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L'opposition politique algérienne, structurée autour de l'ICSO (Instance de coordination et de suivi de l'opposition), a rendu publiques hier ses conclusions quant aux prochaines échéances électorales et fait état d'une «déliquescence des institutions de l'Etat». A l'issue d'une réunion organisée avant-hier soir au siège du parti de Ali Benflis, Talai El Houriat, l'ICSO affirme que notre pays traverse une situation particulièrement difficile. «A la confiscation de la souveraineté populaire qui a privé les Algériens de leur droit de choisir leurs représentants légitimes depuis l'indépendance du pays s'est ajoutée, ces dernières années, une vacance du pouvoir dont les retombées se font sentir avec plus d'acuité et qui est la cause directe de la déliquescence des institutions de l'État», est-il écrit dans le mémorandum qui souligne que cette situation a permis la «multiplication des centres de décision sous contrôle de forces extra-constitutionnelles au point où il est devenu légitime de se poser la question : qui dirige le pays ?» L'exacerbation des tensions entre ces forces extra-constitutionnelles constitue, selon l'ISCO, une menace à la sécurité nationale. «L'équation est davantage compliquée par l'intrusion de l'argent douteux dans la sphère politique», ajoute la même source qui fait état également d'une crise financière aiguë qui a pour origine l'échec économique et social, mis à nu par la dépréciation des cours du pétrole. «La corruption et la déprédation de l'argent public sont manifestes dans les scandales à répétition impliquant des membres de l'appareil politico-administratif, leurs proches et les clientèles du pouvoir sans qu'aucune institution ne réagisse», dénonce l'opposition qui soutient en ce sens que les tensions sociales s'exacerbent. La détresse grandissante d'une grande partie de la population qui voit son pouvoir d'achat et ses conditions de vie se dégrader peut, à tout moment, déboucher sur une explosion sociale aux conséquences graves, estiment les rédacteurs du document et accusent le pouvoir d'autisme, d'incapacité d'apporter des réponses à la crise de régime qui s'aggrave, à la crise économique qui prend des proportions alarmantes et à la déstabilisation sociale qui s'annonce, se nourrit de l'illusion de conjurer les périls auxquels est confronté notre pays par un discours creux que l'on veut rassurant et le recours à l'arsenal répressif. «Face à l'impasse politique, institutionnelle et économique, soucieux de neutraliser les voix citoyennes qui s'élèvent remettant en cause sa légitimité, son bilan catastrophique et son absence de vision pour le futur de la Nation, le régime en place a choisi la fuite en avant en s' engageant dans une opération à large échelle d'atteintes aux droits fondamentaux, de restriction des libertés citoyennes et de dénaturation du pluralisme politique en prévision notamment des prochaines échéances électorales» Restriction des libertés Des restrictions concernant la liberté d'expression et d'opinion, la liberté de la presse et le droit à l'information, la liberté de manifestation et de réunions publiques sont observées, estime l'ICSO qui fait état pareillement «d'atteintes aux droits des suspects et prévenus, la violation pure et simple des dispositions de la Constitution, la dénaturation des textes légaux et réglementaires et d'une instrumentalisation de la justice». Pour l'ICSO, il ne fait aucun doute que le pouvoir fait montre d'une volonté de revenir graduellement sur le principe du pluralisme politique en soulignant que le régime en place refuse d'accepter le vrai multipartisme, la saine confrontation des idées, l'alternance à travers «l'exploitation du multipartisme, le refus d'agrément et la multiplication des obstacles pour la création de partis politiques d'opposition, l'achat des consciences, l'ingérence dans la vie organique des partis politiques, l'instauration de lois liberticides?» «Le régime politique perdure en tirant sa survie de la fraude électorale, la confiscation de la souveraineté populaire et une dilapidation des deniers de l'Etat et leur appropriation privative». Le mémorandum dénonce également les entraves au pluralisme syndical, les atteintes au droit de grève par un appareil judiciaire aux ordres, des atteintes au droit d'association par une loi liberticide et la fermeture des médias lourds aux partis de l'opposition. «Le nouveau régime électoral fait subir au pluralisme politique une profonde régression. Il est destiné à entretenir la domination factice des clientèles du régime politique en place. Il reconduit le système de la fraude en le perfectionnant pour assurer le détournement de la volonté populaire. Il empêche l'avènement d'institutions légitimes et représentatives que suppose la constitution d'un Etat de droit», ajoute encore l'ICSO qui attire l'attention sur une «orientation des cours des prochains scrutins au seul profit de sa reconduction». La loi organique sur le régime électoral, selon la même source, laisse intactes les niches de la fraude sur lesquelles l'instance de surveillance des élections n'aura aucune prise. «C'est une pure dénaturation de la proposition de l'opposition appelant à une transition démocratique et la mise en place d'une autorité indépendante et permanente pour une nouvelle gestion électorale comportant la conduite du processus électoral du début à la fin». Le document de l'ICSO soutient encore que cet arsenal juridique participe d'une volonté affichée du gouvernement de verrouiller encore plus le champ politique en vue des prochaines échéances électorales. «Une menace permanente pour le pays» Les membres de l'ICSO sont convaincus que le régime politique en place a fait de la fuite en avant une méthode de gouvernance en dépit des défis politiques, économiques et sociaux d'une gravité extrême, auxquels la nation est confrontée. «Les tenants du pouvoir ont mené le pays à des dérives dangereuses et multiplié les facteurs d'implosion pour avoir rejeté et combattu systématiquement toute initiative pour une issue politique et démocratique à la crise», souligne le mémorandum qui ajoute que le pouvoir n'a qu'un objectif : utiliser tous les moyens pour empêcher toute alternative démocratique et assurer sa survie au détriment de la pérennité de l'État. «Cette politique qui consiste à prioriser la survie du régime au détriment de l'amorce d'une transition qui consacre les libertés et l'indépendance de la justice et donne la parole au peuple algérien pour doter l'Etat d'institutions légitimes et crédibles fait peser sur le pays une menace permanente» prévient encore l'ICSO qui note que le changement s'impose dans notre pays et que l'alternative existe. «L'ICSO rejette la violence comme moyen de contestation et de conquête du pouvoir. Elle a marqué sa disponibilité à aller vers un dialogue avec le pouvoir sur la base d'un projet, celui de la Conférence de Mazafran pour une transition démocratique pacifique, tenue le 10 juin 2014. Une transition démocratique qui épargnerait à notre pays les ruptures brutales et à notre peuple les dérapages et les épreuves qu'il ne mérite pas». Le mémorandum met enfin en garde en affirmant que le pouvoir, qui reste malheureusement sourd aux appels de l'opposition au dialogue pour une sortie de crise politique et pacifique, porte l'entière responsabilité de la situation actuelle et des éventuels dérapages qui pourraient en résulter. |
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