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La poudrière marocaine

par Moncef Wafi

Des milliers de Marocains sont descendus dans la rue, ce dimanche, dans la région du Rif et plusieurs grandes villes du Maroc pour protester contre la mort d'un marchand de poisson, broyé par une benne à ordures alors qu'il tentait de s'opposer à la saisie de sa marchandise. Un scénario semblable à celui de Bouazizi qui a enflammé la Tunisie tout d'abord avant de s'étendre au reste du monde arabe.

Le Maroc est actuellement au bord de l'embrasement et la mort de Mohcine Fikri est cette allumette qui va mettre le feu aux poudres dans une région réputée rebelle et toujours hostile à la monarchie en place. La mal-vie, le chômage, le désespoir et le népotisme ambiant ont poussé les Marocains à bout à battre le pavé malgré l'annonce officielle d'une enquête sur les circonstances de cette mort. Si Bouazizi s'est immolé par le feu, Fikri, lui, s'est jeté dans la benne à ordures pour récupérer son poisson avant d'être broyé vivant. Le parallèle ne s'arrête pas là et les deux symboles partagent le lot des misérables. La hogra a chassé du pouvoir Ben Ali, que sera-t-il du Roi maintenant que la rue a pris le relais ?

Ces manifestations ont un faux air de la protesta de février 2011, réprimée par le Makhzen, et le Maroc, empêtré dans des difficultés économiques et berné par des réformettes du Roi, risque fort bien de basculer dans la désobéissance civile pour peu que la situation vienne à empirer. Mohamed VI qui règne d'une main de fer sur ses sujets est constamment critiqué sur sa gestion des affaires internes et son appétit insatiable dans la prédation des richesses de son pays. Pourtant, le cas du Maroc est loin d'être une exception puisque tous les pays de la région sont frappés de plein fouet par la corruption et la mal-vie.

Si la manne pétrolière permettait d'acheter une relative paix sociale, la chute des prix du baril a dévoilé les faiblesses d'une gouvernance dite démocratique mais qui fait la part belle aux clans au pouvoir. L'Algérie, à bien des égards, risque de connaître prochainement cette ébullition sociale d'autant plus que tous les ingrédients d'une grogne populaire se mettent doucement en place. Erosion du pouvoir d'achat, décisions foncièrement antipopulaires, augmentation des prix et des taxes?