé d'établir un traitement à base de prégabaline, une molécule aux vertus antalgiques et anxiolytique. Et d'enchaîner que cette thérapeutique a permis de retenir dans le circuit du soin un bon nombre de patients, avec un maintien d'abstinence très appréciable, mais ce n'est pas suffisant. Le Pr Bourbon a affirmé dans ce sens que des traitements de substitution aux opiacés sont déjà prévus par les autorités sanitaires, annonçant que « le projet de la méthadone sera effectif dès le mois de septembre prochain en Algérie.» La méthadone est une substance synthétique de la famille des opiacés qui agit sur les mêmes récepteurs que la morphine et l'héroïne. Elle est employée essentiellement comme traitement de substitution chez les héroïnomanes dépendant. La méthadone a des propriétés comparables à l'héroïne. Ce transfert de dépendance permet de stabiliser le patient et facilite sa réadaptation. Cette substitution a été souvent recommandée par les spécialistes, pour répondre efficacement à la demande des traitements de sevrage, sachant que les Centres de désintoxication accueillent actuellement un nombre considérable de toxicomanes. Selon le secrétaire général de la société algérienne de psychiatrie, Nadir Bourbon, 20 % des gens qui consultent dans les services de psychiatrie, demandent des traitements pour l'addiction (cannabis, alcool et autres substances antalgiques). Et d'indiquer que dans le milieu clinique, les femmes et les hommes qui prennent des opiacés sont à parts égales (50 % femmes, 50 % hommes). Mais, si on revient à la consommation des opiacés par rapport aux statistiques générales et mondiales, dit-il, les femmes prennent moins d'opiacés que les hommes (90 % hommes et 10 % femmes). Le même spécialiste a, par ailleurs, déploré la mauvaise prise en charge des toxicomanes en milieu carcéral. Et de regretter l'absence de liaison entre le milieu carcéral et le milieu externe. Il explique « les gens qui bénéficient d'un suivi en ambulatoire abandonnent le traitement quand ils sont pris en délit de consommation, et quand ils sont mis en prison ». Les spécialistes plaident pour une continuité entre le service pénitencier et les services extérieurs. Et de souligner, « même s'ils entrent en prison pour un autre délit, ils doivent en principe continuer leur traitement, et quand ils sortent du secteur pénitencier, ils doivent revenir à la structure mère ». Même son de cloche chez le Pr Abderrahmane Belaid, qui a regretté l'abandon de la formation sur la toxicomanie et les maladies psychiatriques qui se faisait dans le milieu pénitencier. « C'était une formation que j'ai chapeautée moi-même et qui a duré une année seulement, on a réuni tous les médecins travaillant dans le milieu pénitencier, mais elle fut abandonnée ». Le professeur regrette qu'en Algérie, il y ait beaucoup de bonnes actions, mais elles ne s'inscrivent pas dans la continuité. 400 000 Algériens souffrent de schizophrénie Le vice-président de la société algérienne de psychiatrie, le Pr Abderrahmane Belaid a affirmé que la maladie psychiatrique la plus répandue en Algérie est la schizophrénie. Il a précisé que 1% de la population algérienne est schizophrène, « c'est 400 000 personnes en termes de chiffres », selon le professeur. La deuxième pathologie dont souffrent les Algériens sont les troubles dépressifs où pas moins de 20 % de la population algérienne souffrent de ces troubles. Le Pr Belaid regrette le fait que la grande partie des personnes dépressives ne consulte pas chez les psychiatres. Pour certains, explique le professeur, il s'agit de troubles mineurs et donc ils ne voient pas l'utilité de consulter. Et de poursuivre qu'ils ne consultent le psychiatre malheureusement que quand les choses s'aggravent. La troisième pathologie dont le taux est important sont les troubles anxieux et 25 à 30 % de la population algérienne vivent difficilement avec. Le professeur note que même les personnes atteintes de troubles anxieux ne consultent pas, car c'est toujours mal vu, « c'est toujours un tabou de consulter le psychiatre ». L'anxiété, explique le professeur, c'est une atteinte pénible endurée par le patient. Ce dernier est toujours préoccupé, « il pense à des choses qui vont arriver qui seraient dramatiques pour lui, et qu'il ne peut pas contrôler ». Le professeur regrette toujours le fait que ces personnes arrivent chez le psychiatre quand les choses s'aggravent, « ils consultent quand le patient devient très agité, ou dans un état de dépression grave, ou lors du passage à l'acte suicidaire ». |
|