Le séminaire international consacré à la peine de
mort, abrité par la cour de justice de Boumerdès
durant deux jours, a pris fin avant-hier. Il a été organisé par le barreau de Boumerdès et l'Union internationale des avocats (UIA). Le
sujet est débattu par les robes noires, mais il n'en demeure pas moins que la
rue a déjà choisi son camp, depuis longtemps, déjà au lendemain de l'horrible
crime, dont ont été victimes Haroun (10 ans) et Ibrahim (9ans), survenu dans la
localité d'Ali Mendjeli à Constantine. Les Algériens
étaient nombreux à réclamer l'application de la peine de mort pour les auteurs
d'enlèvements, de viols et d'assassinats d'enfants. Le geste barbare était
amplifié par les images dures des chaînes de télévision, relayées par les
réseaux sociaux, plus particulièrement le site Facebook. En bloc, ceux pour la
peine de mort exigeaient l'application du ?kissas',
contrairement aux rares abolitionnistes. Personne n'avait le courage d'appeler
au calme, regrette le bâtonnier Ahmed Saï, président de l'Union nationale des
barreaux algériens, car le micro n'était tendu que vers les partisans de la
peine de mort dans cet environnement, ajoutant qu'«il y a aujourd'hui en
Algérie, deux écoles ou tendances, la première milite pour le maintien de la
peine de mort et la seconde pour son abolition, et il faut que la société
avance car la sentence de la peine de mort ne règle rien. Selon la charia,
d'ailleurs, ?'el kissas'' répond à des normes, et
l'exécution ne peut rendre la victime à ses proches. Je précise que je suis
partisan du pardon». Partisan du pardon 'El Aafou',
le Tunisien Abdelfatah Mourou,
magistrat, vice-président de l'Assemblée des représentants du peuple de la
Tunisie, dira: «Nous vivons la même situation que
l'Algérie, nous avons gelé la peine de mort au début des années 90, mais nous
sommes confrontés, depuis la chute de l'ancien régime, à des agissements
terroristes, chose qui a remis en cause notre adhésion au moratoire pour
l'abolition de la peine de mort». Pour ?'el kissas'',
Abdelfatah Mourou voit
qu'il n'y a que l'alternative du pardon de la famille de la victime.
D'ailleurs, l'ensemble des partisans de l'abolition soutiennent que les
personnes exécutées à travers le monde sont issues des castes pauvres ou se
trouvent être des opposants aux régimes. De l'autre côté, Me Boudjemaa Souilah, adepte du
rétablissement de la peine capitale, argumente que «les moratoires et les
droits de l'homme sont un pur produit de l'Occident qui l'agite à chaque fois
que ses intérêts sont remis en cause». Agacé, il rappelle:
«Où sont les moratoires et les droits de l'homme brandis par les Occidentaux
quand des enfants palestiniens sont massacrés au quotidien ?» Dans le clan de
l'abolition, Me Bouchachi dira:
«Nous militons pour l'abolition, car le rétablissement ne profite qu'aux gens
du système. Sur les 33 exécutions opérées entre 62 et 93, tous les condamnés
sont issus de milieu défavorisé ou étaient des opposants, même chez la première
puissance mondiale, les USA, plus de 70% des exécutions ont touchés des
personnes de couleur».
La discussion à l'intérieur de l'immense hall de la
cour de Boumerdès a zappé, durant ces deux journées,
le sujet des législatives. L'approche sur la peine de mort passionne, mais gêne
car, pour l'heure en Algérie, il faut reconnaître, relève un avocat de la cour
de Sétif, que «la question du pour ou contre n'est pas une urgence». Rappelons,
enfin, que la peine de mort n'a pas été appliquée depuis 1993, son
rétablissement est contraire aux conventions des droits de l'homme ratifiées
par l'Algérie.