On
connaît enfin la date du procès du meurtrier présumé du patron de la police, le
colonel Ali Tounsi, soit à un jour près, sept ans
après les faits. Oultache Chouaib
sera au box des accusés du tribunal criminel d'Alger le 26 février prochain
pour répondre des accusations d'«homicide volontaire avec préméditation et
guet-apens, tentative de meurtre et possession d'arme à feu». L'assassinat du
DGSN dans son bureau à Alger avait suscité la stupeur parmi les Algérien et
créé un malaise au sein des appareils de l'Etat. Le tribunal criminel sera
présidé par le juge Omar Benkherchi, un magistrat
rompu aux procès médiatisés, et les deux conseillers Gazem
Zahia et Hadj Mihoub Sidi
Moussa, selon le rôle complémentaire de la deuxième session criminelle 2016.
Jeudi 25 février 2010, le DGSN, Ali Tounsi, est
assassiné, peu avant 11h, dans son bureau. L'auteur présumé du crime n'est
autre que le colonel Oultache, alors à la tête de
l'unité aérienne de la Direction générale de la Sûreté nationale depuis une
dizaine d'années. Le communiqué officiel du ministère de l'Intérieur et des
Collectivités locales rapportera que l'incident est survenu «lors d'une séance
de travail, au cours de laquelle un cadre de la police, apparemment pris d'une
crise de démence a utilisé son arme et a blessé mortellement le colonel Ali Tounsi, après quoi il a retourné l'arme contre lui se
blessant gravement». Oultache sera transféré à
l'hôpital militaire de Aïn Naadja. Selon la version rapportée par la presse, Chouaïb Oultache est convoqué le
jour du drame à la DGSN où Ali Tounsi devait lui
annoncer sa décision de le suspendre jusqu'à la fin de l'enquête ouverte sur
«des malversations dans des marchés d'achat d'équipements informatiques et de
télécommunication». Une information qui est publiée la matinée même de ce jeudi
par un quotidien national. Chouaïb Oultache est alors sous le coup de la colère en apprenant
sa suspension par le biais de la presse. Il rencontrera son supérieur en
présence du chef de la Sûreté de wilaya d'Alger et du directeur général chargé
de l'administration (DGA). Au cours d'un entretien houleux entre les deux
colonels, Oultache dégaine son arme et tire sur Ali Tounsi. Il assènera un coup de crosse au chef de Sûreté,
menaçant le DGA avec son arme. Selon la version officielle, le colonel Oultache a retourné l'arme contre lui pour se suicider.
D'autres sources affirment que plusieurs coups de feu ont été entendus sans
pouvoir préciser la provenance de la balle qui a blessé l'auteur du crime. Lors
de la reconstitution de la scène du crime, Oultache
affirme n'avoir pas tiré dans la tête du DGSN. «Je n'ai pas tiré dans la tête
de Ali Tounsi», a-t-il déclaré, relançant ainsi
l'affaire en contredisant la version officielle des faits. «J'ai tiré quatre
balles du côté droit de la poitrine. En sortant, Ali Tounsi
n'était pas mort», a-t-il notamment affirmé, selon Khaled Bourayou,
avocat de la famille de Ali Tounsi qui a assisté à
cette reconstitution. «Le prévenu prétend également avoir entendu une voix en
sortant du bureau de Ali Tounsi qui dit : Achevez-les
tous les deux», raconte encore Bourayou à El Watan, ajoutant que cette reconstitution permet de soulever
d'autres interrogations. «Ce sont des faits nouveaux. Si ce n'est pas le
prévenu, qui a tiré alors les deux balles dans la tête de la victime et qui
l'ont achevé?» s'interroge-t-il. L'avocat estimera également que cette
reconstitution «qui porte sur deux volets» n'avait pas été mise suffisamment en
valeur. Si le modus operandi est connu, le mobile,
lui, reste obscur. Dans une interview accordée, en mars dernier, au journal en
ligne TSA, maître Belaarif, l'un des avocats de la
défense de Chouaïb Oultache,
revenait sur un procès en attente de programmation depuis deux ans. Revenant
sur le procès de corruption dans le marché «ABM-DGSN» où Outache
écopera de cinq ans de prison, il dira que «l'objectif est de créer un alibi».
Pour lui, son client a certes blessé Ali Tounsi mais
il ne l'a pas tué se basant sur les éléments du décès. «Tout simplement, parce
que le corps de la victime porte deux impacts de balle bien réguliers sur le
côté droit de la tête et le côté gauche alors que les balles de l'arme d'Oultache sont des balles semi-blindées à tête creuse qui,
en aucun cas, ne peuvent faire des impacts aussi réguliers que ceux constatés
sur la dépouille», argumentera-t-il. La tenue du procès dans un peu plus d'un
mois mettra ainsi fin à des années de spéculations sur les circonstances de ce
crime et lèvera peut-être le voile sur des zones d'ombre entourant le dossier.