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Pétrole, es-tu là ?

par Mahdi Boukhalfa

Aujourd'hui, mercredi 30 avril 20160, tout le monde a les yeux fixés sur la réunion des pays exportateurs de pétrole à Vienne. Producteurs, exportateurs, traders, marchés, et même nous autres Algériens attendons donc un accord qui, même à l'arraché, fera de nous peut-être des hommes heureux. Des hommes qui vont respirer avec un accord qui va faire remonter les cours du brut et donc va nous faire manger et boire du lait comme avant. Et même, tiens, du lait caillé de vache, avec un bon couscous bien garni de viande de mouton. Car cette réunion de l'Opep de Vienne est perçue comme la dernière chance pour les pays pétroliers de faire infléchir la courbe descendante des prix du brut et donc de provoquer une remontée rapide des prix, et des recettes.

Pour nous, pour notre gouvernement, il est donc vital que cette réunion aboutisse à un accord global qui fasse du bien là où ça fait mal: faire rentrer de l'argent à la trésorerie générale du pays. Oui, mais, pour les Algériens, cela fait toujours mal là où cela ne doit pas faire mal, accord ou pas : le porte-monnaie. Car pour les Algériens, les répliques de la loi de finances 2017 sont là, bien présentes, alors que les secousses de la réunion de Vienne ne seront là que dans une année, même si elles sont loin des préoccupations sociales des Algériens. Car les Algériens, même s'ils suivent avec un intérêt tout particulier le résultat de cette réunion de l'Opep, comme les turfistes suivent les courses à Deauville, ne sont pour les mois à venir qu'à l'écoute des futures hausses des prix des produits de large consommation, comme la semoule, le ?'dkik'', le lait subventionné ou l'huile ?'sans goût''.

Dire maintenant que les Algériens sont scotchés au marché du pétrole et les fluctuations des prix du brut n'est pas tellement une vérité, ni d'ailleurs une certitude. Les préoccupations essentielles du moment des Algériens étant quel sera le niveau de hausse des taxes sur le ?'dkik'', l'huile ou le sucre, le café, l'essence, le ticket de bus et le lait. En particulier pour les retraités, ceux qui n'auront plus jamais une occasion d'aller travailler et gagner de l'argent complémentaire à une pension qui va être réduite comme peau de chagrin par les nouvelles dispositions fiscales contenues dans la loi de finances 2017.

Et puis, même si à Vienne il y aura un accord qui va faire remonter le prix du pétrole, il n'y aura par contre aucune incidence sur la vie de tous les jours des Algériens qui vont, quant à eux, apprendre à vivre avec les augmentations des prix des produits alimentaires, des transports, de l'essence et de tout ce qui est vital pour une vie décente. Même le ?'djadj'', le poulet, va augmenter immédiatement après la réunion de l'Opep, qui coïncide cette année avec le Mawlid, une fête religieuse qui a toujours servi de motif, non valable d'ailleurs, de hausses des prix de la volaille, des produits agricoles et...des pétards.

Moralité : pour les Algériens, toute hausse des prix de pétrole n'équivaut pas automatiquement à une baisse des prix des produits de base. Et, comme nous sommes en crise économique, un redressement des cours de pétrole n'équivaut pas obligatoirement à une amélioration du niveau de vie chez nous.